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EAN : 9782755501407
108 pages
1001 Nuits (07/10/2009)
5/5   3 notes
Résumé :

Francis Bacon : On ne sait pourquoi certaines choses vous touchent. C'est vrai, j'adore les rouges, les bleus, les jaunes, les gras. Nous sommes de la viande, n'est-ce pas ? Quand je vais chez le boucher, je trouve toujours surprenant de ne pas être là, à la place des morceaux de viande. Et puis il y a un vers d'Eschyle qui hante mon esprit : " L'odeur du sang humain ne me quitte pas des yeux. "

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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La première fois que je me suis trouvée face à une peinture de Francis Bacon, je me souviens avoir été abasourdie, stupéfaite, estomaquée ! Je me serais crue dans une salle d'autopsie où l'on aurait mis un visage entier entre les deux lames d'un microscope.

C'est ce premier choc, d'où germera l'idée d'une rencontre avec l'artiste, qu'évoque Franck Maubert dans l'avant-propos. ( l'auteur est à l'époque journaliste d'art à l'Express).
Trois ans d'attente avant d'obtenir un premier rendez-vous. L'artiste n'est pas avide de notoriété.
Suit une belle description de l'appartement du peintre, illustrée de quelques clichés en noir et blanc offerts au fil des pages.
-«De ce logement précaire, Francis Bacon avait gardé le cordage en guise de rampe et le plancher des lattes de bois. Les trois pièces se divisaient ainsi : chambre-coin bureau, cuisine-salle d'eau et l'atelier.»
Un lieu donc, composé de triptyques et de diptyques comme souvent sont composées les oeuvres du peintre.
-« Sur le plancher de Bacon, des débris de toutes sortes jonchent le sol, formant une sorte de compost de sédiments, une croûte rugueuse : l'opposé de la netteté «clinique» de ses tableaux, qui naissent pourtant bien ici, et dont la largeur ne peut excéder la diagonale de la fenêtre. Des chaussures dépareillées, des gants de caoutchouc rose, des assiettes, de vieilles éponges, des livres abandonnés aux pages déchirées, des photographies arrachées ... et des buissons de pinceaux. Il s'en excuse : «Mais toute ma vie n'a été qu'un vaste désordre.»

Les entretiens, qui occupent la presque totalité du livre, emboîteront le pas à cette entrée en matière.
Excellemment retranscrits, ils nous donnent l'impression d'occuper la troisième chaise et de participer activement à la conversation, arrosée d'un verre de bon vin. " Ce vin, regardez ce rouge ... Rembrandt ...."
Art, littérature, cinéma, poésie, enfance, rencontres ... Autant de thèmes abordés qui nous rapprochent de l'intimité du peintre, éclairent son oeuvre et lèvent un petit pan de voile sur le mystère de la création.

5 étoiles. C'est trop peu pour ce magnifique livre !
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Bacon rit, par Franck Maubert, son ami
par Fabien Ribery

« Si les Français apprécient mon travail, je n’aurai pas l’impression d’avoir tout raté. »

Bien entendu, pour comprendre qui était Francis Bacon et comment il travaillait, les entretiens avec David Sylvester sont indépassables.

Cependant, la parution récente d’autres documents permet d’approcher de nouveau l’un des plus grands peintres du XXème siècle : le recueil Conversations, à L’Atelier contemporain (préface de Yannick Haenel, 2019), le livre-monde Bacon Le Cannibale, de Perrine Le Querrec (Hippocampe Editions, 2018), et maintenant Avec Bacon (Gallimard, 2019), portrait d’un ami, par le critique, romancier et essayiste Franck Maubert.

On y rencontre l’artiste en 1979 dans son atelier du quartier de South Kensignton (London) au 7, Reece Mews, acceptant d’ouvrir sa porte – donnant sur un escalier de meunier « raide et étroit » – à un jeune journaliste d’art de L’Express, hanté par une peinture d’icelui vue quelques années plus tôt au générique du Dernier Tango à Paris, de Bernardo Bertolucci.

« Son sourire tout d’abord m’accueillit, suivi d’un rire de gaieté et de chaleur. Le peintre m’attendait sur le palier. Il n’arborait rien, bien sûr, de l’accoutrement de ceux qui jouent à faire l’artiste, affublés d’un foulard et d’un chapeau. Elégance irréprochable dans sa veste croisée, sa chemise à rayures jaune et bleu, sa cravate sombre en tricot de soie, son pantalon de flanelle grise serré aux chevilles et ses bottines de cuir lacées. Il a la tête d’un homme sans âge, une tête d’oiseau de proie. »

Bacon parle en français, et ne cesse de rire : « Je peins pour m’exciter moi-même, mais si ça peut vous rassurer, ça ne m’arrive pas souvent. »

Bacon rit parce que la vie est tragique, parce que la violence est omniprésente, parce que tout est faux, sauf l’alcool, sauf la peinture, quelquefois.

Bacon, c’est Eschyle et Shakespeare, la comédie et le cri.

Bacon rit parce que les accidents sur la toile sont des bénédictions du hasard, parce que parler de l’art, au fond, ne sert à rien.

Son atelier ? « Jamais rien vu de tel. Un autre théâtre. La vision est plus forte que ce que j’avais imaginé et vu ou lu. Il nous faut marcher sur un tas de compost, magma de débris divers, sédiment épais de matières accumulées jour après jour depuis des années. Il y a de tout, des pages de journaux froissées, des photos piétinées, des chiffons, des livres ouverts, certains en lambeaux, en vrac, des petits pots en verre avec des pinceaux plantés dans des agglomérats de peinture séchée, quelques toiles posées au sol, des images épinglées aux murs, la porte maculée de traces de couleurs, là où il essuie ses pinceaux, sa palette en quelque sorte… »

L’atelier donne le vertige, c’est une toile en insurrection permanente, une mémoire en ébullition, « un champ de bataille ».

Franck Maubert y voit un lieu de sorcellerie, un espace sacré, un temple.

Champagne, château Petrus, chardonnay, bière, les breuvages coulent, comme la conversation évoquant l’installation à Tanger et les relations avec les Bowles, la mort de son amant George Dyer, l’amitié nouée avec Michel Leiris, Giacometti (« Il est le plus grand de nous tous. (…) Il m’a influencé plus que tous les autres. »), Muybridge, Eisenstein, ses maîtres en peinture (Cimabue, Pontormo, El Greco, Vélasquez, Van Gogh), son pragmatisme et ses découvertes techniques.

« J’aime beaucoup le orange, comme toutes les couleurs qui n’ont pas de rapport avec la réalité. Il faut le mensonge pour arriver à la réalité. Il faut être faux. C’est la couleur de la vie dans un sens, cela lutte contre la mort. »

Lui, toujours très bien habillé, banquier ou rock-star : « Nous sommes de la viande, n’est-ce pas ? »

Bacon, enfant fouetté par son père, militaire puis éleveur de chevaux ayant voulu éradiquer en son fils le poison de l’homosexualité, peint le crime, l’homme crucifié, le feu, la cruauté.

Scène dans un pub, scène au casino, scène au bar de l’Hôtel Pont Royal à Paris, scène dans la boîte de nuit Les Bains.

Passe David Hockney, « tignasse blonde et maillot à grosses rayures horizontales bleu et blanc. »

Bacon : « Je poursuis la peinture, car je sais qu’il n’est pas possible de l’arrêter. »

Et : « Il faut déformer la vie pour mieux la retrouver. »

Fabien Ribery, 27 juillet 2019.
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« Francis Bacon incarne, plus que tout autre artiste, "la" peinture. Il est l’homme le plus extraordinaire qu’il m’ait été donné de connaître. Dans les années 1980, je l’ai rencontré à plusieurs reprises. À Londres, tout d’abord, dans son atelier de South Kensington, puis en diverses occasions, lors de ses passages à Paris. Nous conversions aussi parfois au téléphone, tôt le matin. Il parlait en toute liberté, sans tabou, de tout et de choses sans importance. Bacon adorait parler, parler l’excitait.
Je l’observais, l’enregistrais, prenais des notes, rien ne le gênait.
Rendez-vous dans son atelier, dans les restaurants, les bars londoniens ou parisiens, de jour comme de nuit, à discuter, boire, manger, jouer : ce livre retrace ces moments rares partagés avec Bacon, joyeux nihiliste, et éclaire l’homme exquis qu’il fut, loin de sa réputation de "monstre" ».
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