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On pourrait craindre que ce roman nous fasse tomber dans le voyeurisme... Mais ce n'est pas le cas. Benard Ollivier dresse dans ce livre à la fois le portrait de la campagne normande au début du 20è siècle, ainsi qu'une galerie de personnages - dont les hommes qui sont disséqués sous la plume de Rosa. Le "concours de coqs" organisé par des mâles ayant besoin d'une reconnaissance de leur anatomie a de quoi défrayer la chronique, en particulier pour l'époque durant laquelle l'auteur a choisi de poser son histoire. La morale s'oppose farouchement à l'amour, la décision de Rosa - servir d'arbitre pour désigner l"homme" en recevant plusieurs hommes dans son lit - est guidée par son affection pour son mari, mais frôle le concept de prostitution... Au final, ce roman dénote d'une époque encore trouble, partagée, que les débats politiques, la séparation entre l'Église et l'État, les remous de l'affaire Dreyfus et les avancées technologiques rendent encore plus agitée, "en mouvement". Dans ce contexte, Rosa fait figure d'ovni. Différente des femmes soumises qui n'osent s'opposer aux frasques de leurs maris, elle n'en sacrifie pas moins sa vertu et se laisse même tenter par les prémices du désir et de la libération sexuelle. En se succédant dans son lit, les hommes du village ont l'impression de prouver leur valeur. Mais en réalité, par les anecdotes qu'elle consigne dans son cahier, Rosa nous fait partager une galerie de personnages tous différents, tous fragiles. Ils sont mis à nu devant elle - sans mauvais jeu de mot - et le masque tombe au moment de passer à l'acte... Les plus téméraires deviennent anxieux, les plus timides se révèlent... Au-delà de la relation charnelle cependant, chaque homme dévoile sur l'oreiller ses faiblesses, une partie de son passé, des sentiments ou des rêves enfouis... Rosa devient la spectatrice de ce défilé d'hommes aussi différents que touchants parfois. Et nous aussi... Enfin, ce roman est écrit sans lourdeur ni vulgarité. Une belle découverte... + Lire la suite |