Un ouvrage court -134 pages- mais néanmoins approfondi sur un aspect précis de la guerre d'Algérie : le Pen et la torture.
A partir du 7 janvier 1957, compte tenu de l'engrenage de violence aveugle qui met Alger à feu et à sang, le pouvoir politique incapable de maintenir l'ordre remet à l'armée les pouvoirs de police, en vertu de la loi dite des "pouvoirs spéciaux". de cette date jusqu'à la fin mars 1957, date de son départ d'Alger,
Jean-Marie le Pen, jeune député de Paris et engagé volontaire au 1er Régiment Étranger de Parachutistes (REP), a-t-il commis des actes de torture ?
Grâce aux ouvrages déjà existants sur ce sujet, aux archives qu'il a consultées, et aux nombreux témoignages qu'il a recueillis tant en France qu'en Algérie,
Fabrice Riceputi a construit un récit qui se lit avec intérêt, une carte d'Alger illustrant utilement ses explications. Un ouvrage fidèle à l'image de journalisme d'investigation associé à Mediapart.
Sur ce que l'histoire retiendra comme "la bataille d'Alger", il est établi que des actes de torture ont été pratiqués. le vote ultérieur de plusieurs lois d'amnistie par le Parlement est d'ailleurs révélateur d'une volonté d'effacer le passé et d'absoudre les éventuelles responsabilités. Que
Jean-Marie le Pen ait personnellement pratiqué la torture, le récit nous indique que c'est vraisemblable, mais que ça n'est pas prouvé.
Si l'ouvrage met en lumière ces faits, il reste discret sur les causes qui les ont produits. C'est une de ses limites. A ce titre, on ne peut pas oublier les propos d'
Albert Camus en décembre 1957 lors de la remise de son
Prix Nobel de Littérature : "J'ai toujours condamné la terreur. Je dois condamner aussi un terrorisme qui s'exerce aveuglément dans les rues d'Alger, par exemple, et qui un jour peut frapper ma mère ou ma famille. Je crois à la justice, mais je défendrai ma mère avant la justice". L'autre limite de l'ouvrage réside dans le fait que, lorsqu'un historien analyse une période plus d'un demi-siècle plus tard, le regard et le jugement qu'il porte sont nécessairement différents de ceux du protagoniste qui a été plongé au coeur de l'action à l'instant T. Dernière remarque, le titre de l'ouvrage est : le Pen et la torture - Alger 1957, l'histoire contre l'oubli. Or, il est référencé sur Babelio sous un titre différent :
le Pen et la torture - Alger 1957, lutter contre l'oubli. Pourquoi cette différence ?
Ouvvrage lu dans le cadre de l'opération Masse critique.