Poèmes de guerre - A un aspirant tué
Une étoile noire a lui
Là où fut ton coeur.
Il y a fête aujourd'hui
Dans tes profondeurs.
Messagères du silence,
Qui venez, venez, venez,
Rendez-le à l'innocence
Maternelle où il est né.
Il dort, oh ! il dort
au milieu des combats
Dors, mon petit vivant, dors,
dors autant que tu pourras.
Ne te découvre pas.
Tu seras mort dans une heure.
Il ne faut pas prendre froid.
Dans le danger qu’on recherche par un acte de volonté, une merveilleuse exaltation de la vie lui venait, parce que là c’est proprement le jeu.
Quand il pointait sur le plan directeur une piste bien en vue, et la prenait de préférence aux autres ; quand, voyant un obus tomber à deux cents mètres, il pressait le pas vers son point de chute ; quand il musait avec intention dans un lieu battu par une mitrailleuse, il sentait quelque chose de pareil, peut-on croire, à ce que demandent à l’ivresse certains artistes, une accélération de pensée, un flux de mémoire, un épanouissement d’images, jusqu’à des éclairs de pénétration pour telles âmes qui lui étaient un peu nocturnes, jusqu’à des explosions de joie créatrice qui lui faisaient s’écrier : « J’aurai beaucoup d’enfants ! », une plénitude dont il prenait conscience les yeux baissés, avec un sourire des lèvres closes, comme s’il faisait quelque chose de mal. Et c’est vrai que cette sorte de courage vous a des apparences de péché. Elle n’est pas qu’une forme de la curiosité de la vie, comme le goût du sacrifice n’est qu’une forme de la prodigalité de la vie : elle est l’envahissement de tout l’être par la tentation d’un acte, l’abolissement de tout ce qui pourrait y faire obstacle, et l’héroïsme n’est plus alors de voler à l’appel du péril mais d’y résister. Puis toute cette joie était couverte de sang. La guerre existera toujours, parce qu’il y aura toujours des garçons de vingt ans pour la faire naître, à force d’amour.
Cette menace plus proche de la mort réveilla sa sensualité. « Encore une fois avant de mourir ! Encore une fois et j’accepte de mourir ! »
Comme un malade qui s'appuie sur ses bras, tente de se soulever, Alban de Bricoule se pencha hors du fauteuil de fer, aspira l'air à pleine bouche, physiquement suffoqué par son âme. Alors le monde communiqua de nouveau avec lui, toutes choses clémentes et courtoises et qui vivent dans un esprit de douceur. Il perçut l'odeur des roses diluée dans l'air humide, le frémissement minuscule de l'herbe, une branche de glycine translucide qui pendait comme une main divine [...]
Il se vit venir dans la glace, vit ses cheveux ébouriffés par le geste d'y plonger la main dans la méditation, son visage brun, les rides minuscules à ses paupières et dans le cerne un peu gonflé, quelque chose de brûlant et de consumé[...]
Alors une voix se leva, qui ne sortait pas tout à fait de lui, qui venait d'un autre, qui naissait en lui, mais qui n'était pas absolument ratifiée par lui :
"Cela m'est égal de mourir."
Sommes-nous de ceux qui ont besoin de feindre ? Non, rien ne sera changé parce que je vous aurai dit bien simplement que j'ai atteint un plus haut degré de moi-même à côté de vous. Et voici que vous partez, et j'ignore ce que je vais devenir à moi seule. [...]
Elle comprit le geste et s'assit avec lassitude ; l'art était bien comme la vie : il consolait quand on était heureux. Cependant, appuyant l'album sur le bord de la table, ils penchèrent leurs têtes qui ne se touchaient pas.
À l’heure où des millions d’êtres souffrent de la seule souffrance digne d’intérêt, celle du corps, il est bien que des êtres épargnés souffrent un peu dans leur âme, pour un mal irréel et illusoire qui n’existe que par l’opinion qu’ils s’en font.
Narcisse Slam a répondu au décalé et intimiste Questionnaire de Trousp, autant inspiré par celui de Proust que des questions de Bernard Pivot. Site Internet: https://trousp.ch/
0:00 Introduction
0:17 Que pensez-vous de cette citation? «C'est curieux un écrivain. C'est une contradiction et aussi un non-sens. Écrire c'est aussi ne pas parler. C'est se taire. C'est hurler sans bruit. C'est reposant un écrivain, souvent, ça écoute beaucoup.» Marguerite Duras
1:19 Quel métier n'auriez-vous pas aimé faire?
3:06 Quelle qualité préférez-vous chez l'Homme?
4:22 Quel est pour vous le pire des défauts?
5:38 Avec quel écrivain décédé, ressuscité pour une soirée, aimeriez-vous boire une bière au coin du feu?
8:33 Comment imaginez-vous les années 2050?
11:18 Quel mot vous évoque le plus de douceur?
12:48 Comment commence-t-on un roman? Par exemple L'Épouse?
16:23 Si vous pouviez résoudre un problème dans le monde, lequel choisiriez-vous?
20:18 Que pensez-vous de cette citation? «Les écrivains sont des monstres.» Henry de Montherlant
23:19 Quel livre emporteriez-vous sur une île déserte?
25:09 Si votre maison brûle, qu'aimeriez-vous sauver en premier?
28:36 Comment construit-on un personnage?
32:04 Remerciements
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