Georges Courteline (1858-1929) est un de nos humoristes les plus connus (un des plus grands, sans doute, avec
Alphonse Allais et
Jules Renard pour ne pas quitter la Belle Epoque). Ses pièces de
théâtre, ses romans, ses recueils de contes et de nouvelles ont pendant des dizaines d'années diverti ses lecteurs jamais rassasiés.
Courteline , comme Renard, du reste, pouvait être apparenté à l'école naturaliste : même souci du détail, même description chirurgicale d'une société donnée : l'armée (Les Gaietés de l'escadron), la bureaucratie (
Messieurs les ronds-de-cuir) la justice (
Un client sérieux,
L'Article 330), l'autorité (
Le Commissaire est bon enfant, le Gendarme est sans pitié) et surtout la petite bourgeoisie (la plupart de ses pièces de
théâtre, avec un thème récurrent, les difficultés de la vie de couple :
La paix chez soi, Les Boulingrin, etc.) Son esprit satirique fait merveille dans ses petites saynètes - dont certaines désopilantes - et dans ses contes dont la drôlerie ne masque pas une critique virulente envers la société de son temps. Et malgré ce ton souvent cynique et mordant,
Courteline nous gratifie parfois de beaux moments poétiques, ou nostalgiques (
Les Linottes)
Ah! Jeunesse ! est un recueil de 1894, alternant 14 petites pièces et courts récits qui méritent le détour. L'ensemble restitue de façon très probante l'univers de l'auteur, ses sources d'inspiration et sa technique terriblement efficace.
Je vous conseille en particulier L'Ami des lois (où La Brige multiplie ses démêlés avec la bureaucratie et la justice), Lauriers coupés (ou un aspirant écrivain dénommé Hugues-Gontran-Ogier-Roboald Luberne-des-Hautes-Fûtaies tente d'écrire un article…), Au Temple (où le dénommé Tiracinq négocie le prix d'un pantalon), le Constipé récalcitrant (où un médecin s'arrache les cheveux devant le cas d'un brave paysan qui ne peut pas… vous m'avez compris !) Pour le moins je vous garantis le sourire, mais il est probable que certains de ces sketches vous feront rire aux éclats !
Ah ! Que n'avons-nous encore des
Georges Courteline, des
Alphonse Allais, des
Jules Renard et des
Tristan Bernard ! L'humour n'excluait pas toujours la férocité, mais il n'y avait ni trivialité, ni malveillance, seulement de l'ironie, et cet esprit typiquement français qui a peu à peu disparu chez nos amuseurs (exception faite de certains, comme
François Morel, par exemple)