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EAN : 9782221035733
Robert Laffont (21/02/1992)
4/5   10 notes
Résumé :
4ème de couverture
Dans le trésor personnel de Jean Raspail, figure une hache de pierre noire, qui vient du fond des temps, du fond des steppes. Magnifique objet, objet toujours vivant. Symbole.

Gage de vie, parfois gage de mort, la possession de la hache conduit jusqu'à nous, par miracle, des peuples perdus et des minorités oubliées, rescapées de temps révolus. Parfois, il ne s'agit plus que de leur souvenir, recueilli comme un dernier souffle... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La mort de Jean Raspail m'a incité à relire ce titre paru en 1973, que l'auteur m'avait dédicacé, que j'ai prêté et donc égaré …

Je désespérais le retrouver mais mon libraire a eu la délicatesse de m'orienter sur sa réédition par Via Romana en 2016 et je me suis replongé dans ce passionnant voyage qui emmène le lecteur autour du monde avec des étapes en Sibérie, au Japon, dans les Andes, mais aussi à Troyes et Amiens et nous promène à travers les siècles avec un auteur sans doute moins ethnologue que romancier surtout quand il croise Jacques Perret.

Obsédé par le manque de mémoire temporelle de ses contemporains et donc par l'oubli de leurs racines, Raspail part sur la piste des derniers survivants des peuples en voie d'extinction ou d'assimilation. Pèlerinage aux étapes contrastées arrivant sur une conclusion désespérante car « la hache des steppes ne porte pas bonheur ».
A noter que plusieurs des vingt chapitres figurent (avec quelques variantes) dans « Le Son des tambours sur la neige et autres nouvelles d'ailleurs » et que je suggérerai à un lecteur découvrant Raspail de préférer le son des tambours à la hache des steppes … mais cet avis n'engage que moi.

Cette relecture permet de mesurer le chemin parcouru par l'auteur dans sa réflexion politique et religieuse au fil de sa longue vie. Au début des années 70, ces pages sont celles d'un chrétien déboussolé par le Concile et d'un jeune aux tendances anarchistes ; au terme de son parcours Sire et L'anneau du Pécheur, par exemple, illustrent son évolution vers le monarchisme et l'Eglise. Evolution vers Via Romana … alors que la Hache des Steppes n'a vraiment rien de catholique … au contraire !
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
J'en étais là de mes raids manqués sur l'Altaï, coupés de récits à mes amis que j'embellissais un peu plus chaque fois, lorsque dînant avec Jacques Perret, je lui contai toute l'affaire. Le caporal épinglé avait tant rêvé toute sa vie devant sa table d’écrivain, il avait tant forgé le merveilleux avec le vrai et le vrai avec l'imaginaire, que cette histoire-la, voilà longtemps qu'il la connaissait ! Il la tenait d'un vieux camarade, artiste dessinateur de son état dans le quartier Saint-Jacques, une sorte de cavalier mongol, à l'entendre, l'aspect puissant, l’allure sauvage, le cheveu raide et noir, les yeux bridés comme il se doit, et qui donnait toujours l'impression d'avoir oublié son cheval lorsqu'il prenait le métro. Il ne faut jamais interrompre Jacques Perret lorsqu'il décrit quelque chose ou quelqu'un. Jamais personne ne se haussera aussi élégamment que lui aux lisières subtiles et fantasques de l'épopée. Vétéran des champs Catalauniques, le Barbare, les jours de spleen, une solide eau-de-vie au poing, racontait la bataille et se souvenait de tout, et pourquoi et comment il était venu, à cheval depuis l'Altaï, voter dans le XIV° arrondissement.
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Jean Raspail
Non pas qu'il (l'objet) fût fragile, en pierre noire immortelle, mais depuis que mon père me l'avait transmis et que je vivais en sa compagnie, le respect qu'il m'inspirait allait sans cesse croissant. C'est sûr, si je n'y prenais garde, cela finirait un jour par une sorte de messe et c'est à genoux que j'invoquerais la pierre noire. Je n'en étais pas encore là. Mais la méditation où me plongeait l'objet prenait, au fil des années, une intensité quasi religieuse contre laquelle il devenait de plus en plus difficile de me défendre. Si bien que lorsque je commençais un nouveau livre, j'enfermais la pierre à clef au fond du plus lointain placard, ou dans le coffre de ma banque, pour ne pas être tenté d'aller l'interroger. Le dernier mot écrit, le manuscrit déposé chez mon éditeur, alors, seulement, je rendais à l'objet banni la liberté de profiter de la pause et de m'enfermer à son tour. Cette fois, au contraire, jusqu'au mot de la fin, il m'accompagnera...
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Je criai dans le vent pour savoir au moins leurs noms. Sans réponse. Une femme leva la tête vers moi. Elle avait les cheveux plaqués sur le visage par la pluie qui tombait à torrents. J'aperçus une épaule décharnée à travers un trou de la couverture trempée qui lui servait de vêtement et me souvins que les Alakalufs, jadis, vivaient nus par les froids les plus vigoureux. Accroupie au fond de la barque non pontée, l'autre femme écopait avec une boite de conserve. Déjà, les hommes et l'enfant avaient empoigné les avirons. La barque déborda rapidement, s'éloignant du navire qui avait repris sa route. Je fis un geste de la main, en signe d'adieu. La femme qui me regardait baissa aussitôt la tête. J'ai dis la conviction que j'avais que dix mille ans nous séparaient. Il s'en ajouta une autre : cette conviction était partagée. Sur l'autre rive d'un fossé de cent siècles, les derniers Alakalufs nomades s'enfuyaient encore plus loin, volontairement, dans le passé. Transi, mouillé jusqu'à l'os, l'âme désolée, je regagnai ma cabine. Par le hublot, je ne vis plus rien que la pluie.
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La hache des steppes ne porte pas bonheur. Elle est un porte-malheur. Elle marque du sceau de la mort tous ceux qui ont bravé le cours des siècles. elle les entraîne irrésistiblement vers le fond comme la pierre que s'attache au cou le désespéré qui se noie. Elle est le signe des vaincus. Lui avoir consacré toutes ces pages (sur tous les tons, on en conviendra) éclaire d'un jour funèbre le camp où je m'étais rangé. Qui sait si je le quitterai ? Il y a noblesse à s'obstiner. La compagnie s'y fait rare. Tous les autres ont le dos tourné. Ils n'ont plus de visage. Les « hommes » sont morts. Ceux qui les remplacent nous effraient. Comme les Urus, nous ne parlons pas leur langue. Nos chandeliers de fer-blanc s'éteignent. La nuit est aveuglante.
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Je crois que je restai bien une heure, ou même deux, à dévisager le dernier des Urus, le livre ouvert sur la photographie de Manuel Inta. Un très vieil homme, le regard infiniment triste sous les paupières voilées de pus. Son front, beaucoup plus vaste que celui des autres indiens, ses joues et son menton étaient profondément creusés de sillons qui dessinaient sur sa peau la géographie de la misère, craquelés par dix mille ans de souffrances, de faim, de froid et de persécutions, mais sa bouche généreuse souriaient timidement.
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Vidéo de Jean Raspail
Petits éloges de l'ailleurs : chroniques, articles et entretiens Jean Raspail Éditions Albin Michel
Recueil d'articles publiés dans la presse au cours des trois dernières décennies, consacrés à des sujets de société, à certains aspects de la langue française, au voyage, à l'histoire ou à des écrivains, parmi lesquels Jacques Perret, Jean Cau, Michel Mohrt et Sylvain Tesson. L'ouvrage offre un tour d'horizon des univers multiples dont s'est nourri le romancier. ©Electre
https://www.laprocure.com/product/325795/raspail-jean-petits-eloges-de-l-ailleurs-chroniques-articles-et-entretiens 9782226470478
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