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Jean-Marie Saint-Lu (Traducteur)
EAN : 9782864246251
418 pages
Editions Métailié (22/05/2007)
3.24/5   56 notes
Résumé :
Au Latina, un café parisien, Luis invite Ana à danser un tango. Passionnés par la danse argentine, ces deux inconnus découvrent qu'ils ont en commun une histoire.
Leurs aïeux croisaient déjà leurs pas au rythme du tango, dans le Buenos Aires du début du XXe siècle, avant les dictatures, quand l'Argentine était encore la terre promise d'innombrables immigrants.
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Challenge ABC 2016-2017

« Le tango, c'est l'expression verticale d'un désir horizontal. »*
« Le tango est une pensée triste qui se danse. »**
Le roman d'Elsa Osorio illustre à merveille ces deux citations.
Le tango, cette musique déchirante, parcourue d'une tension dramatique qui vous remue les tripes et vous fait briller les yeux, cette danse à la fois calme et enfiévrée, fière, provocante et détachée, pendant laquelle les partenaires ne se regardent pas et où l'homme guide la femme par les seules indications de sa main dans son dos.
Une musique et une danse scandaleuses, nées d'influences africaine et européenne dans les bordels de Buenos Aires à la fin du 19ème siècle, interdites d'entrée dans les salons des honnêtes gens, mais que ces messieurs de la bonne société ne se privaient pas d'aller danser dans les tripots malfamés, s'encanaillant avec des demoiselles à la moralité douteuse, au milieu des marins, des bandits et du « petit peuple ». Il aura fallu que le tango émigre à Paris avec quelques Argentins, qu'il y devienne une mode au début du 20ème siècle, y soit codifié et un peu assagi avec des figures plus décentes (« tango liso »), puis qu'il rentre au pays lorsque éclate la Première Guerre Mondiale, pour lentement gagner ses quartiers de noblesse et être peu à peu admis dans les cercles mondains.
C'est toute l'histoire de ce tango d'avant Piazzolla qui est retracée dans ce livre, étroitement liée à celle de deux familles aux multiples rejetons, qui, sur quatre générations et même au-delà de la mort, ne cesseront de se croiser et de se perdre de vue, de s'aimer et de se déchirer entre Buenos Aires, Paris et même depuis le paradis du tango (« Ciel de tango », le titre original). Des personnages, des amours, des destins à l'image des mouvements du tango, tumultueux, sulfureux, passionnels, excessifs, contrariés, interdits, presque impossibles. Des liens qui se créent et se dénouent avec en toile de fond l'histoire non moins mouvementée de l'Argentine, patrie de millions d'immigrants européens en quête d'Eldorado, soumise aux soubresauts des luttes sociales dans la démocratie du début du siècle, puis des coups d'Etat et des dictatures dès 1931, et des aberrations politico-financières des années 1990-2000.

Entrer dans ce roman, c'est comme un premier cours de tango : un peu complexe, beaucoup de choses à assimiler, un peu rébarbatif quand vous avez un partenaire débutant comme vous, qui vous guide mal. Il faut passer le cap des nombreux personnages, des brusques changements de point de vue, s'habituer au style échevelé. Puis après quelques pages, le charme opère, c'est comme si vous dansiez avec le professeur : le livre vous prend dans son « abrazo » et tout à coup vous comprenez toutes les indications, les changements de direction, vous suivez les voleos et les ochos qui s'enchaînent, plus besoin de réfléchir gauche ou droite, un-deux-trois, tout est fluide, ça y est, vous vous êtes laissé emporter par Tango...

*Angela Rippon
** Enrique Santos Discépolo
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Elsa Osorio, Tango, Metailié.

Luis : « Ce tango est l'histoire de Buenos-Aires, avec tout son cocktail explosif de créoles et d'immigrants, de luttes, de vaches, de trahisons et de passions. »

Luis découvre Ana à Paris, en dansant le tango au Latina, et de cette rencontre naît une remontée dans le temps qui mêle à la fois l'histoire de l'Argentine, d'une danse scandaleuse au départ, d'une famille argentine, avec ses couples officiels … et des liaisons parallèles.

L'amour se danse, la musique s'invente avec ses figures inédites, le tout dans une ambiance sulfureuse et passionnelle, où les différents partenaires, sur trois ou quatre générations, créent des variations sur le thème de l'accord immédiat, de l'amour différé, du malentendu, des brouilles, et des retrouvailles.

Elsa Osorio fait dialoguer les différentes générations, s'adresse directement à ses personnages, mais laisse aussi Tango, médiateur et créateur des couples, raconter sa propre histoire, comme celle de ses. talentueux concepteurs et interprètes.

« [ En France] je n'étais peut-être pas la même danse que dans les maisons canailles où je suis né, mais il y a toujours un homme face à une femme et moi qui les mêle dans le désir. Cette étrange fièvre qui s'était déchaînée à Paris te permettait de m'écouter et de me danser partout : dans les résidences, les hôtels, les dancings, les champagnes-tangos.

Mes fans et mes détracteurs passaient [leur temps]à être pour ou contre moi, à essayer de me classer, de me raffiner, de m'orner, de me rendre décent, de me vilipender, de me flatter. »

Le Pape exige même une démonstration et recommande « une danse vénitienne ».

«  Moi qui laisse mes filles danser le tango, a dit un monsieur, je ne leur permettrais pas de danser la furlana. Comment le Pape a-t-il pu … ? C'est que le Pape n'a pas de filles, lui a répondu une femme. »

Le Tango accompagne les différentes phases historiques, les immigrations, les émigrations, le brassage des populations, le renouveau des ressources économiques qui permettent les accomplissements personnels et la maturation des idées sociales. Entre la France et l'Argentine, le courant passe, créant un terreau fécond.

C'est dire la richesse de cette histoire foisonnante, avec des références à des événements historiques, en 1930 ou en 2001.

Il est conseillé de lire le roman à grandes goulées pour en saisir les saveurs pimentées, les rythmes, l'invention des figures, les élans du désir et les plaisirs des corps.
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Dans ce livre confus (pas le meilleur de cette autrice, pour moi !), chaque personnage s'exprime à tour de rôle, les vivants comme les morts et même la danse qui a donné son titre au bouquin.
Les vivants naviguent de Paris à Buenos Aires, s'expriment par les moyens de communication modernes et se retrouvent en fin de compte au milieu de la crise financière et politique qui a secoué l'Argentine au début des années 2010.
Les morts discutent entre eux (en italique dans le roman) de ce qu'ils auraient du faire jadis et des amours de leurs descendants.
Ceux qui l'ont pratiqué si ne n'est inventé vivent au pays de Tango, dont Elsa Osorio donne la parole à son tour pour relater les histoires amoureuses du passé.
Je m'aperçois que ma critique est aussi obscure que ce livre dont un des plus grands mérites est de retracer l'histoire de l'Argentine de la Belle Époque et actuelle, ce qui plaira aux aficionados de ce pays.
C'est aussi le roman d'amours contrariées ou pas et enchevêtrées certainement.
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Fil tendu entre deux époques, entre le présent et l'avènement du XXème siècle, le Tango rassemble et sépare, suscite passions et haines.
Ce roman d'Elsa Osorio présente une fresque historique de l'Argentine, entremêlant les destins de personnages de diverses classes sociales, pourtant tous liés d'une manière ou d'une autre à cette scandaleuse danse qui fleurit dans le quartier de la Boca, fut dansée dans tout le Rio de la Plata au point que Montevideo en réclame également la paternité, et fut consacrée à Paris.
La force de ce roman, au-delà de la trame historique qui permet d'effleurer l'histoire de l'Argentine et surtout de Buenos Aires, est la manière dont il permet, très subtilement, de dévoiler deux aspects majeurs de la culture argentine: le premier, l'éclatement social et les différentes classes qui se côtoient et s'ignorent, entre les élites n'ayant d'yeux que pour l'Europe et en particulier Paris, et l'extraordinaire diversité de l'origine des immigrés arrivant dans les années 20 à Buenos Aires : on retrouve Espagnols, Italiens mais aussi émigrés d'Europe de l'Est. La seconde est la condition de la femme en Argentine, et l'attitude des hommes argentins fous de femmes légères qu'ils adulent mais qu'ils repoussent pour se marier selon les normes sociales à des épouses convenables, elles-mêmes privées de toute liberté à moins de déshonorer leur famille. Ces rapports ambigus entre hommes et femmes, soutenus par un désir intenable incarné par le tango sont habilement esquissés.

Un tourbillon d'émotions contradictoires, de notes historiques et d'aspirations politiques, et bien sûr de passions autour du tango et de la musique, un délice !
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Elsa Osorio nous livre l'histoire du tango, la réputation dont il fut longtemps victime et qui lui ferma les porte des beaux salons sous peine de scandale, et en faisant un personnage à part entière, un monde même, un paradis, qui accueille les ancêtres décédés d'Ana et Luis.

En revanche, quelques bémols ressortent de ma lecture, notamment cette narration que j'ai trouvé fouillis, qui alterne un narrateur extérieur qui interpelle les personnages et les personnages eux-mêmes (ou du moins certains d'entre eux) qui prennent la parole de temps en temps. Autant dire qu'il faut un minimum de concentration pour ne pas se perdre dans ce roman, surtout quand on voit la multiplicité des personnages... Cette multiplicité des personnages m'a d'ailleurs interrogée, je n'ai pour certains pas saisi leur intérêt ni l'opportunité de les faire intervenir...

Ainsi, si l'idée de faire des allers et retours entre le présent avec Ana et Luis et le passé avec l'histoire de leurs ancêtres est enrichissante, les premiers m'ont semblé fades. Ils auraient pu être inexistants sans que le reste de l'histoire en pâtisse, bien au contraire je pense... Car Elsa Osorio nous conte l'histoire de deux familles, et sur 3 ou 4 générations. Avec leurs ramifications, leurs liens et leurs satellites... Vous comprenez donc qu'il peut vite devenir difficile de se retrouver entre tous ces caractères parfois bien trempés !
Lien : http://croqlivres.canalblog...
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Les relations par Internet sont curieuses, peut-être parce que dans l’intimité de son chez-soi, par l’intermédiaire de l’ordinateur, les mots tissent une trame de complicités qui engendre l’illusion de tout connaître de l’autre, et lorsque les deux corps apparaissent, quand ils se voient, ce sont de complets inconnus.
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C'est le dernier soir, mais pas de ma vie, s'est dit Luis, en essayant d'éloigner cette tristesse à contresens, et il a décidé que ce serait une bonne soirée, quelles que fussent les vicissitudes qu'elle lui offrirait. Il faut cajoler un peu la chance.
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On ne savait plus en quelle langue parlaient tous ces gens venus de partout qui continuaient à débarquer et à inonder Buenos Aires de sons grossiers.
Pourquoi parlait-il avec tant de mépris des immigrés ? Elle aussi était descendue d'un bateau. Mais Yvonne n'était pas une immigrée, tu es française, et de plus c'était Franscico Ponce qui l'avait invitée. Elle avait du mal à comprendre pourquoi, pour les Argentins, être français n'était pas être étranger. Paris était aussi leur ville, ils y passaient de longues périodes, ils faisaient construire leurs maisons à Buenos Aires ou à la campagne par des architectes français, ils étudiaient dans des livres français, s'habillaient, jouaient au polo, achetaient de l'art et allaient à l'Opéra à Paris, nombre d'entre eux avaient des appartements ou des maisons à Paris ou à Biarritz.
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Il faut tenir compte du climat de ces années-là, il y avait des tensions avant même la Première Guerre; grève des pouvoirs publics, séparation de l'Église et de l'État. Le tango est allé comme un gant à cette société française, agitée et turbulente, changeant et sensible. Pour cette angoisse sourde, latente, cette volonté de libération qui explose dans les corps trop tendus, rien de tel que le tango. Les différends anesthésiés par une même passion euphorique et démocratique. Bref, je pourrais te parler des heures de que j'ai trouvé et pensé, mais cela n'apportera pas grand-chose à ton film. Tu ne peux pas savoir comme j'ai ri en lisant qu'on avait dansé le tango devant le pape, pour qu'il dise si c'était ou non un péché.
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Il se rappela inopportunément - mais n'en dit rien - les mille brebis Lincoln et les deux troupeaux de juments que son père avait offerts au fils de Roca, et e pur-sang que le père de Fermín avait offert à Roca. Sur les trente millions d'hectares gagnés sur les Indiens, vingt allaient passer au domaine privé, il était important qu'ils soient en de bonnes mains. Le père de Fermín en avait acheté deux cent soixante-dix mille. Pourtant ce n'était pas pour cette raison qu'il se disait roquiste, non, mais pour un motif beaucoup plus banal. Vicente l'avait entendu dire au club. Roca était revenu d'Europe avec une concubine polonaise et il prétendait l'imposer comme sa femme à la société.
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Videos de Elsa Osorio (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Elsa Osorio
https://www.librairiedialogues.fr/livre/13111937-double-fond-elsa-osorio-anne-marie-metailie Elsa Osorio nous parle de son livre "Double fond" (éditions Métailié), dans l'émission Dialogues littéraires, réalisation : Ronan Loup. Interview par Laurence Bellon.
Retrouvez-nous aussi sur : Facebook : https://www.facebook.com/librairie.dialogues Twitter : https://twitter.com/dialogues Instagram : https://www.instagram.com/librairiedialogues
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