Au fond, trouvant Ric HOCHET (je veux dire : "Les enquêtes de Ric Hochet" par A.-P. DUCHÂTEAU au scénario, TIBET aux dessins,
MITTEI aux décors) fichtrement plus intéressant que
Jean-Luc GODARD (je veux dire : "Les films de J.-L.
Godard")... « Et c'est ce que nous allons voir...» ["Docteur Renaud, Mister Renard", Renaud SECHAN, 2002]. Et une rime, une !
Une pause sur l'illustration de couverture : magistrale.
Un motard de la Police se fait envoyer en l'air par un chauffard : un type en Porsche jaune... Et l'on reconnaît ledit chauffard : cheveux blonds en brosse coiffés en boule. le journaliste Ric Hochet... Et il semble sourire, l'arsouille, d'un sourire sournois, lèvres serrées, sourcils froncés : quelle honte ! Son visage est surexposé malgré le contrejour des phares allumés en cette heure entre chien et loup... Et ce motard aux bottes noires bien cirées et la veste de cuir impeccable, envoyé les quatre fers en l'air, tel un pantin désarticulé : "LA POLICE EST TUEE !", Au secours !!!
Sauf que non.
Le motard est une crapule qui a tapé dans le stock du magasin des costumes (on dirait un de ces films franchouilles "d'époque" où il faut rendre les habits sans une trace de boue ou de crasse à la costumière ; même si l'on incarne un "perso" ou un figurant en Bretagne crottée du XIXème siècle...) Un faux policier qui tuerait bien son monde, donc...
Et Ric est porteur d'une rançon (100 millions d'anciens francs, tout de même !) pour sauver une VRAIE femme : une autre vedette du show-biz... Une dénommée "Gigi"... pour J. J., les initiales de ses prénom et patronyme "Janice Joël" et non "Janis Joplin", dommage ! C'était la rivale de "B.B." à l'époque, saviez pas ?
Damné show-biz qui nous ramène doucement au cinoche, n'ayez crainte !
Car on y croise, devinez qui ? "B.B.", justement (et non "C.C.",
Claudia Cardinale, dommage encore !) :
Brigitte Bardot, vous savez, l'assez peu talentueuse actrice au jeu exécrable [Bah, il vous suffira de vérifier en endurant le visionnage du fameux "Le mépris" de J.-L.
Godard ou de "Et Dieu créa la femme..." de
Roger Vadim... et la pénibilité des répliques laborieusement balancées par la future admiratrice de la famille le Pen] . Sauf qu'il s'agit ici, dans ce seizième album de Ric, juste de sa statuette en cire volée par deux malfrats, sosies des acteurs Rufus et Michel Constantin... au Musée Grévin (avec son "CABINET FANTASTIQUE" et son "PALAIS DES MIRAGES", Hôtel Ronceray, 10 boulevard Montmartre à Paname... Ouf !!! On n'aura que la figure de cire de Bardot (muette, donc) sur le canapé des malfrats kidnappeurs de B.B. puis de J.J.
Le sosie de Rufus (nommé Bénatar) lui offre le champagne, la femme blonde aux lèvres pulpeuses ne lui répond pas grand chose : vaut mieux, vu le modèle... Comme quoi la cire est parfois préférable à la chair... Une exception quand même pour ce qui est de la trame des événements sensuels dans la très-très belle chanson de
Charles TRENET, "La polka du Roi" [1938], où ladite créature se met à fondre et fondre, juste serrée d'un peu trop près...
« Qu'est-ce que j'peux faire, j'sais pas quoi faire... » (une phrase de dialogue pour
Jean Seberg dans un film novateur et foutraque de J.-L.G.). Ric Hochet, lui au moins, il BOSSE !!! Il sauve les vedettes du show-biz... (au début, c'est vrai, il tente de sauver juste leurs figures de cire)... et il renverse les faux-motards de la Police... le commissaire Bourdon est évidemment sur les dents. Nadine (sa nièce) a une coupe de cheveux à la
France Gall, assez épatante pour tout dire. Elle saute au coup de Ric Hochet (ravi) quand il lui met sous le nez deux tickets pour une soirée à l'Opéra de Paris !!! On est contents pour Ric et Nadine.
Tout ça est rafraîchissant !
Ah, et en cette même planche 22, les éclairages somptueux de la Place de l'Opéra (Garnier) à la tombée de la nuit, avec les bus à l'ancienne qui glissent, noyés de lueurs de phares et de bruine parisienne : presque un tableau panoramique du génial et exigeant
Gustave CAILLEBOTTE (1848-1894) !!!
L'arrivée de nuit des deux malfrats par les toits en zinc autour du 10, boulevard Montmartre... Leur arrivée comique dans le Musée Grévin, où ils sont accueillis par un "Bébel" (... Jean-Paul Belmondo, z' avez entendu parler ?) en casquette de "Flic ou voyou" et faux Beretta dans sa pogne droite... En cire, heureusement ! Un faux policier qui regarde le mur du Musée au lieu d'arrêter les malfrats...
Et cadrages comme éclairages sont chiadés.
Et le prix Citron (de l'humour acide) décerné au Prof. Hermelin... Un véritable guet-apens où déboulent justement les deux Dupondt et le Cap' Haddock qui sont des malfrats masqués armés de mitraillettes : les journalistes croient évidemment à une blague (entièrement mise-en-scène par Hermelin, pas moins...). Mais tout faux ! Et la fiole d'Hermelin confrontée à son citron (lui qui croyait recevoir le Nobel de Physique...) : bien sûr inoubliable !!! « Humpffff, grotesque !!! » (Pas difficile de lire dans les pensées d'un prof' de Physique nucléaire se présentant toujours en blouse blanche — même lorsqu'il ouvre la porte de son pavillon de banlieue...).
Les titres des 6 parties de cette aventure sont ceux des films alors célèbres où plastronnait et glapissait la terrifiante "B.B."... A savoir : Chapitre I : "LA VERITE"/ Chapitre II : "L'OURS ET LA POUPEE" / Chapitre III : "UNE RAVISSANTE IDIOTE" / Chapitre IV : "LA FEMME ET LE PANTIN" / Chapitre V : "
EN CAS DE MALHEUR" / " Chapitre VI : "LES NOVICES"... Et le tour est joué... en ce Royaume des illusions qu'est le cinéma mâtiné de show-biz !
Bref, c'est un témoignage sur cette force encore vive des années soixante et soixante-dix en France parisiano-centrée, mille fois plus passionnant pour vous que les films du dit "J.-L.G., qui vous évitera de devoir vous ré-appuyer "A bout de souffle" (qui semblait assez frais dans le contexte du "cinéma de papa" mais, franchement, "Badlands"/ "La balade sauvage" [1973] de Terrence MALICK lui est dix-mille fois supérieur, poésie visuelle et mélodies des voix en plus : les prestations de Sissy Spacek et
Martin Sheen font vite oublier
Jean Seberg et Jean-Paul Belmondo) , "La Chinoise", "Pierrot le Fou" (couleurs crues moches, caméra qui tremblote, Bébel qui surjoue, visage peint en bleu), "Le Mépris" (avec Bardot plombant le film à peine sauvé par Piccoli, p'tit chapiôt sur la tête mais bien moins seyant et moins "classe" que celui du personnage de "Popeye" joué par
Gene Hackman dans le "French Connection" [1971] de
William FRIEDKIN)... Et il y a eu pire plus tard : "Passion" (seul film où je dûsse sortir de la salle après 15 minutes de projection, abasourdi par tant de prétention plombante, rageant et pestant contre les échos de branchouillardise connivente qui entouraient déjà religieusement ce machin...).
Bref,
Godard, si l'on s'en réfère à sa notoriété et ses obsèques , c'est "notre" Reine d'Angleterre ! Les meuh-dias rameutent : c'est leur boulot... Bref, tout le monde s'y met...
Me demande (innocemment) s'il y a eu un tel foin quand nos amis André-Paul (Duchâteau) et Tibet se sont tranquillement éteints : en fait, (évidemment) non !!! Ah, c'est ballot... Ce qui prouve que la branchouillitude sert au moins à quelque chose... C'est la France (ou la Suisse), que voulez-vous...
"Paris sera toujours Paris"...
Même si quelques méchantes langues (aigries) parlent d'Oppression parisienne... mais quel vilain pléonasme (pour ploucs et zilets-zônes) !!!
"Bruxelles, ma belle, je te rejoins bientôt
Aussitôt que Paris me trahit
Et je sens que son amour aigrit, et puis..."
[Dick ANNEGARN, "Bruxelles",1974]
Pourtant-pourtant, la science des "petits détails vrais" de nos amis créateurs de "Ric Hochet", c'est celle de [Georges]
SIMENON ( ... même prénom de Brassens, ouf !] : le passé revit et infuse lentement... et il est plein de charmes, de cabinets de figure de cire et d'intemporelle magie.
Bref, ce seizième album ricquien de 1973 est pas mal du tout !