6 juin 1939, quelques mois avant le début de la deuxième tuerie mondiale, 2 jeunes femmes partent en bagnole de Genève en Suisse à Kaboul en Afghanistan.
Les voyageuses sont :
-
Annemarie Schwarzenbach, 31 ans, écrivaine, photographe, journaliste et aventurière suisse ;
-
Ella Maillart, 36 ans, exploratrice, écrivaine et photographe suisse.
La voiture : une Ford Deluxe, modèle 1937, cabriolet, 2 portes, 8 cylindres en V.
J'ai ajouté une photo des 2 dames à bord de leur bolide en route pour l'Afghanistan.
De ce périple surprenant existent 2 témoignages, le présent livre sorti, à titre posthume en version originale en l'an 2000 et d'
Ella Maillart "
La voie cruelle", initialement publié en 1947 et réédité en 1952.
En hommage à ces 2 découvreuses, les Belges
Gaea Schoeters et
Trui Hanoulle, sont parties à moto (des Suzukis Dr 650 SE) à Sanaa au Yémen en passant par l'Iran, le Turkménistan, le Tadjikistan et 6 autres pays musulmans en 1999. de cette exploration, 60 ans après les Suissesses, couvrant 30.000 kilomètres, elles ont publié en 2018 un magnifique album "Meisjes, moslims en motoren" (Filles, musulmans et motos, hélas pas traduit en Français).
Avant même de partir
Annemarie Schwarzenbach avait noté : "Pourquoi quittons-nous le plus beau pays du monde ? Qu'est-ce qui nous pousse à aller vers l'est sur des routes désertes ?"
En effet, pourquoi ?
Pour les 2, il y a eu avant tout le goût prononcé de l'aventure et le besoin d'exploration.
Ella Maillart (1903-1997) avait déjà traversé l'Asie centrale soviétique et visité le Mandchoukuo, la Chine et différents pays du Moyen-Orient.
Annemarie Schwarzenbach (1908-1942) avait elle aussi déjà voyagé en Iran en 1933, où à Téhéran elle avait épousé en 1935 le diplomate français
Achille Clarac (1903-1999). Comme indiqué dans ma critique du 14 mai 2019 de son livre "
La mort en Perse", elle ne supportait pas la pression d'une famille richissime et écrasante. En plus, elle ressentait comme lesbienne des difficultés dans son entourage et souffrait d'une addiction à la morphine.
L'ouvrage, qui compte 188 pages, est structuré en chapitres relativement courts, sous forme d'articles parus dans la presse, principalement le "National-Zeitung" de Bâle et le "Luzerner Tagblatt, en 1939-1940, ainsi que des textes manuscrits découverts après sa mort. Ces chapitres vont des frontières des Balkans, jusqu'à la route de Peshawar en passant par l'Ararat, la steppe entre la Perse et l'Afghanistan, Kaboul, la traversée du Canal de Suez, etc.
En fin de volume figure une charmante postface de 22 pages par
Roger Perret, auteur d'une anthologie de la poésie suisse moderne, écrit en l'an 2000 et qui fait le point de cette expédition extraordinaire.
Une carte géographique sur 2 pages, tout au début de l'ouvrage, permet aux lectrices et lecteurs de suivre pas à pas l'exploit remarquable de ces vagabondes courageuses.
Quant au style et écriture,
Annemarie Schwarzenbach, qui a obtenu à 23 ans un doctorat en histoire et littérature à l'université de Zurich, savait manier la plume de façon agréable à lire.
Comme dépaysement l'on peut difficilement imaginer mieux que ce récit palpitant.
Dommage que l'auteure soit décédée si jeune, à l'âge de 34 ans.