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Les hommes de bonne volonté (Le Li... tome 15 sur 27
J'ai lu (01/01/1958)
4.41/5   11 notes
Résumé :
Les peuples, partis dans l'enthousiasme pour une guerre courte et brillante, constatent l'échec des premières offensives et voient peu à peu s'imposer à eux les idées de durée, de patience, de « dernier quart d'heure ». Les Hauts Commandements, instruits par l'expérience, cherchent des moyens nouveaux de percer le mur ennemi dressé devant eux. L'impuissance des chefs et le découragement des hommes. La guerre devient peu à peu universelle et prend son caractère de gu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
La guerre qui couvait depuis si longtemps en Europe s'abat sur la France et l'Allemagne. Ce volume (et le suivant) marque une rupture dans cette vaste fresque. Nous retrouvons seulement de temps en temps certains des personnages précédents (Jerphagnon, Clanricard, Gurau...), la plupart du temps via des lettres échangées.

Jules Romains, principalement, s'attache à rendre compte de l'atmosphère délétère de cette épouvantable tuerie. Les esprits ont bien eu le temps de revenir à plus de raison depuis la mobilisation générale, qui s'était faite dans l'optimisme de beaucoup. On a beaucoup écrit sur cette guerre de tranchées, qui plus d'un siècle après est encore dans nos mémoires. Son inhumanité reste marquante.

Ce volume décrit le front de 1914 au début 1916, alors que la bataille de Verdun commence. de l'arrière, il est très peu question. Les chapitres s'enchaînent entre scènes de guerre absurdes et description des enjeux de pouvoir dans l'Etat-Major, détachés de la réalité de cette barbarie.

Jules Romains avait trente ans au début de la Grande Guerre. Sa biographie Wikipédia précise juste qu'il échappe à la Grande Guerre en occupant un « obscur poste à l'arrière » loin du front. Pourtant on s'y croirait. Il n'a pas adopté un ton bravache pour rendre compte de cette horreur, c'est le moins qu'on puisse dire.
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Contrairement à des Céline, Cendrars, Dorgelès, Drieu la Rochelle, Giono, etc., Jules romains n'a pas combattu. Mais Victor Hugo n'a pas connu non plus la Terreur, ce qui ne l'a pas empêché d'écrire un roman – sans doute son meilleur – sur cette période : Quatrevingt-Treize.

Aussi, une fois cet élément biographique précisé, Prélude à Verdun peut être qualifié de texte fondamental sur la Première Guerre mondiale. Quant au premier chapitre, « La victoire en chantant », il devrait être lu dans toutes les écoles, collèges et lycées à l'approche de chaque 11 Novembre, tant il constitue une analyse parfaite de ce conflit qui devait décider du sort du monde et ce, jusqu'à nos jours.

Lisons donc : « Cependant, avec l'odeur des morts, mais plus dégrisantes pour les chefs parce que plus inattendues, des vérités commençaient à se lever des champs de bataille. […] La vision lyrique de la guerre, qui avait aidé les hommes à partir, recevait une secousse traîtresse qui la faisait chanceler. La guerre jouait le mauvais tour de ne pas ressembler à l'image qu'ils avaient emportée d'elle. »

La vision d'une guerre romantique, héritée d'un XIXe siècle ayant mythifié Napoléon, s'est dissipée à l'épreuve du réel : « Les poilus pouvaient se considérer comme des bagnards à perpétuité. La fin de leur peine se confondrait dans l'avenir avec la fin de leur vie. » Et l'auteur commence son récit après les offensives désastreuses de Champagne, c'est-à-dire avant Verdun, la Somme et le Chemin des Dames, entre autres.

Homme de théâtre, Jules Romains, pour offrir le plus complet et plus juste tableau de la situation à la veille de la bataille Verdun, propose des sortes de scénettes où interviennent des anonymes et des moins anonymes. Ainsi, l'on croise la route du Kaiser en personne et de Joffre, celui qui prétendait grignoter l'ennemi avec le corps des poilus. On voit ainsi le contraste entre le front et l'arrière, entre le général et celui qui croupit dans les tranchées, dont celles de la butte de Vauquois qui, encore aujourd'hui, porte les stigmates des combats d'autrefois.

Par la voix de Jean Jerphanion, l'un des protagonistes des Hommes de bonne volonté – dont fait partie Prélude à Verdun –, des vérités acides, et authentifiées depuis par les historiens, fusent : « En attendant, je constate ce que la guerre a produit de plus net, et qui ne doit rien aux mirages, qui est de l'ordre du positif, de l'acquis : la merveilleuse floraison de profiteurs ; la bassesse des gens de l'arrière, qui trouvent tout naturel que nous servions de rempart à la continuation de leur sale petite vie, de leurs sales petits intérêts et négoces, sans oublier ce détail peut-être négligeable, mais qui m'est très sensible : la sottise ordurière de tout un troupeau de littérateurs, de prétendus intellectuels, dont les propos, dont les attitudes sont une insulte continue à l'esprit. »

Plus loin, le même Jerphanion a cette autre remarque, sonnant comme un échec qui retentit encore de nos jours : « Il avait fallu à la civilisation des siècles de tâtonnements, de patientes redites, pour apprendre aux hommes que la vie, la leur, celle des autres, est quelque chose de sacré. Tout ce travail est fichu. On ne s'en remettra pas, tu verras. »

Plus loin, Jerphanion prédit d'autres horreurs à venir, dont la persécution des Juifs, le livre étant publié en 1938, bien avant l'extermination systématique des Juifs d'Europe. Les prédictions se sont vérifiées...

Jules Romains étale aussi l'impéritie de l'état-major français qui, en ce début de 1916, ne voit rien venir. C'est par la voix d'un officier mondain et planqué qu'il exprime cette ignorance stratégique qui a déjà fait ses preuves : « Je vous répète que je crois pas, moi, que Verdun soit une bûche. Je ne crois pas à un péril immédiat. » On connaît la suite…

Puis il y a cet aveu implacable sur la nature humaine : « Je crois parfois que j'ai trouvé le secret de cet immense malheur où nous sommes pris. Il n'y a pas assez d'hommes qui aiment la vie. Il n'y en a pas assez qui soient capables de s'émerveiller de la paix quotidienne. La plupart sont rongés de sale petites inquiétudes, et ils appellent le drame comme un chien dévoré de puces se jetterait dans le feu. Je vais même jusqu'à me dire que beaucoup sont nés à tort, et qu'ils cherchent obscurément à rattraper cette erreur. Dommage que dans leur oeuvre de réparation envers le néant, ils s'arrangent pour avoir besoin de nous. »

Tout cela chatouille et gratouille, mais en moins drôle que chez le docteur Knock…


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Jules Romains n'a fait la guerre 'que' dans un service auxiliaire. Et pourtant tous s'accordent à reconnaitre que les deux volumes de son roman fleuve "Les Hommes de Bonne Volonté" dédiés à la période de Verdun en 1916 sont saisissants de vérité. Dans "Prélude à Verdun" (1938), et "Verdun" (1939), Jules Romains peint avec une intensité dramatique intense les premières minutes de la titanesque bataille, puis les combats désespérés qui s'y déroulèrent. du grand art !

Lien : http://www.passioncompassion..
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Pour empêcher tous ces civils en armes de flairer la paix défendue, pour maintenir à l'état d'irritation et de saignement le contact entre les deux peuples, il suffisait, sans autre appel au zèle ni au courage, d'utiliser çà et là chez les individus le besoin de distraction, la fierté d'être adroit, le goût de la chasse, l'amusement de l'aventure, un rien de cruauté bon enfant. L'on trouvait, plus qu'on n'en voulait, des tireurs pour guetter au créneau le premier "homme d'en face" qui passerait la tête, et l'abattre ; des volontaires pour aller en rampant jeter un pétard dans un poste d'écoute ; d'autres pour former une patrouille chargée de surprendre et de tuer quelques sentinelles. Chaque mort appelant représailles, l'apaisement n'était plus à craindre ; et même si le ressentiment qu'on éprouvait de part et d'autre ne dépassait guère la rancune qu'inspire le mauvais tour d'un voisin ; s'il ne se nommait "la haine de l'ennemi" que dans les allocutions des colonels, il y en avait assez pour que la plus humble cervelle fût préservée de confondre "l'homme d'en face" avec un homme tout court.
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Les économistes n'avaient cru possible qu'une guerre courte, parce qu'ils ne comptaient qu'avec l'argent réel. S'il n'existait que l'argent réel, il y a beau temps que cette guerre aurait fini de l'absorber. Mais les peuples ont appris à la nourrir avec de l'argent fictif, avec ce qu'ils appellent le crédit. Comme les joueurs dans les récits d'autrefois, tâtent leurs poches vides, se disaient soudain : " Mais c'est vrai ! j'ai une bague... j'ai un champ...j'ai une maison. Qui m'empêche de les jouer aussi ?" les peuples, tout en se ruinant, se sont aperçus qu'ils étaient bien plus riches qu'ils n'avaient jamais soupçonné ; et qu'après avoir transformé tout leur argent réel en canons et en obus, ils pourraient transformer en argent fictif la terre, les forêts, les maisons, les ports, les rails, les réverbères... donc en faire aussi des canons et des obus.
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Videos de Jules Romains (18) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jules Romains
Dans l'Allemagne exsangue et tumultueuse des années 1920, le Bauhaus est plus qu'une école d'art. C'est une promesse. Une communauté dont le but est de mettre en forme l'idée de l'Homme nouveau. En 1926, l'école s'installe à Dessau. Dans le grand bâtiment de verre et d'acier, Clara, Holger et Théo se rencontrent, créant une sorte de Jules et Jim. À Berlin, toute proche, le temps s'assombrit. Les convictions artistiques ou politiques ne sont pas les seuls facteurs qui décident du cours d'une vie. Ce sont aussi, entre rêves d'Amérique et désirs de Russie, d'autres raisons et déraisons. Lorsque l'école sera prise dans les vents contraires de l'Histoire, les étudiants feront leurs propres choix. À qui, à quoi rester fidèle, lorsqu'il faut continuer ?
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