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EAN : 9782757829813
656 pages
Points (08/11/2012)
4.59/5   11 notes
Résumé :
Ce livre, en tout point exceptionnel, est le fruit de plusieurs années de travail dans le cadre d'un programme de recherche au CNRS. Il propose une approche résolument transdisciplinaire et comparative pour tenter de " penser " les processus de violence qui aboutissent aux massacres et aux génocides de l'époque moderne. Comment de tels crimes de masse sont-ils possibles ? Quelles manipulations du langage et des esprits interviennent pour préparer le " passage à l'ac... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Ce livre est extrêmement détaillé, Jacques Semelin appuie son analyse sur 3 grands massacres: celui des juifs par les nazis, celui des Tutsi par les Hutu et celui des musulmans de Bosnie par les nationalistes serbes.

 Il fait ressortir des mécanismes communs tout en montrant que chaque massacre présente ses spécificités dû au contexte socio-politique, l'histoire du pays...

Même si certaines notions de sciences sociales sont difficiles à appréhender (il y a beaucoup de nuances), l'auteur utilse un fil conducteur et un style qui les rendent relativement accessibles au lecteur.

Quand on voit les évènements actuels, la montée du nationalisme et des partis politiques d'extrême droite partout en Europe (et pas que...), on s'aperçoit que certaines dynamiques, malgré la politique du "plus jamais ça" se répètent et cela force à la réflexion.

A la fin de l'ouvrage, Jacques Semelin livre une analyse vraiment intéressante sur le terrorisme ce qui m'a donné l'envie de lire plus d'ouvrages sur la question.

 Cette lecture est une piqure de rappel nécessaire, qui reste accessible au plus grand nombre. J'y ai beaucoup appris notamment sur le conflit en ex-Yougoslavie.
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Jacques Sémelin est sociologue et se livre ici à une comparaison/analyse extrêmement fouillée de la Shoah, du massacre des Bosniaques et de celui des Tutsis.
Pour en dégager des lois, malheureusement universelles.
Première d'entre elles, le mécanisme du "bouc émissaire" (voir ci-dessous).
Ensuite, le mythe de la "société parfaite", qui naîtra du massacre des boucs émissaires (massacre qui permettra aux membres du groupe de s'unir et de se "purifier") sous... la direction éclairée du "grand leader" (évidemment).
Tout le processus est précédé par les élucubrations idéologiques des "intellectuels" du parti, des nervis (les SS, les hooligans serbes...) initient le cycle de la violence, puis c'est l'engrenage : les journalistes hurlent avec les loups, les arrivistes suivent le mouvement, les bureaucrates obéissent aux ordres, les têtes brûlées satisfont leurs instincts sadiques, les élites détournent le regard ...
Vraiment un grand livre.
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
En fin de compte, l'incapacité de l'État souverain moderne à tolérer d'importantes minorités à l'intérieur de ses frontières conduit soit à des programmes d'assimilation forcée, soit à des opérations de « nettoyage ethnique ». Tout dépend des circonstances politiques et du contexte historique. Mais cette ardeur à rendre homogène traverse toute l'histoire du XXe siècle. Comment alors ne pas inscrire le développement de cet État, aux ambitions totalisantes, dans une histoire plus longue, telle que Michel Foucault l'a mise au jour? En particulier, je pense ici à ses analyses sur la naissance d'un « bio-pouvoir » incarné dans cet État qui surveille, contrôle, intervient dans la vie des familles,identifie et met à l'écart les populations dangereuses, etc. Or le XXe siècle donne précisément à voir bien davantage que la mise en place de ce contrôle social des corps. L'État ne s'y contente plus de « surveiller et punir ».
Avec la multiplication des pratiques de « nettoyage ethnique », il franchit une nouvelle étape au XXe siècle : celle de purifier et chasser les population jugées indésirables ou dangereuses. Car l'État s'autorise désormais à découper le corps social : il en rabote les aspérités, en enlève les éléments contagieux et impurs, à moins qu'il ne les écrase sans plus de scrupules ; bref, il modèle le corps social à sa façon, à son idée. Il peut d'autant plus faire ce travail de jardinier, ou plutôt de chirurgien, du politique qu'il dispose désormais de nouveaux instruments d'identification et de dénombrement (comme la statistique pour connaître la masse et agir sur elle à sa guise). Jamais auparavant les pouvoirs n'ont pu en effet disposer de ces outils puissants permettant de gérer les masses (administration), de leur parler (radio), de les déplacer (trains). En vue de ce grand refaçonnage politique, on voit donc apparaître une nouvelle forme d'ingénierie sociale, qui ne consiste plus seulement à soumettre un peuple rebelle (comme on l'a vu précédemment), mais bien à le découper, à en détacher les éléments indésirables, à les déposer, quitte à les laisser mourir en chemin.
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De même, Christopher Browning estime que, chez les policiers allemands du 101e bataillon, « pitié et brutalité peuvent coexister dans le même individu et au même moment. » Cette imbrication, remarque-t-il, est très difficile à admettre. Nous avons en effet beaucoup de difficultés à ne pas voir le bourreau constitué d'un seul bloc monstrueux, incarnation personnifiée du mal. Mais nous sommes dans l'erreur : c'est là que réside le plus souvent notre plus grande résistance à comprendre le mal. Pour nous rassurer, nous voudrions que les choses soient nettes, bien tranchées. Cette conviction est d'autant plus puissante qu'elle provient en droite ligne de l'enfance, où régnaient alors – nous y croyions dur comme fer – les bons et les méchants. Mais non, ce n'est pas toute à fait comme cela que les êtres humains se conduisent. Même les bourreaux peuvent avoir des conduites inattendues, des comportements doubles où l'espace d'un instant, surgira une étincelle d'humanité. Inversement, même ceux qui semblent du côté du bien, qui ont sauvé des vies, ont pu – à un autre moment de leur existence – avoir des attitudes blâmables.
La nature morale d'un acte ne définit jamais totalement l'identité morale de l'auteur de cet acte. C'est à propos de Kurt Gerstein, cet ingénieur des mines allemand qui fut le témoin oculaire du gazage des juifs et qui en a transmis la nouvelle aux Alliés, que Saul Friedlander a parlé de « ambiguïté du bien ». Dans certaines circonstances, écrit-il, « le résistant peut paraître proche du bourreau ». On pourrait renverser la formule et soutenir aussi que, dans certaines circonstances, le bourreau peut avoir une pratique limitée du sauvetage. Il y a lieu en ce cas de parler « d'ambiguïté du mal », ayant à l'esprit ce résidu d'humanité qui reste dans la psychologie du bourreau quand le tueur se fait protecteur, ne serait-ce que d'une vie.
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L'approche « structuraliste » consiste à s'interroger d'abord sur la nature même des principes juridiques qui régissent le système international. Celui-ci n'est-il pas conçu de telle manière qu'il laisse faire le massacre et même qu'il rende licite le massacre d’État ? Selon le principe de l’État souverain territorial, qui se développe à partir du traité de Westphalie de 1648, l’État peut faire ce que bon lui semble à l'intérieur de ses frontières. Pour le sociologue américain Leo Kuper, pionnier des études comparées sur le génocide, « il n'y a pas de doute : l’État souverain territorial revendique, comme une partie intégrante de sa souveraineté, le droit de commettre des génocides ou d'entreprendre des massacres génocidaires contre des populations sous sa domination, et les Nations unies, pour toutes sortes de raisons pratiques, défendent ce droit ». Bien entendu, précise-t-il, « aucun État ne revendique explicitement un tel droit – cela ne serait pas acceptable moralement, même dans les cercles internationaux -, mais ce droit s'exerce sous d'autres prétextes, principalement à travers le devoir de maintenir la loi et l'ordre ou la prétendue mission sacrée de défendre le territoire de l’État ». Et de citer comme exemples les massacres des Indiens Aché au Paraguay, ceux perpétrés par Amin Dada en Ouganda ou par Pol-Pot au Cambodge.
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Or la guerre aussi a une histoire. Dans quelle mesure cette histoire pèse-t-elle sur ce qui se joue alors à Berlin, Belgrade ou Kigali ? Bien souvent, l'histoire de la guerre a été racontée comme une épopée, à l'instar du grec Homère, ou pensée du point de vue de la stratégie, comme, en des temps tout aussi anciens, par le chinois Sun Tse. De manière plus provocante, on pourrait parler de l'histoire d'amour que les hommes entretiennent avec la guerre. Qu'on le déplore ou non, les hommes, du moins certains d'entre eux, aiment faire la guerre. Il ne sert à rien de nier ce penchant de l'être humain à chercher dans la guerre tout autant la gloire que la mort. «Il faut garder à l'esprit, écrit l'historien militaire israélien Martin Van Creveld, que le combat a souvent été considéré non pas comme un simple spectacle, mais comme le plus grand de tous.»
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Mais, dans les faits, les Alliés ne prennent aucune mesure spécifique visant à enrayer l'action des nazis, bien que d'autres rapports leur arrivent en 1943 et 1944, y compris sur le fonctionnement d'Auschwitz. Pour les organisation juives, le but n'est plus alors de faire connaître, mais de faire agir. Lorsque les nazis prennent le contrôle direct de la Hongrie, plus aucun doute n'est permis quant au sort qui attend les juifs de ce pays. L'Agence juive de Jérusalem demande donc à Londres de bombarder les voies ferrées conduisant à Auschwitz. Mais la Royal Air Force répond que l'opération est techniquement impossible. Pourtant des documents attestent que l'aviation britannique est venue bombarder une usine d'armement située non loin du camp. Cette passivité des Alliés, moralement choquante, a suscité de nombreuses controverses, y compris aux États-Unis, sur les raisons de cet « abandon » des juifs. La seule « explication » qui vaille est de nature stratégique : les Alliés sont engagés en 1942 dans une guerre totale contre les puissances de l'Axe, qu'ils ne sont pas certains de gagner. Leur principal but est donc de réunir le maximum de forces pour détruire les machines de guerre allemande et japonaise. Dans ce contexte de guerre totale, Auschwitz ne représente pas à leurs yeux d'intérêt stratégique.
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Vidéo de Jacques Semelin
Jacques Semelin vous présente son ouvrage "Une énigme française : pourquoi les trois quarts des Juifs en France n'ont pas été déportés " aux éditions Albin Michel. Rentrée Sciences-Humaines janvier 2022.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2587296/jacques-semelin-une-enigme-francaise-pourquoi-les-trois-quarts-des-juifs-en-france-n-ont-pas-ete-deportes
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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