Lorsque j'ai ouvert un compte sur Babelio, j'étais invité à mettre sur ma bibliothèque cinquante livres en guise de début pour favoriser les échanges. Il y avait donc cinquante livres lus mais à relire afin de pouvoir les chroniquer car la mémoire à ses limites. « L'épreuve » de Béatrice Saubin était le premier de la sélection. J'en avais gardé un bon souvenir.
Peu après ma première lecture du livre, j'avais un enregistrement VHS, qui était une adaptation téléfilm. Je l'ai regardé à de multiples reprises.
La lecture m'a fait rencontrer une femme intelligente, portée sur les voyages surtout en terre asiatique, trompée, offensée, injustement emprisonnée, révoltée, cherchant à s'adapter, ayant gouter aux bienfaits d'amitiés salvatrices, ….
« 7 septembre 1990. J'ai trente et un ans. En 1959 naissait à la clinique de
Romilly une petite fille qu'on aurait pu aimer, épanouir, diriger. J'ai désormais presque le double de l'âge où ma mère accouchait de ce fardeau, ce poids, cette enfant de ses brèves amours … Je n'absous pas son abandon, mais je comprends à quel point, elle était trop jeune et démunie, abêtie de rêves. J'avais vingt ans quand les murs se sont refermés sur moi avec leur menace de mort. L'allure d'une enfant… Dix années viennent de passer. Incommensurable chemin entre l'abîme de la mauvaise enfance et cette liberté intérieure, patiemment acquise ? Que fuyais-je ? Que cherchais-je ? dix années étranges où j'ai peut-être appris à vivre, en dehors des chemins dit convenables. A vingt ans, mes voyages de plus en plus loin, de plus en plus fous, étaient une quête insatiable du changement, de la nouveauté, de la différence, de l'obsession de fuir Rumilly ».
Voilà, je crois, qui résume assez bien l'histoire de Béatrice. Elle décrit sa vie de sept à trente et un an. Un récit qui prend à la gorge, qui étouffe, émeu, qui nous décrit des travers et des valeurs de la vie, comme nous en connaissons tous.
Dix ans, emprisonnée en Malaisie de façon injuste. Elle est passée par les pires atrocités en prison pendant que la France entière parle de cette affaire.
Elle a laissé en France une grand-mère, qui savait que la finalité était une condamnation à mort par pendaison. Alors, il fallait remuer ciel et terre, car tant que Béatrice vivait et connaissant la Malaisie, il y avait un infime espoir de la sauver.
Béatrice voulait visiter l'Asie. Elle a réalisé ce rêve. Seule à Gorge Town, (Malaisie) un chinois s'est adressé à elle en anglais. Il lui a apporté le bonheur. Il l'a interrogé : le but de son voyage, ses projets, ses amis et amies, sans rien dire de lui, Il a offert à Béatrice une valise sur roulette. C'était un tafiqant de drogue, il a tenté de faire passer à l'insu de Béatrice, dans un double fond de la valise de la drogue. Cette valise, il ne l'a jamais récupérée à Zurich, puisque les douaniers ont saisi la drogue et que Béatrice a été emprisonnée sans que le coupable puisse être retrouver.
De la prison de Penang, elle décrit toutes les horreurs. Elle était réduite à exécuter les ordres des gardiens de prison. Pour facilités les contacts avec les codétenus et les gardiens, elle décide d'apprendre le malais. Une corde de plus a son arc car c'était une française qui parlait couramment l'anglais et l'allemand.
Béatrice se plaignait de n'être qu'un numéro de matricule. Les choses changent car Maître
Paul Lombard la responsabilise : « traduisez-moi les arguments à votre encontre ». Il l'encourage : « Ensemble nous allons y arriver ».
Le procès est gagné. La peine de mort est supprimée.
Elle se fait des amies en prison : Barbara une australienne. Noor une musulmane malaisienne. C'est plus que de l'amitié. Avec Noor, elle trouve le paroxysme de la volupté. Arrive le moment ou Noor est libérée. Aussitôt Béatrice demande son transfert dans une autre prison. Elle sera à Kajang, une prison neuve, moderne, cellule quatre fois plus grande, équipée, confortable où il n'y a que des prisonnières. Là, elle sera, suivant les années nommée, animatrice, conductrice des travaux de jardin, assistante du docteur au dispensaire. La confiance, lui est accordé. Elle est valorisée. Elle ne sera plus un numéro.
Cette lecture m'a plu. C'est dans mes affinités. Il n'y a pas de bons ou mauvais goûts. A chacun les siens.
Après quelques recherches web au sujet de Béatrice, j'apprends avec stupéfaction qu'elle est décédée à l'âge de 48 ans. Elle a été retrouvée morte à son domicile. Elle a surmonté tant de choses au cours d'une longue détention et après la chute. Inimaginable ! Elle était anorexique, alcoolique. Comme tous les prisonniers, elle n'était pas préparée à sortir après une longue détention. Elle n'a pas supporté le décès de sa grand-mère, mère, le père Jean et soeur Nicole qui l'ont soutenue lors de sa détention.
Bien conscient que nous avons tous nos limites, et que nous sommes inégaux devant le destin, Béatrice, je t'admire.