Carlo Altoviti, au soir de sa vie, entreprend la rédaction de ses mémoires. Il retrace en même temps l'histoire de l'Italie de l'époque. Né en 1855, sujet vénitien, il est élevé dans le château de son oncle et de sa tante au Frioul, le comte et la comtesse de Fratta. Sa mère est morte, on ne sait pas grand-chose de son père, et il est un peu la honte de la famille, il passe son temps à la cuisine avec les domestiques et n'approche que très peu ses nobles parents, sauf Pisana, sa cousine, un peu plus jeune que lui, et très délurée, à qui il est terriblement attaché, cet attachement étant la grande constante de sa vie. Carlino grandit entre l'indifférence de sa famille, ses jeux d'enfant et l'affection de certains domestiques. Il observe également tous les gens qui l'entourent avec malice et clairvoyance. Les us et les coutumes semblent encore sortis du Moyen-Âge par certains aspects, Venise est loin, même si ses prisons font peur et pour de bonnes raisons. Carlino grandit, on lui découvre des capacités et il part étudier le droit à Padoue. Les choses s'animent au château de Fratta avec les deux filles de la famille qui grandissent et leurs soupirants. Et l'Histoire se met en marche, les échos de la Révolution française arrivent jusqu'au Frioul, étouffés d'abord, puis de plus en plus insistants, et un jour l'armée française franchit les frontières….
Impossible à résumer ce long roman de plus de 800 pages, dans lequel les péripéties et les rebondissements ne manquent pas.
Ippolito Nievo crée un personnage attachant, il nous relate les différentes étapes de sa vie, son enfance et sa jeunesse, ses amours, ses amitiés. Mais Carlino est un très fin observateur, et se met souvent dans ces mémoires en arrière plan, préférant croquer avec malice et finesse les personnes qu'il rencontre, celles de son entourage, comme celles qui font l'histoire, il croise même Napoléon. L'écriture est vive et plaisante, et fait qu'on tourne les pages sans même sans rendre compte. La partie la plus réussie et la plus longue du roman est consacrée à l'enfance et aux jeunes années de notre héros, la maturité est passée très vite, et l'entrée dans la vieillesse avec la mort de nombreux personnages est un peu trop sentimentale à mon goût, mais cela convient peut être à un vieillard. Nievo clôt son livre en 1858, presque au moment où il l'écrit, et nous restons donc en suspens pour la fin de la grande Histoire, avant la fin des opérations qui vont aboutir à la création de cet nouvel état italien, que l'auteur et son personnage souhaitent si ardemment. le personnage principal a probablement emprunté de nombreux éléments à l'auteur, difficile de faire la part des choses, puisqu'il ne vivent pas tout à fait à la même époque, mais très certainement ils partagent la même philosophie de la vie, les même espoirs.