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EAN : 9782246736714
195 pages
Grasset (03/02/2010)
3.59/5   97 notes
Résumé :
Les disparues de Vancouver

« Pourquoi sortir l'affaire des disparues de Vancouver au moment des Jeux olympiques ? Parce qu'elle en est le négatif absolu...

D'un côté, les cimes, la blancheur, la glace, l'exploit, la vitesse, les corps vainqueurs, venus du monde entier, ce que Vancouver veut montrer au monde, une image rêvée... De l'autre, la noirceur, un gouffre au coeur de la ville, les corps vaincus, détruits, drogués, les Indiennes, ... >Voir plus
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Un texte court et percutant pour nous raconter une histoire malheureusement vraie, celle de jeunes femmes victimes d'un "serial killer" à Vancouver.
Bien sûr, il y a l'horreur absolue des actes du coupable (soixante-neuf victimes, cela semble irréel), son absence totale de remords lors de son procès, qui nous montrent un homme complètement déshumanisé.
Mais au-delà de ces atrocités, il y a bien pire dans ce texte. Oui, ce qui frappe le plus à la lecture, c'est l'indifférence générale de la population et de la police locale face aux disparitions à répétition.
Pourquoi a-t-il fallu autant de temps (et autant de victimes) avant que l'affaire soit prise au sérieux ? Pourquoi toutes ces disparitions qui s'accumulaient au fil des ans n'ont-elles pas ému plus de monde ? Et comme le dit une amie de nombre d'entre elles : "Comment toutes ces femmes ont-elles pu être à ce point invisibles aux yeux des autres, subir de telles horreurs, sans que personne les ait jamais entendues hurler ?"
La réponse à ces questions n'est pas belle à entendre, elle fait mal au lecteur, mais c'est un mal nécessaire, un mal qui fait du bien, si j'ose dire : ces femmes étaient considérées comme des citoyennes de seconde catégorie, parce qu'elles étaient droguées et prostituées, et qu'elles vivaient dans les bas quartiers de Vancouver. De plus, la plupart étaient amérindiennes ou métisses. Leur disparition n'émeut personne ou presque, elle arrange même beaucoup de gens.
Élise Fontenaille a délibérément choisi de sortir cette affaire au moment des Jeux olympiques de Vancouver, parce qu'elle en est le "négatif absolu". "D'un côté, les cimes, la blancheur, la glace, l'exploit, la vitesse, les corps vainqueurs, venus du monde entier, ce que Vancouver veut montrer au monde, une image rêvée... de l'autre, la noirceur, un gouffre au coeur de la ville, les corps vaincus, détruits, drogués, les Indiennes, l'échec, la mort, tout ce que l'on voudrait cacher."
Élise Fontenaille ne mâche pas ses mots quand elle évoque le "péché collectif de la ville" ou encore la "cécité de la cité". Mais attention, ne nous précipitons pas illico pour blâmer Vancouver et ses habitants : cette histoire sordide est malheureusement universelle. En tout temps et en tous lieux, la tentation est grande d'attribuer plus ou moins de valeur à telle ou telle catégorie d'êtres humains. Les exemples, hélas, ne manquent pas.
Merci à Élise Fontenaille de nous rappeler avec force les dérives que ce jugement peut entraîner.
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Des prostituées de downtown eastside à Vancouver disparaissent. Un homme créé un site internet pour recueillir des informations. Mais ces femmes sont bien peu de choses, les hommes vont les chercher dans un but utilitaire et les remettent dans leur quartier, elles s'achètent leurs doses avec les fruits de leur labeur sordide. Mais tant qu'on ne les voit pas, c'est là qu'on vit le mieux. Alors pourquoi s'en soucier s'il y en a quelques unes en moins ?
Puis la liste s'allonge, et s'allonge encore...

Cela pourrait ressembler à un scénario typique d'une série policière, et pourtant... c'est bien sur un fait divers qu'est basé cette histoire. L'auteure s'est aussi fortement inspiré des mémoires de la soeur d'une des disparues, Sarah de Vries.

Avec une énorme distance, de manière très factuelle, Elise de Fontenaille nous captive avec ce récit en apparence très froid, cru. Elle n'y ajoute pas d'émotion, mais y en avait-il vraiment besoin ? Il mesemble que les faits se suffisent à eux-mêmes pour créer l'effroi et l'indignation chez le lecteur.
Le Canada a tout de suite des airs moins politiquement corrects, moins bienveillants qu'à l'ordinaire. Et que dire de ces affaires où des Amérindiennes disparaissent et personne ne s'en émeut tant qu'une Blanche ne s'ajoute pas à ces tristes listes ?

Là non plus je ne m'étalerait pas, cette dernière phrase sera pour saluer l'auteure d'avoir graver cette affaire dans un livre pour qu'elle ne passe pas aux oubliettes avec tous les autres faits divers.


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Le roman d'Elise Fontenaille est un bel hommage aux soixante-neuf disparues de Vancouver. Presque toutes appartenaient à la communauté indienne, la police mit donc longtemps, très longtemps à s'en préoccuper.
Ce livre extrêmement sombre révèle des pans du passé canadien peu glorieux, notamment la création d'institutions pour enfants indiens tenues par des religieux sous la tutelle de l'Etat. Elles perdurèrent jusqu'en 1970 avec un taux de mortalité de 50 % : le programme avoué en était le suivant : "kill the indian in the child."
Puis survinrent ces disparitions de femmes dans le Downtown Eastside. Ces charniers découverts.
C'est une abominable histoire de développement urbain sauvage sous la mainmise des Hell Angels : les vieux croûtons en Harley Davidson ont laissé la place à une génération de jeunes hommes hyperconnectés en costumes Hermani. Mais il s'agit toujours de la même lèpre criminelle.
Le photographe Lincoln Clarkes fit d'innombrables photos des abandonnées, publiées dans un livre intitulé "Héroïnes". L'artiste Pamela Mazik de son côté a entrepris de peindre les portraits des victimes afin de leur ôter le masque de la mort et faire en sorte qu'on ne les oublie pas.
Depuis la condamnation survenue en 2007 dans l'affaire des disparues de Vancouver, des "autochtones" de sexe féminin continuent à être assassinées le long de la tristement célèbre "autoroute des larmes". Plusieurs tueurs en série ont été arrêtés. La relève n'en finit pas d'être assurée.
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Tout commence autour d'une plaque commémorative dédiée à la mémoire de onze femmes où sont rassemblées "une centaine de femmes, la plupart indiennes" et "quelques hommes". le lecteur apprend que ces onze femmes ne sont pas mortes, du moins pas officiellement. "Elles ont juste disparu". Chacune leur tour, en se passant le talking stick, les personnes rassemblées là évoquent ces disparues : toutes ont en commun d'être des filles du Downtown Eastside, "le pire quartier de Vancouver", "le paradis des pédophiles" où s'entassent et survivent les junkies, très majoritairement indiennes, qui se livrent à la prositution pour se payer leur dose. Leur mystérieuse disparition a été signalée à la police. Mais celle-ci rechigne à mener une enquête. Alors, pour tenter de faire bouger les choses, Wayne Leng, l'amour de Sarah, une de ces disparues, a monté un site Internet qui leur est dédié : MISSING. "C'est devenu sa vie, il y travaille jour et nuit". Il est aidé par d'autres comme le georaphic profiler Kim Rossmo qui déclare ouvertement avant de quitter le pays que "si les Disparues avaient vécu dans les bons quartiers de Vancouver, si elles avaient été des femmes blanches convenables, la police ne serait pas restée aussi longtemps sans réagir, on aurait déjà arrêté le meurtrier".

Wayne se transforme donc en enquêteur pour savoir ce qu'est devenue Sarah, sa "métisse de Black et d'Indienne", adoptée par une famille blanche libérale, qui aurait eu tout pour être heureuse si elle n'avait pas été victime du racisme et du rejet dès l'école. le récit prend une allure de thriller effroyable qui n'est pas sans rappeler les meurtres de Jack l'Eventreur (qui s'attaquaient à des prostituées). Les coups de fils anonymes à Wayne annonçant la mort de Sarah se multiplient. le nombre de disparues ne fait qu'augmenter, la peur gagne aussi les quartiers "blancs", la mairie de Vancouver jette quelques dollars pour tenter de calmer le jeu. Jusqu'au soir où Wayne reçoit l'appel téléphonique d'un homme l'informant d'une drôle de découverte dans un mobile home : des sacs tâchés de sang avec des cartes d'identité. Mais il faudra encore 2 ans et 69 victimes avant que la police ne mette son nez dans les affaires d'un fermier de Coquitlam et découvre son congélateur avec "six têtes de femmes et deux pieds aux ongles laqués sous chaque tête". le lecteur pense alors être arrivé au bout de l'horreur une fois le meurtrier arrêté. Mais non! Les Indiennes continuent de disparaître dans l'indifférence générale alors qu'il suffira d'un seul meurtre de femme blanche, la soeur d'un adjoint au maire de Vancouver, pour qu'on trouve la mise en garde suivante: "Ne courez pas seule dans les parcs de la ville de Vancouver, faites-vous accompagner." Alors que 69 femmes indiennes, et sans doute davantage, ont été assassinées de manière barbare, transformées en viande hâchée et mangées. "Une scène du crime comparable à un charnier du Kosovo après purification ethnique, à Ground Zero...". Ou encore qu'une seule femme blanche soit assassinée sur l'Autoroute des Larmes pour que les medias se déchaînent, alors que 29 Indiennes y avaient péri ou disparu.

Dans ce récit tiré d'un fait divers réel, Elise Fontenaille dénonce sans détour les conséquences du laxisme des autorités canadiennes vis-à-vis des filles du Downtown Eastside et l'indifférence générale des "autres" citoyens canadiens : le génocide des Indiens par le meurtre de femmes. Pour elle, l'affaire Pickton n'est que la partie émergée d'un iceberg sanglant. Une affaire qui a ébranlé tout le Canada mais ne le rend pas moins coupable, une souillure honteuse . On ne tue pas 69 Indiennes parce que le climat est humide...
Un récit-choc, au style fluide et simple, très documenté, sur les conditions sociales des Indiennes. Un livre dérangeant, qui donne la parole aux victimes, aux rescapées, aux amis et à leurs parents et qui sensibilise le lecteur à une réalité méconnue, à travers une affaire dont on a peu entendu parler en Europe, sauf erreur de notre part. Un livre dédié à la mémoire de Claude Levi-Strauss - et à toutes les Indiennes disparues - qui n'est évidemment pas un hasard. Un bel hommage à ces femmes que l'on n'entend pas.
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Remuant. Poignant. Dérangeant.

Dans ce roman tiré d'un horrible fait divers, l'auteure revient sur l'Affaire des Disparues de Vancouver. Je ne connaissais pas cette tragédie avant ma lecture, mais à présent je ne pourrai plus l'oublier.

Dans les bas-quartiers de Vancouver, au coeur d'un trafic de drogue et de prostitution, des prostituées disparaissent, semaine après semaine, mois après mois, année après année. le profil de ces prostituées ? Des pauvres ou des indiennes, droguées, junkies. Mais qui se soucie de leur sort ? Personne ne bouge. Jusqu'à ce que Sarah disparaisse. Qu'a-t-elle de particulier ? A priori, rien, elle est « mi-indienne, mi-négresse ». Mais Wayne Leng, un « micheton », en est tombé amoureux. Fou d'inquiétude de par la disparition de sa bien-aimée, il va remuer ciel et terre, c'est le cas de le dire, pour qu'enfin on prenne l'affaire au sérieux. Sa quête durera des années. Jusqu'à ce que… le sordide, l'innommable, l'inconcevable soit découvert…Et malheureusement ce n'est pas une fiction… 69 prostituées ont subi ce sort. Avant cette affaire, des prostituées disparaissaient déjà. Et depuis, ça continue…

Outre le désintérêt que ces filles inspirent, l'auteure pointe du doigt une triste réalité dans l'histoire du peuple indien, le racisme et la xénophobie dont les indiens sont victimes depuis deux siècles au Canada. Une allusion à l'affaire des « residential schools » est faite : pendant plus d'un siècle, ces pensionnats canadiens avaient pour mission officielle de scolariser les enfants autochtones indiens, qu'ils séparaient volontairement de leur famille… officieusement, le mot d'ordre en était : « kill the indian in the child »… Un lavage de cerveau en force. Mais combien d'enfants ont péri, obstinés qu'ils étaient à vouloir garder leur culture et leur langue ! Elise Fontenaille en a d'ailleurs fait un roman du même nom : « Kill the Indian in the child ». Je ne sors pas indemne des « Disparues de Vancouver », alors je ne suis pas sûre de lire celui-là.

Un sentiment de colère et de révolte s'empare de moi au moment où je referme ce livre : pourquoi faut-il qu'une race se considère supérieure à une autre ? Quelles abominations ont été commises au nom du racisme ! Comment voulez-vous que la paix s'instaure avec un tel état d'esprit de domination ? Une impression d'Histoire qui se répète encore et toujours…

Il y a des passages crus dans le roman, ils sont le reflet de la réalité. Et puis, il y a cette phrase, sur laquelle je terminerai, elle laisse de quoi méditer :
« Entendu un soir dans un bar : « Un quart des Canadiens ont du sang indien dans les veines, les trois quarts restants ont du sang indien sur les mains » »…
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Citations et extraits (27) Voir plus Ajouter une citation
A Montréal, un groupe de femmes-artistes a peint une fresque sur un mur, dans une rue où les femmes tapinent. Elles les montre toutes ensemble, rassemblées, en marche.
Le drame des Disparues a ébranlé le pays tout entier...
Une onde de choc du Pacifique à l'Atlantique, jusqu'à la pointe de Gaspé : Honte au Canada.
Entendu un soir dans un bar : "Un quart des Canadiens ont du sang indien dans les veines, les trois quarts restants ont du sang indien sur les mains." (...)
Quand on parle de l'Affaire ici, la gêne est palpable. D'habitude les faits divers les plus sordides excitent les bavardages...
Celui-là, on évite d'en parler.
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Sur le terrain, les fouilles sont longues, interminables, 300 000 échantillons prélevés, les restes de dizaines de femmes… Selon le chef des médecins-légistes embauchés, c’est une scène de crime comparable à un charnier du Kosovo après purification ethnique, à Ground zero… On n’est pas près d’identifier toutes les femmes charcutées ici… On n’est pas près d’en voir la fin, de ce charnier.
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[...] Rossmo ne mâche pas ses mots : si les Disparues avaient vécu dans les bons quartiers de Vancouver, si elles avaient été des femmes blanches convenables, la police ne serait pas restée si longtemps sans réagir, on aurait déjà arrêté le meurtrier.
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(…) Ca fait un bout de temps que je vis par ici. Plus longtemps que vous ne pensez. Je sais ce que c’est que la haine. Je hais tellement, et si fort, que ça consume mon âme. Jusqu’aux cendres. Je m’endors avec ma haine, elle est ma compagne, ma passion, elle sera une perte aussi. Elle est en moi au plus profond, elle veut que je la laisse sortir, mais je ne peux pas, j ne serais rien sans elle…
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Crab Park : une simple bande de gazon donnant sur le port industriel. Ici viennent les marins, les dockers… et aussi les filles de Skid Row, quand elles veulent se laver l’âme entre deux passes, en regardant l’océan, oubliant un instant le downtown eastside ; l’œil errant sur le gris ondoyant des vagues… Le Pacifique lave de tout, même des souillures de Skid Row.
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Vidéo de Elise Fontenaille
Calypso, 14 ans, a lu l'histoire de Dorothy Counts - Affronter la haine raciale de Elise Fontenaille, chez Oskar éditeur. #speedbook #jebouquine #lectureado #romanado #Books ------------------------------------------ Abonnez-vous à notre chaîne Youtube : https://tinyurl.com/ya2scuvg
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