Livre intéressant et courageux remettant bien des événements douloureux dans le contexte de l'époque à savoir la guerre d'Indochine en 1954 avec la défaite des troupes françaises à Dien-Bien-Phu. On découvrira des portraits poignants de soldats d'origines sociales diverses. Lire à ce sujet un autre ouvrage ayant le même cadre "Armistice". Mais cette histoire de balle de colt se révèle trop longue et un peu confuse. le lecteur moyen comme moi se perd avec tous ces personnages. L'auteur, par ailleurs, a tendance à se répéter. C'est dommage car le sujet est original en ce sens qu'il rappelle l'odieuse trahison d'un homme qui a, par la suite, échappé à toute poursuite en justice bien qu'il se soit comporté en criminel de guerre. le livre est plutôt bien écrit mais j'y décèle un peu le phrasé appliqué et bien particulier du professeur de français. J'en recommande la lecture tout en veillant de prendre des notes pour ne pas se perdre au milieu des multiples personnages.
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Livre intéressant et courageux remettant bien des événements douloureux dans le contexte de l'époque à savoir la guerre d'Indochine en 1954 avec la défaite des troupes françaises à Dien-Bien-Phu. On découvrira des portraits poignants de soldats d'origines sociales diverses. Lire à ce sujet un autre ouvrage ayant le même cadre "Armistice". Mais cette histoire de balle de colt se révèle trop longue et un peu confuse. Le lecteur moyen comme moi se perd avec tous ces personnages. L'auteur, par ailleurs, a tendance à se répéter. C'est dommage car le sujet est original en ce sens qu'il rappelle l'odieuse trahison d'un homme qui a, par la suite, échappé à toute poursuite en justice bien qu'il se soit comporté en criminel de guerre. Le livre est plutôt bien écrit mais j'y décèle un peu le phrasé appliqué et bien particulier du professeur de français. J'en recommande la lecture tout en veillant de prendre des notes pour ne pas se perdre au milieu des multiples personnages.
Je puis vous dire que moi, comme les autres, j'ai quitté l'Algérie la mort dans l'âme. Au sens propre, oui, d'une" âme morte": car nous y avons laissé cette part spirituelle, intime, sensible de nous même...Et parce que ce pays en trouvant sa liberté et son indépendance, s'est vu dépossédé de son âme.
"Le plus dur" répétait Kowalski... Et à chaque fois, comme une écharde supplémentaire dans la chair, il énonçait une horreur nouvelle. A l'entendre, à lire aussi, par la suite, les récits des anciens prisonniers, je me demande comment quelques-uns, physiquement, ont pu survivre. Je me demande aussi comment leurs bourreaux ont pu, eux, moralement, vivre avec ce qu'ils leur ont fait endurer. Boudarel a survécu, il a prospéré, sans remords ni pardon. Ame de bronze, que rien n'entame. Le camp 113 se trouve au nord du Tonkin, en limite de la frontière chinoise. La région, depuis la déroute de Cao Bang, est un sanctuaire viêt, où les Français n'ont plus accès. Le camp 113, à la différence d'autres camps, n'est pas proche d'un village : il est perdu dans la jungle. Perdu, comme le sont ceux qui le composent, des déchets humains.
Finalement, Kowalski, m'a peu parlé : l'allusif, l'évasif, l'implicite, ne sont pas dus aux brouillages de la mémoire, ou à l'indécision du verbe. Bruneau a encore moins parlé. Pourquoi ? Qui d'autre que la victime, pour dire l'horreur subie, et la violence exercée ? Mais je crois qu'on touche là à une fonction essentielle de la parole : se taire. Se taire n'est pas un verbe creux. Vouloir se taire, car les mots viennent de trop loin, de trop bas : si l'argent achète tout, la langue ne nomme pas tout. La langue est faite de la chair des hommes. Se taire, c'est assigner une frontière à l'inhumain. Et par un étonnant détour de la pudeur et de la générosité, c'est leurs bourreaux que Bruneau et Kowalski épargnent, par leur silence. Mieux : ils les sauvent.
Il a pris un bagage informe, qui hésite entre le sac postal et le sac de marin, et qui se ferme par un noeud indocile. Entre son harmonica et un ceinturon en toile vert maquis, il s'en est échappé son exemplaire des Pensées de Pascal. Je l'ai ouvert, à la page marquée d'un signet. Une phrase y était soulignée en vert. "On mourra seul."
Fulgurance de l'évidence. Et derrière la voix de Pascal, elle-même se faisant l'écho de la pensée de l'homme sans Dieu, j'entends celle de Kazan : pourquoi ces mots l'ont-ils retenu ? Qu'a-t-il glissé de lui dans le linéament vert qu'il a tracé ?
"On mourra seul." Dans ces mouroirs au centre de nulle part, Bruneau et ses compagnons ont dû le ressentir. Pas le penser, non : cela s'éprouve, cette misère, sans fond ni bord, de la solitude totale.
Ne pas mourir seul. A l'insistance du Mal, qui est Néant, il faut opposer l'exigence du lien. Laisser un signe. Pour "après". Il faut entrer dans la paix par le porche de la deuxième vertu.
Seul, oui, reprit-il, parce que l'expérience de ces camps si particuliers a été celle de la perte de l'amitié. (...)
La stratégie du Viêtminh est de détruire les liens. Tous les liens. Ni parole possible, ni confiance : l'autre, mon semblable, devenait mon traître. (...) Vous savez, je ne blâme pas ceux qui ont craqué. Ceux qui ont dénoncé leur ami pour une poignée de riz, ou pour une illusoire promesse de libération. Ceux qui, à force d'avoir entendu le matraquage idéologique, se sont réfugiés dans la fantasmagorie marxiste, pour avoir la paix, pour enfin dormir en paix, débarrassés de toute pensée, déchargés de la volonté de réfléchir par soi-même (...). Vous savez ce que je dessinais, du bout de mon bambou, dans la boue du camp ? (...)
Je dessinais des points d'interrogation. (...) C'était ma résistance muette : les points d'interrogation sur un tapis de boue. (...)
Là était ma victoire, je faisais naître des points d'interrogation par milliers, j'avais réussi à faire triompher Socrate et son ironie !
Maison de la poésie (4 juin 2019) - Texte et Lecture de Alban Lefranc, extrait du Dictionnaire des mots parfaits (dirigé par Belinda Cannone et Christian Doumet, éd. Thierry Marchaisse, parution mai 2019).
Le Dictionnaire des mots parfaits :
Pourquoi certains mots nous plaisent-ils tant ? S?adressant à notre sensibilité, à notre mémoire ou à notre intelligence du monde, ils nous semblent? parfaits.
Bien sûr, parfait, aucun mot ne l?est ? ou alors tous le sont. Pourtant, chacun de nous transporte un lexique intime, composé de quelques vocables particulièrement aimés.
Après ceux consacrés aux mots manquants et aux mots en trop, ce troisième dictionnaire iconoclaste invite une cinquantaine d?écrivains à partager leurs mots préférés.
Il vient parachever une grande aventure collective où la littérature d?aujourd?hui nous ouvre ses ateliers secrets.
Auteurs : Nathalie Azoulai, Dominique Barbéris, Marcel Bénabou, Jean-Marie Blas de Roblès, François Bordes, Lucile Bordes, Geneviève Brisac, Belinda Cannone, Béatrice Commengé, Pascal Commère, Seyhmus Dagtekin, Jacques Damade, François Debluë, Frédérique Deghelt, Jean-Michel Delacomptée, Jean-Philippe Domecq, Suzanne Doppelt, Max Dorra, Christian Doumet, Renaud Ego, Pierrette Fleutiaux, Hélène Frappat, Philippe Garnier, Simonetta Greggio, Jacques Jouet, Pierre Jourde, Cécile Ladjali, Marie-Hélène Lafon, Frank Lanot, Bertrand Leclair, Alban Lefranc, Sylvie Lemonnier, Arrigo Lessana, Alain Leygonie, Jean-Pierre Martin, Nicolas Mathieu, Jérôme Meizoz, Gilles Ortlieb, Véronique Ovaldé, Guillaume Poix, Didier Pourquery, Christophe Pradeau, Henri Raynal, Philippe Renonçay, Pascale Roze, Jean-Baptiste de Seynes, François Taillandier, Yoann Thommerel, Laurence Werner David, Julie Wolkenstein, Valérie Zenatti
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