Je me suis encore régalée avec ce roman policier historique du maestro
Andrea Camilleri (2000). il est original et drôle.
Nous sommes à Vigatà (ville sicilienne imaginaire) , le vendredi saint de l'an 1890. Tout le village assiste à la représentation du mystère de la Passion du Christ, dit Les Funérailles. le comptable Pato, directeur de la filiale locale de la banque de Trinacria, neveu du Sous-secrétaire d'Etat au
Ministère de l'Intérieur et paroissien irréprochable, incarne Judas. Conformément à la mise en scène prévue, au moment de la pendaison du mauvais apôtre, une trappe s'ouvre et Pato disparaît. Mais il n'a toujours pas réapparu le lendemain. le délégué à la sécurité publique Ernesto
Bellavia et le maréchal des carabiniers royaux Paolo Giummaro mènent l'enquête.
L'originalité de ce roman policier c'est qu'il est entièrement rédigé sous forme d'un dossier épistolaire administratif. Il contient dans l'ordre chronologique les documents officiels ou non tapés à la machine. Ils ont différentes typographies et des en-têtes stylisés. On y trouve les rapports aux supérieurs hiérarchiques, officiels et non officiels ; les procès verbaux d'interrogatoires ; des articles de journaux ; les lettres farfelues d'un sujet de sa Majesté, des plaintes de paroissiens outrés, des interventions politiques, des interventions ecclésiastiques, mais aussi des lettres anonymes, des graffitis etc.
L'enquête est passionnante jusqu'au bout. Les deux premiers chapitres permettent au lecteur de se familiariser avec tous les protagonistes d'une manière claire et simple. Les hypothèses sont nombreuses. La découverte de la vérité est perturbée par des interventions extérieures et partiellement occultée jusqu'au bout. Au lecteur de se faire son idée.
Et puis surtout, c'est une comédie dans la tradition sicilienne (populaire et littéraire), avec une forme moderne qui ressemble à un collage épistolaire.
Les lettres permettent de jouer sur l'alternance entre les registres de langue et les niveaux d'éloquence. Les lettres vont de l'ampoulé au dialectal, de l'empesé onctueux aux menaces directes, du rigide bureaucratique aux lazzi. C'est souvent très drôle et cela permet en même temps de se rendre compte des moeurs et coutumes locaux, de la rivalité traditionnelle entre police et carabiniers, des rapports hiérarchiques et sociaux de l'époque et bien entendu de la façon dont on camoufle la vérité.
Plus je lis Camilleri, plus je le trouve génial.