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EAN : 9782221064900
405 pages
Robert Laffont (01/01/1984)
3.75/5   30 notes
Résumé :
"Le Dniestr avec son cours tumultueux et tourmenté me fait penser au cours de ma vie." Ainsi commencent les souvenirs de Marie Gagarine, semés de tourbillons et de remous comme l'histoire russe de ce début de siècle.
Issue d'une lignée d'aristocrates, elle connaît d'abord une enfance sereine sur les terres familiales. Viennent la Révolution puis la guerre avec sa cohorte de désastres, sa valse d'envahisseurs...
Eprise de liberté, Marie fuit l'esclavage... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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« Elle est ma mère. Toute mon enfance a été bercée par des histoires de Russie, lointaines et merveilleuses. Puis quand est venue le temps des séparations entre les mères et les filles, quand je me suis mariée, quand je suis allée vivre ailleurs, à l'étranger, nous avons senti ensemble qu'il nous fallait « un pont », une ligne de retrouvailles : le fil de nos origines, de notre identité, qu'elle seule après tous les deuils familiaux, pouvait désormais nous transmettre. Je l'ai priée d'écrire ses souvenirs et elle m'a promis de le faire. Macha Méril ».

Ce livre possède une âme, celle de Marie Gagarine. Elle infuse tout le récit. Son écriture est des plus agréables, élégante, précise, réaliste, fluide, naturelle. Je n'ai pu résister au charme de son écriture. Il est évident que rien ne peut rivaliser avec un témoignage d'une telle honnêteté et qui atteste d'un vécu bouleversé par les tourbillons de l'Histoire. C'est un livre qui m'a passionnée, de très belles photographies insérées dans le livre accentuent l'intimité avec Marie. J'ai refermé ce livre à regret mais il y a une suite, « le thé chez la comtesse » où l'auteure détaille la dureté du quotidien des russes blancs en exil à Paris.

Vassilki qui veut dire bleuets en russe, est encore un gros bourg de campagne en Podolie Ukrainienne au début du XXème siècle. La famille aristocratique des Belsky y possède leur château. La terre noire y est riche et fertile, les forêts s'étalent sur les versants d'un énorme ravin et une chaine de coteaux arides et tourmentés s'étagent au-dessus de la rivière Ouchitza, à dix km du Dniestr.

C'est dans cette vaste demeure sans aucun confort que Marie Belsky nous invite à partager ses souvenirs d'une enfance très heureuse dans cette campagne russo-ukrainienne. de son écriture se dégage toute cette sérénité qui pouvait régner à Vassilki entre un papa passionné d'horticulture, de menuiserie et de bricolage, aimant la campagne et une maman indifférente à ses toilettes, aimant après Dieu, son mari et ses enfants, appréciant le calme de la campagne, pianiste et passionnée de musique.

On s'éclaire à la lampe à pétrole qui parfois se met à fumer (à filer), pas d'eau courante, c'est encore une jument borgne sous la modeste autorité de Nikita qui apporte les seaux d'eau, aucune commodité surtout en hiver où il faut se laver dans une eau remplie de glaçons jusqu'à la construction d'un bain turc, et c'est sans parler du chauffage, il faisait six degrés dans les pièces. Et pourtant que du bonheur, aucune conscience du manque! Les parents avaient veillé à l'espace, la vue, le parc remarquable, des domestiques mais le confort était des plus spartiates.

Je ne connais aucunement les rites de la religion chrétienne orthodoxe. C'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai découvert les préparatifs de Noël comme de Pâques et toute l'effervescence que ces fêtes engendraient dans tout le village. Les relations avec les paysans étaient sereines et tout le monde pouvait participer à toute cette organisation.

Malheureusement, les évènements dramatiques, malgré la distance qui sépare Vassilki de Moscou et qui les préservait jusqu'à présent, vont parvenir jusqu'à eux. Après avoir apprécié les souvenirs heureux de Marie, cette dernière va nous plonger dans les désastres successifs qui vont toucher le domaine de Vassilki et alimenter les antagonistes dans cette région où cohabitent plusieurs cultures. La guerre de 1914/1918, l'abdication du Tsar, la Révolution de 1917, l'arrivée des bolchevicks, la création de la Tcheka et le défilé des envahisseurs. Son écriture fidèle et réaliste va nous permettre de vivre les évènements de l'intérieur et de bien cerner la fin des deux Empires, l'Austro-Hongrois et le Russe.

Les pogroms sous la férule de Petlioura, les tentatives et les échecs pour une Ukraine indépendante, les désaccords entre Kerensky et Lénine, la naissance de l'Union soviétique, la terreur des paysans, tous ces évènements sont relatés par Marie Gagarine avec beaucoup de clarté, sans chercher à forcer sur le tragique de l'histoire, ce qui permet d'avoir une vision très précise de l'Histoire de l'Ukraine.

Poussée par un commissaire politique amoureux de Marie qui la contraint de le suivre dans son délire politicien, elle a dix sept ans lorsqu'elle décide, au risque de sa vie, de fuir son pays. Tout au long du récit, on sent cette jeune fille décidée, d'un caractère affirmée, d'un courage qui malgré les épreuves, ne faiblit que rarement. Assoiffée d'indépendance, n'ayant pas sa langue dans sa poche, le désir de vivre chevillé au corps, elle est prête à affronter toutes les épreuves pour gagner sa Liberté. Elle ira jusqu'à connaître l'obscurité terrifiante de la prison militaire.

Le témoignage de Marie nous permet de mesurer à quel point certains peuples, certaines régions du globe, sont malmenés par les tumultes de l'Histoire, cela donne le vertige ! C'est le cas de l'Ukraine maintes fois à la merci du désir de conquête de ses voisins.

J'ai tenté de lire « La Garde blanche » de Boulgakov, sans grand enthousiasme. J'ai pu mesurer mon ignorance, il faut une bonne connaissance de l'histoire de l'Ukraine pour aborder cette Garde Blanche qui m'est apparue assez complexe pour une néophyte. Il me manquait un nombre important de paramètres pour me glisser dans cette histoire. Faire la part des choses entre la Révolution, la première guerre mondiale, la fin de l'empire russe et de l'austro-hongrois, un vrai labyrinthe.

Un grand merci à @Krzysvanco pour son retour sur ce livre qui m'a permis un excellent moment de lecture dépaysant et enrichissant.

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Blonds étaient les blés d'Ukraine nous plonge dans la jeunesse de Marie Belsky (Мария Всеволодова Бельская qui épousera plus tard son cousin, le prince Wladimir Gagarine), le livre nous décrit la vie d'une famille noble en Ukraine, famille riche aux grandes propriétés et dotée de nombreux domestiques mais vivant sans le moindre confort. L'autrice nous décrit une région, la Podolie, où tous sont réputés Russes mais en fait se sentent plutôt Ukrainiens, Juifs, ou Polonais.
le regard qu'elle porte sur leur train de vie et sur cette région est intéressant.
Bientôt toutefois se déclenche la guerre puis la révolution bolchévique et le sort de la famille et de l'Ukraine se détériore: irruption de troupes de tous les camps : Bolcheviques, nationalistes ukrainiens de Simon Petlioura, ukrainiens anarchistes de Nestor Makhno , Polonais, Russes blancs avec son lot de confiscations, emprisonnements et terreur.
Marie Gagarine, sa famille, l'Ukraine traverseront de nombreuses épreuves, l'autrice excelle à nous les conter, et se révèle une femme impulsive, souvent drôle et courageuse.
Un récit qui nous éclaire sur ces régions aux frontières fluctuantes, et qui nous permet de constater, une fois de plus, que l'antagonisme des Ukrainiens vis-à-via des Russes date d'il y a longtemps. Il y eût Mazeppa sous Pierre-le-Grand, il y a ici aussi des velléités d'indépendance.

Le livre est précédé d'une belle préface de l'actrice Macha Méril, fille de Marie Gagarine, qui lui rend un vibrant hommage.
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La princesse Gagarine est née dans une famille des aristocrates russes qui possédaient une propriété en Podolie dans l'Ukraine. Écrit en français en France à une époque où la cotte du communisme était à son sommet, « Blonds étaient les blés d'Ukraine » décrit sa vie à la veille de la révolution russe et son parcours pendant les années de guerre civile. Même si son message était inacceptable chez les intellectuels français lors de sa parution, le livre est lucide et éloquent. La version des faits présentée par la Princesse s'accorde assez bien avec celle que l'on trouve chez les historiens anglophones de nos jours tels que Orlando Figes ou Robert Service. C'est le temps de traduire « Blonds étaient les blés d'Ukraine » en Anglaisé. L'accueil sera fort probablement meilleur que c'était le cas en France il y plus que trente ans.
Les Gagarines étaient très riches mais manquaient de confort parce que les rites de leur classe emportaient sur le bon sens.
« On eût dit qu'on avait oublié le confort. … Certes, il faut se placer dans la Russie de l'époque. En ce temps-là, on croyait que les vastes dimensions d'une résidence et une légion de domestiques étaient indispensables, tandis que l'eau courante, l'électricité et un bon système de chauffage ne l'étaient pas. Nous n'avions rien de commodités, et ne savions même pas à quel point elles nous manquaient. » (pp. 19-20)
« le château s'éclairait par lampes de pétrole dont s'occupait une femme de chambre préposée à ce service. … Comme il n‘y avait de de canalisation, l'eau nous arrivait dans des seaux. » (p, 20)
La gestion de leurs domaines laissait beaucoup à désirer. le père qui avait fait des études universitaires pensait à faire l'essai des engrais chimiques cédait facilement devant le refus de son gérant. le mieux que l'on pouvait dire sur les Gagarines comme gestionnaires était qu'il y avait des gens qui faisaient moins bien qu'eux.
« Cette propriété que l'on qualifiait de mine d'or, tellement ses terres étaient riches et fertiles, ne donnait pas de récoltes particulièrement brillantes et le bétail était assez médiocre. C'était pour moins étrange qu'avec trente vaches laitières dans les étables à certaines périodes de l'année, il fallait acheter le beurre, chez Mme Régoulsky, … » (p. 47)
« le fait indiscutable qu'il existait des propriétés où c'était pire prouvait que chez nous tout allait encore assez bien. » (p. 48)
Un des points forts du livre est l'analyse des groupes ethniques et sociales en Ukraine. Les villageois étaient juifs. Les paysannes étaient des Ukrainiens qui parlaient « une langue de Hohols » (p. 170). La noblesse était composée d'un « mélange d'Ukrainiens, de Polonais russifiés et de Russes implantées en Ukraine. … Officiellement tout le monde était russe, et en réalité personne ne l'était vraiment. » (pp. 84-85)
Âgée de seulement dix ans quand la première grande guerre s'est déclarée, la princesse n'a pas compris « la gravité de l'événement » (p. 122). Elle pense plutôt à ses études : « j'avais un autre sujet d'angoisse : l'examen imminent qui m'empêchait de fermer l'oeil. » (p. 132) La vie continuait comme avant pour trois ans encore. La chute de la dynastie Roman en 1917 amènera le chaos. En moins de trois ans, elle verra dans sa province des contingents militaires de l'Allemagne, de la France, et de la Pologne ainsi que plusieurs groupes armés de divers mouvements indépendantistes ukrainiens. Les Polonais étaient les seules qui ne pillaient pas et qui ne tuaient pas à gauche et à droite.
Un polonais essaie de rallier le père de l'auteur au régime polonais « Vous m'accorderez que c'est le grand bien de la Podolie (la région où se situe la propriété de la famille de l'auteur) de faire partie de la Pologne. Vous n'allez pas me dire que vous préfériez la voir partager le sort de la Russie. Quant à l'Ukraine … entre Pétlioura, dictateur en puissance, Boudienny qui veut l'offrir à Moscou, Zéliony, qui n'est qu'un chef d'une bande de brigands, et Makhno un aventurier, auquel, souhaitez-vous la victoire, » (p. 219) le père est entièrement d'accord avec tout ce que le polonais mais il ne s'engage pas parce qu'il comprend que les Polonais se feront vite chasser de la Podolie.
Chaque armée qui passe par la propriété des Gagarines en Podolie se sert de leur château comme quartier général. Inévitablement c'est le tour de l'Armée Rouge de prendre possession du domaine Gagarine. le commissaire politique tombe amoureux de la princesse. Il lui demande de l'épouser en la menaçant de mort. « Je vous trouve assez amusante : vous savez que je puis vous fusiller et vous me narguez. » (p. 253) Quelque temps après, le commissaire va menacer la mère de la mort quand elle dit que Dieu existe. Alors, la princesse décide de fuir en Roumanie où sa famille possède une propriété dans une région que la Roumanie avait saisi pendant la guerre civile en Russe.
Cependant la démarche comporte des risques très graves. le premier problème est que sans passeport la princesse doit entrer illégalement en Roumanie. le deuxième problème est qu'elle n'a pas droit de résider en Roumaine parce qu'elle vivait en Russie au moment où la Roumanie a saisi le territoire. Avec l'aide d'un contrebandier elle traverse la frontière Roumaine et se présente chez une vieille amie de ses parents qui prétend être en mesure d'intervenir en sa faveur auprès des autorités roumaines.
L'aide promise ne vaut rien. La princesse se fait incarcérer. La description de ses quatre journées d'internement, qui semble être plus long que celui de Soljénitsyne dans son goulag. est superbe. Elle nous donne des images des gens au désespoir et des conditions de vie horrifiantes absolument remarquables. Après des heures interminables de détention, elle se révolte. Devant un groupe de prisonniers bouche bée, elle demande des cigarettes au directeur du prison. Il lui donne vite un paquet de cigarettes et pour un pot-de-vin raisonnable négocié par son avocat juif un permis qui lui accorder le droit de vivre en Roumanie où elle complètera ses études universitaires avant de s'en aller pour la France.
« Blonds étaient les blés d'Ukraine » est un petit chef-d'oeuvre où l'auteur décrit la ville de l'aristocratie russe en province aussi bien que Tolstoï et les horreurs de la guerre civile en Ukraine avec un intelligence qui rivalise celle de Boulgakov.
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Comment ne pas être attiré par ce joli titre, "Blonds étaient les blés d'Ukraine", au moment où le malheur s'abat à nouveau sur ce territoire? Nous découvrons la vie de Marie Gagarine: son enfance et son adolescence dorées au tout début du XX° siècle, dans les châteaux de sa famille unie et fortunée, ses premières années de lycée. Ceci, jusqu'aux drames: la révolution de 1917, et ses "rouges" qui s'abattaient avec une extrême violence sur les familles aisées, considérées comme la cause des malheurs du peuple. Et le dépeçage de ces pays, à la fin de la première guerre mondiale. Nous finissons par ne plus savoir où nous sommes, car les frontières bougent: en Russie, en Pologne, en Autriche, en Roumanie, ou ... en Ukraine? Ni quelle langue parlent ces gens: des dialectes locaux de Podolie ou de Bessarabie, le russe, le polonais?
Marie Gagarine nous décrit avec un infinie délicatesse ce qui a été son sort, et celui de sa famille, divisée, en fuite, dépossédée de tout. La violence des troupes de Lénine, sans foi ni loi. L'absence de nouvelles des siens. Des arrestations arbitraires, la confiscation de ses effets nécessaires au quotidien, parfois la prison, les menaces, les policiers et les militaires corrompus, la crainte permanente d'être torturée ou exécutée... Nous mesurons combien ce pays a connu, dans le tournant des année 1920, un grand malheur.
Comme ce pays semblait beau, son fleuve, ses vallées, ses villes somptueuses, ses châteaux, ses universités, et ses champs de blé...
Ce récit magnifique été écrit, dans les années 1980, avec une grande finesse, par cette femme alors âgée. Elle s'était réfugiée d'abord en Roumanie, et continuera finalement sa vie en France, aura trois filles, - dont la comédienne Macha Méril -.
Elle nous éclaire sur ce qu'était et ce qu'aurait dû rester l'Ukraine. Hélàs, une nouvelle fois, - nous sommes en 2022 - le malheur vient de s'abattre sur ce paradis.
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Javais négligé de le faire , mais je modifie mon commentaire sur ce livre que j'ai tellement apprécié. Un passage m'est revenu en mémoire l'an dernier à l'occasion de l'invasion de l'Ukraine.
Lors d'un de ces mémorables déplacements familiaux qu'elle décrit avec beaucoup d'humour, elle détaille la population habitant l'Ukraine et, particulièrement, celle qui vit en Podolie. Tout y passe, de l'instituteur (dont on suppose qu'il est un chouïa révolutionnaire) aux fonctionnaires Russes (dont on se méfie car Russes) aux vieux croyants, en passant par la noblesse d'origine Polonaise (catholique) et bien entendu la communauté juive. D'autres passages traitent également de ce sentiment d'être Ukrainien. le livre est paru en 1986 ou 1989, je ne suis plus certaine, mais comme beaucoup de gens, je n'aurai pas imaginé qu'il soit toujours d'une aussi brulante actualité. Il est un instantané à un siècle de distance de ce que fut cette région de l'Europe de l'Est. Cela devrait inviter à la réflexion sur nombre de sujets et notamment celui de l'Histoire qui se répète, jamais exactement de la même façon, mais ....

Une lecture qui date, mais un souvenir de la description des carêmes Russes assez rigolote. L'envie de connaître cette Europe de l'Est, Khotine, Czernowitz, Kamenetz-Podolsk... tous ces endroits dont parle l'auteur et qui ont subit L Histoire et les bouleversements politiques au fil des deux guerres. A lire pour la fraîcheur qui se dégage du livre, pour l'énergie de cette jeune-fille si attachante, devenue française après bien des tribulations. A lire enfin, pour partir à la découverte de la Russie d'avant l'URSS.
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
En juin, le sort d'Odessa était réglé, du moins pour un temps car les bolcheviks prirent la ville tout entière. Le port vidé de ses bateaux était à présent immobile et silencieux. On ne pouvait plus quitter Odessa sans laissez-passer.
La Tchéka - "Commission extraordinaire" dont le nom restera dans l'Histoire le symbole de l'épouvante - ouvrit ses portes. Perquisitions, arrestations, exécutions, telles les plaies d'Egypte, s'abattirent sur Odessa. Des individus armés se réclamant de la nouvelle milice rouge faisaient irruption dans les demeures de jour et de nuit, fouillaient les appartements, dévalisaient les familles terrorisées, tuaient sans se gêner qui bon leur semblait . Les gens passaient les nuits prêtant l'oreille, tremblant à chaque bruit dans l'escalier ou sous les fenêtres. Chacun s'ingéniait à inventer des cachettes pour sauver son dernier argent, ses bijoux ou des objets de valeur. On brûlait les documents, on se méfiait de ses voisins.
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"Institution des demoiselles nobles de Kiev "

Que le front soit effondré et l'armée russe transformée en une bande de fuyards, qu'un désordre catastrophique se soit emparé du gouvernement, nous ne pouvions l'ignorer, mais sans nous rendre compte que le pays roulait vers l'abîme. C'est pourquoi l'abdication de l'empereur nous produisit l'effet d'une bombe.
Melle Tokarjévich nous l'annonça d'une voix solennelle , ferme et métallique et lut le manifeste de l'abdication sans ajouter le moindre commentaire ni exprimer ses propres sentiments.
Notre première réaction fut celle du désarroi. Puis, à mesure que passait le temps, un remous se produisit dans les esprits. Des tendances commencèrent à se former. Des divergences d'opinion et d'âpres discussions se mirent à éclater allant jusqu'aux querelles. Pour la première fois entre ces murs, on sentit l'influence des différences sociales.
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Le Dniestr

Il taille des provinces, dessine des frontières ; au cours des siècles passés, il a été témoin de bouleversements, de guerres d'invasion et de changements de pouvoir. Il a été polonais, russe, autrichien, ukrainien, turc, roumain. Barrière naturelle, limite politique, trait de partage entre pays rivaux, il a été tour à tour disputé, dominé, convoité.
Le Dniestr, à un moment crucial de ma vie, sépara pour moi deux mondes et trancha comme une lame toutes les attaches du passé.
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Pâques orthodoxe


Attablés sagement dans un coin de la salle à manger, nous peignions les œufs. Nous inventions toute sorte de combinaisons de couleurs et de motifs rivalisant d'idées.
Mais quel qu'ait pu être notre zèle, nos œufs restaient de loin inférieurs à ceux de nos paysannes qui possédaient un art consommé en la matière. Leurs dessins tracés à la cire étaient inspirés de l'antique art byzantin admirablement conservé dans les villages. Les couleurs étaient sombres et le jaune ressemblait à de l'or.
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Tels les nomades des temps passés, les nouveaux nomades de notre siècle ont repris leur migration vers l'Ouest. Fuyant la mort et l'esclavage, ils cherchent la liberté comme autrefois leurs ancêtres. La Liberté est devenue l'emblème du bonheur, plus précieuse que tous les biens terrestres, plus chère qu'une patrie.

FIN
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