Mathilde, Anne et Camille partagent leur solitude sur un îlot sauvage, non loin des côtes canadiennes, au pied d'un phare dont le gardien reste invisible. Comment sont-elles arrivées là ? le mystère reste entier. Pas de policier ni de détective pour découvrir la vérité, mais j'avais bien l'impression d'être au coeur d'un polar !
Pourtant, les premières pages auraient dû m'éclairer, mais j'ai avancé dans ma lecture sans résoudre cette énigme. Je me suis laissée séduire par la Poésie de ces tableaux. Paysages rudes, mer mouvante aux mille nuances, rochers dangereux, ombres et lumières, ciels changeants, silence et chuchotis.
Beaux portraits de femmes, Camille, aveugle et lumineuse cependant qui malgré (ou à cause de) sa cécité parvient à voir les petits riens qui font la beauté et le sel de la vie. Anne, femme libérée qui n'a pas hésité à abandonner mari et enfant pour vivre sa passion avec un écrivain, marié. Mathilde la fière, Mathilde la rebelle, qui se joue des convenances, toujours montrée du doigt.
Le narrateur plante le décor, raconte la vie d'Anne et de Camille et régulièrement donne la parole à Mathilde qui évoque son enfance, sa jeunesse, ses errances, sa rivalité avec Anne, puisqu'elles aimaient le même homme.
Et la fin m'a surprise ! Alors, j'ai repris le livre pour relire les premières pages…
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Enfant, j’avais vite compris le pouvoir de mes colères avaient sur mon entourage, plus tard, l’effet des mots méchants ou blessants. Ils étaient une arme, la seule que je possédais et dont je constatais l’efficacité. En réalité, je ne savais pas comment me comporter ou m’exprimer.
Aurais-je vécu prisonnière et réussi à m'évader ? Mais pour aller où ? Dans ce lieu, il n'y a que le néant, le silence et le phare.
Anne m'attendait. Je me suis assise à côté d'elle.
- Vas-y, ai-je dit, raconte-moi la suite de ta belle histoire d'amour.
Je pense à moi. Ce ne sont pas des mots qui m'ont étouffée mais le silence des jours et des heures.
- Nous ne quitterons jamais cette île, avait seulement prononcé Mathilde.
Sèchement Anne avait rétorqué ;
- Camille et toi pouvez moisir ici pour l'éternité. Moi, je me sauverai.
- Comment feras-tu ?
- Avec son aide.
Du doigt la jeune femme avait désigné le phare qui surgissait derrière une masse rocheuse.
Le phare n'est pas habité.
Le rire d'Anne avait eu une intonation de défi.
- Vraiment ?
Combien d’êtres abandonne-t-on ainsi au cours d’une vie ? Pourquoi se remettait-on si bien de certaines disparitions comme si nombre de personnes ne laissaient parmi les survivants qu’un fugitif souvenir ? N’aimait-on que son propre désir ?
Extrait du livre audio "Les Exilés de Byzance" de Catherine Hermary-Vieille lu par Rafaèle Moutier. Parution CD et numérique le 6 juillet 2022.
https://www.audiolib.fr/livre/les-exiles-de-byzance-9791035407674/