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Anna Karénine tome 2 sur 3
EAN : SIE206716_978
Editions Baudelaire (01/01/1969)
4.29/5   158 notes
Résumé :
D'un pas rapide et léger, elle descendit les marches et, postée près de la voie, elle scruta les oeuvres basses du train qui la frôlait, les chaînes, les essieux, les grandes roues de fonte cherchant à mesurer de l'oeil la distance qui séparait les roues de devant de celles de derrière «Là, se dit-elle en fixant dans ce trou noir le traverses recouvertes de sable et de poussier là, au beau milieu; il sera puni et je serai délivrée de tous et de moi-même. »
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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Ca y est ! Je viens de finir le roman d'Anna Karenine. Depuis le temps que je voulais le lire, c'est pour moi une belle victoire.
Le nombre de pages, la peur de ne pas aimer à sa juste valeur ce grand roman, la pensée que l'écriture de Léon Tolstoï serait trop classique et vieillotte, trop lourde et ennuyeuse, toutes ces raisons m'ont incitée à repousser sans cesse cette lecture qui me faisait envie mais que j'appréhendais également.

*
Léon Tolstoï a un talent incroyable pour dessiner de sa jolie plume des personnages qui ont de la consistance.

Anna est une belle jeune femme raffinée qui abandonne son existence confortable d'épouse et de mère pour suivre le comte Vronsky, un officier de cavalerie.
Anna m'a plu par son caractère entier et honnête, son esprit combatif et provoquant, sa nature passionnée qui ne peut se satisfaire d'une vie rangée, ennuyeuse et vide de sens auprès d'un mari qu'elle n'aime pas.
Anna m'a touchée par ses douleurs intérieures, ses sombres pensées, ses incertitudes, sa jalousie maladive, son besoin viscéral d'être aimée, sa solitude et sa souffrance face au mépris affiché par ses amis ou connaissances.

*
Dans cette seconde partie, nous la découvrons exubérante dans ses émotions, ses sentiments et ses envies. Elle peut être d'humeur joyeuse et avenante, gaie comme un pinson, charmeuse, et puis, l'instant d'après, son regard se ferme, des idées obsédantes prennent le pas sur son esprit, tournant en boucle. Elle se montre alors inquiète, tourmentée, incertaine, jalouse, impulsive, irascible, froide, haineuse.
Léon Tolstoï saisit avec justesse ses états mentaux, ses émotions, ses sentiments tels que le désir, le bonheur, la jalousie, la haine, la honte, la peur d'être rejetée ou trahie, le besoin de vengeance ou de pardon. Ses colères irraisonnées l'emprisonnent, l'empêchent de communiquer jusqu'à la détruire.
C'est le récit d'une passion qui s'éteint, d'un désamour, d'une chute prévisible. Certains passages sont particulièrement poignants, douloureux, le désespoir d'Anna laissant une impression durable de profonde tristesse.

Le conte Vronsky quant à lui, n'est pas totalement satisfait et heureux de sa nouvelle vie. Vivre passionnément avec Anna n'est pas facile. Incapable de la rassurer, il aspire à retrouver sa liberté, la délaisse.

« Il avait beau depuis lors évoquer leur première rencontre, à la gare aussi ; chercher à la revoir dans sa beauté poétique et charmante, alors que, débordant de vie et de gaieté, elle allait au-devant du bonheur et savait le donner : c'était son image irritée et animée d'un implacable besoin de vengeance, qu'il revoyait toujours, et les joies du passé en restaient empoisonnées à jamais. »

*
D'autres personnages gravitent autour de la belle Anna et apportent leur part de bonheur et de malheur.
Le lecteur les accompagne dans les différentes étapes qui ponctuent le cours de leur vie, de la naissance à la mort pour certains. On les voit évoluer dans leur couple, débattre de politique, travailler, élever leurs enfants, aller dans la bonne société et converser. Il est question d'amour, de séduction, d'amitié, de dignité, d'honneur, de colère, de douleur.
L'auteur a une écriture qui sonde, avec beauté et perspicacité, l'âme humaine, faisant ressortir la noirceur comme la fragilité, la bonté, l'humanité ou les tourments de ses personnages.

« Toutes les familles heureuses se ressemblent. Chaque famille malheureuse, au contraire, l'est à sa façon. »

J'ai aimé retrouver le joli couple formé par Levine et Kitty. Leur bonheur simple est touchant et attendrissant.
Tolstoï exprime ses propres opinions à travers le personnage particulièrement attachant de Levine. Il tente de se comprendre, de comprendre les hommes et le monde qui l'entoure en exprimant son attachement pour la terre, en analysant et réfléchissant sur l'inaction des hommes politiques, la disparité entre la vie à la ville et à la campagne, les conditions de travail difficiles des paysans dans la Russie du XIXème siècle ou les questions relatives aux croyances et à la religion.
J'ai trouvé très intéressant les passages qui décrivent la vie quotidienne des Russes, mais d'autres m'ont un peu moins intéressée, en particulier les questions de politique ou d'agriculture que j'ai trouvées parfois trop développées.

Léon Tolstoï évoque également le statut des femmes à travers de très beaux personnages féminins, le sort le moins enviable étant sans contexte celui d'Anna dont l'attitude scandalise les cercles sociaux de Saint-Pétersbourg. La société impériale russe, patriarcale, hypocrite, intolérante, prompte à oublier les défaillances des hommes, n'admet pas l'émancipation des femmes.

Mais il est remarquable de voir que même si Anna n'est pas présente sur le devant de la scène, elle reste malgré tout, toujours dans nos pensées et dans celles des autres personnages du roman. C'est réellement un personnage fascinant que j'aurais tout de même aimé plus présente dans le roman.

*
Pour conclure, on présente souvent ce roman comme une histoire d'adultère, mais je trouve cette idée très restrictive.
C'est une superbe fresque, à la fois belle et tragique, que nous dépeint Léon Tolstoï. Il est un merveilleux observateur de la nature humaine. Attentif à mettre en avant les passions et les émotions humaines, il a su insuffler de la vie à ses personnages et nous emporter dans les méandres de leurs pensées, nous faisant partager leurs réflexions intimes, dévoilant leurs motivations et apportant en définitive, avec beaucoup de subtilité, une certaine tension et du mystère autour d'Anna Karenine.

Pour ma part, je suis heureuse de l'avoir rencontrée. Je la quitte après plusieurs mois de lecture audio, avec un sentiment de vide et de tristesse. J'aurais tant aimé que son choix de vie lui apporte le bonheur.
Le personnage d'Anna restera toujours présent dans ma tête, sa vie, sa mort tragique, m'ont énormément touchée. Il existe des romans que l'on garde en mémoire et Anna Karenine fera partie de ces héroïnes tragiques qui ne peuvent être oubliées.

« Je t'aime et t'ai toujours aimée ; lorsqu'on aime ainsi une personne, on l'aime telle qu'elle est, non telle qu'on la voudrait. »
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J'ai entendu quelques parts ("Le Patient anglais") que le coeur est un organe de feu. Je présume que cela voulait dire qu'à la fois il nous procure chaleur et quiétude mais aussi douleurs et peines. Anna Karenine est un livre sur deux voies, deux itinéraires de deux coeurs (et on découvre cela clairement à la fin de la lecture) celui d'Anna Arkadiévna et celui de Constantin Lévine. Un coeur qui a mené à la paix de l'âme et l'amour de tous, et un coeur qui a conduit à la haine et au désespoir.

Pour ce faire, il fallait tout un décor pour voir ce mouvement des deux coeurs (comme l'astuce des nuages derrière les avions dans l'un des films de Howard Hughes montrant le mouvement avec plus de réalité). le mouvement du coeur d'Anna a commencé par un regard et un friselis ; un sentiment d'euphorie à la découverte de l'amour après une existence misérable sentimentalement. Cet émoi devient une passion coupable. Par ailleurs, le chemin du coeur de Lévine est tout le contraire. C'est à la fin du parcours qu'arrive ce coup de foudre (fortuit ? aucunement, il s'agit d'un résultat) qui lui apporte un éclaircissement pour comprendre le sens de sa vie et lui fait découvrir le but de son existence.

Ainsi Anna Arkadiévna dans le second tome essaie de rendre sa situation plus acceptable au vue de la société hypocrite qui l'entoure. Les femmes la condamnant non pas parce qu'elle mène une relation adultère mais parce qu'elles n'ont pu l'imiter et acceptent de vivre dans le chagrin et l'ennui de leur ménage. Son coeur cherche le confort et le bonheur dans cet amour coupable. Mais elle ne peut le faire ; elle perd ce qui a le plus compté pour elle au début. Elle a perdu la foi, sa conviction que Vronski l'aimait, que les sacrifices peuvent lui apporter le bonheur auquel elle aspirait, que tout pouvait aller comme elle le désirait. Elle n'en pouvait plus !

Du côté de chez Lévine c'était différent. Ses relations avec le monde était difficiles ; nébuleuses. Sa vie interne et ses opinions singulières ne pouvaient le rapprocher des communs. Il n'était pas le meilleur des hommes (il le sait et ne le nie pas) mais il était différent. Il a vécu ce tiraillement entre la tentation de se frotter à la société qui l'entourait et l'appel de la solitude. Il cherchait où réside le sens de son existence et la paix de l'âme qui en résulte. A la compagne, aux champs, à la ville, dans les bals, dans les discussions et la vie mondaine ; partout il a cherché. Et comme pour l'inspiration, cette illumination est venue au moment qu'il ne s'y attendait plus !

Tout au long du roman, Tolstoï expose les idées les plus singulières sur le mariage, l'éducation, les relations humaines, l'art contemporain, la politique, la religion, la guerre…variant les points de vue selon ses personnages, et menant les oppositions dans les dialogues et les pensées internes. Avec art, il a su amuser son lecteur avec les épisodes les plus divers (partie de chasse, visite chez le portraitiste, maladie du frère de Lévine, aveu d'amour manqué de l'autre frère, les scènes de ménage entre Vronski et Anna, la découverte de la foi de Karénine, la visite de Stiva chez ce dernier, l'accouchement de Kitty, les crises de jalousie de Lévine, sa visite chez Anna, le désespoir de cette dernière et sa visite de la gare, les pensées de Lévine à la fin et sa discussion avec son frère concernant la guerre…) introduisant à chaque fois un nouvel invité. Deleuze dit dans son Abécédaire qu'on apprécie les gens par leur sens de l'humour, celui de Tolstoï est d'une finesse sublime. du reste, l'auteur russe ; en pleine possession de ses talents exprime et dépeint le tragique et le comique avec beaucoup de justesse et de profondeur, sans jamais exagérer ; ainsi la scène finale de la septième partie est un sommet du pathétique, alors que celle de Stiva qui s'endort devant les sermons de Lydie est hilarante.

Ce qui fait de ce roman une oeuvre universelle, intemporelle et immortelle est le fait de présenter les événements et les conflits humains ainsi que les sentiments profonds d'une manière qui parle à tous et qui touche les lecteurs les plus différents.
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C'était donc avec enthousiasme que je m'attaquais à ce tome 2.
Cela commençait bien, avec Levine et Kitty pour qui, je l'avoue, j'ai une petite faiblesse de coeur, Levine étant mon personnage préféré dans tous ceux que j'ai croisés ici, criant de la vérité autobiographique de Tolstoï, forcément...

Cependant, au fur et à mesure que j'avançais, j'ai eu de plus en plus de mal à reprendre ce livre... En fait, tous les passages avec Anna et Vronski ont commencé à m'agacer sérieusement, j'ai trouvé Anna de plus en plus désagréable et incohérente. Je sais, c'est pas la réaction la plus évidente (j'ai vu passer pas mal d'empathie et de compréhension pour elle, mais moi j'ai juste eu envie de lui fiche des baffes pendant tout le second tome), mais c'est la mienne. J'ai davantage compris les réactions de Vronski face à son délire, j'ai donc eu plus de compassion pour lui que pour elle... Ce qui est plus ou moins le monde à l'envers, vu qu'au départ, Anna, éprise de vérité et de liberté, me plaisait vraiment beaucoup, et que je trouvais Vronski superficiel et antipathique.

Je sais pourquoi, hein. C'est pas un secret. J'ai un vécu difficile face au chantage au suicide et à la souffrance et au chantage à l'amour, "si tu m'aimais tu serais..." qui fait que... Merci papa merci maman... La liberté, ça vaut pour tout le monde, et pas que pour soi, madame Karénine "je vois que mon nombril". C'est pas parce qu'on a souffert et qu'on souffre que ça nous donne tous les droits, non mais... C'est un bouquin qui parle aux tripes, hein ! ;-)

Du coup, j'ai pas mal galéré sur ce second tome.
Jusqu'à ce que je réalise (à partir des 3/4 du tome) que c'était voulu par Tolstoï. Non mais quel talent !!!

Pour finir, le personnage principal de ce roman, c'est l'aristocratie russe, la société russe que nous décrit Tolstoï avec tant de brio... Anna n'en est qu'une infime poussière qui cristallise tout ce qu'elle a de dramatique et de faux, de "paraître", en étant elle-même un archétype des contradictions, voire de la folie que peut engendrer la vie dans de telles conditions. Une simple poussière balayée par le vent, comme en témoignent les derniers chapitres, qui m'ont été un vrai pensum à lire, sisi, mais je tenais à aller jusqu'au bout, j'allais pas m'arrêter à quelques pages du mot "Fin" !

Bref, malgré mes difficultés, je ne peux que saluer l'immense talent de Tolstoï, ressentir tant d'émotions diverses intenses quand on lit un livre, ce n'est pas si courant.
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Anna Karénine, tome II
Léon Tolstoï, 1873-1875, Iasnaïa Poliana

Autant j'abdique pour résumer Anna Karénine, cette oeuvre charnelle immense d'un des plus grands écrivains que la terre ait jamais portés, que je vois comme Maillet-Joris, Anna Karénine c'est Tolstoï dans sa démesure, se cassant le nez sur l'inaccessibilité de la femme et sur la vérité des hommes jusqu'à sa mort, autant je crois possible d'aborder Tolstoï, non par sa face nord, mais humblement, par le détour d'une séquence où il nous surprend toujours, étant sûr de ce qu'on peut dire sur lui, d'ailleurs comme lui quand il disait : " Il ne faut écrire que lorsqu'on sent en soi quelque chose d'absolument nouveau, d'important, qu'on voit mais qui est inintelligible aux autres, et que le besoin d'exprimer cette chose ne vous laisse pas en repos"

Nous sommes dans le drame, la rupture entre les deux protagonistes Anna et Vronski se consomme sous nos yeux ; extérieurement c'est à peine perceptible, il faut suivre ici ! Un petit détail très tolstoïen dans sa manière d'éclairer la scène, manifestement plus littéraire que théâtrale, nous renseigne sur l'état de leur relation :

"Elle avala quelques gorgées de café : le bruit de ses lèvres et le geste de sa main qui tenait la tasse le doigt levé agaçaient évidemment Vronski ; elle s'en aperçut en lui jetant un regard à la dérobée".

On se souvient qu'un autre détail ainsi avait cristallisé le sentiment cette fois en amont de leur relation, après une conversation nocturne entre elle et lui, quand elle regarde du wagon la gare de Petersbourg, où elle se rend compte soudain que Karénine, c'est frappant, a les oreilles décollées.

Ainsi, il en va de la vie des hommes. Perso, je n'ai pas vu en lisant cela le drame égal pour les deux protagonistes -est-il égal une fois d'ailleurs, oui comme le temps d'un baiser à la Munch ? C'est la chute immanquable pour Anna ; quant à Vronski, Tolstoï a un regard plus détaché, presque indigne de considération tant la différence est frappante : le beau rôle dans sa détresse est celui d'Anna. C'est aussi une pierre dans le jardin de ceux qui osent conclure que Tolstoï était misogyne.

Que reste-t-il de cette relation ? Comme le vers du poète : "Seule la rose est assez fragile pour exprimer l'éternité"

Georg Lukacs le philosophe dans son Tolstoï dit à ce propos des choses avec ravissement et pertinence :
" de tels détails sont dramatiques au sens le plus profond du terme : ce sont des objectivations visibles, palpables, vécues violemment, de tournants spirituels significatifs dans la vie des hommes. c'est pourquoi ils n'ont rien de la mesquinerie des détails, aussi parfaitement observés soient-ils, des écrivains récents, détails qui en soi ne sont que des observations, mais n'ont pas de véritable fonction dans l'action. C'est justement la spécificité de Tolstoï que de permettre, par une concentration de la sorte, d'intégrer de telles scènes, avec leur dynamique dramatique interne, dans le grand flot large et tranquille du récit. Elles animent ce flot, elles le structurent, sans empêcher son écoulement ultérieur large et tranquille .."

Je me permettrais votre honneur, Monsieur le philosophe juste d'appuyer votre analyse sur un point : "le détail n'était chargé de n'intégrer de telles scènes", il était l'éclairage de la scène, nullement descriptif, impressionniste ..
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Nous étions restés à la fin du premier tome à la fuite d'Anna Karénine avec le comte Vronski et à l'annonce du mariage de Kitty et Lévine. Six semaines se sont écoulées. Ici, nous allons suivre chacun des couples en parallèle.

Constantin Lévine a épousé sa bien-aimée dans une église bondée. Kitty, rappelons-le, avait été amoureuse de Vronski jusqu'à ce que le monde apprenne sa passion pour Anna. Les époux s'en sont retournés à la campagne où ils découvrent que la vie de couple n'est pas exactement conforme à leurs attentes. On ne vit pas que d'amour et d'eau fraîche, il faut aussi penser aux problèmes matériels.
L'arrivée d'un bébé et des questionnements métaphysiques préoccupent Lévine. Ce n'est qu'à la fin du roman qu'il parvient à calmer son esprit agité. Malgré tout, Constantin et Catherine, qui s'aiment tendrement, sans manières, sont le seul couple qui tient la route, dans toute cette histoire !

Quant à Anna, nous la retrouvons alors qu'elle court l'Europe avec Alexis. Elle a abandonné son mari et son fils, lui ses espoirs de carrière. Fuyant une société qui les désapprouvent, ils visitent la France, l'Allemagne, l'Italie... Hélas, on ne peut fuir éternellement et ils finissent par rentrer en Russie.
Ils s'installent à la campagne et entreprennent de transformer la propriété du comte en un oasis de luxe ; l'intérieur est ce que l'on fait de plus chic et de plus confortable, ils construisent un hôpital, aménagent le parc. Quand arrive l'hiver, il faut néanmoins aller vivre en ville.
Là, ils sont frappés de plein fouet par la position douloureuse d'Anna. Ses anciens amis l'ont abandonnée, des femmes aux moeurs dissolues la méprisent, on l'insulte au théâtre, la mère de Vronski ne l'apprécie pas. Rares sont ceux qui acceptent de la recevoir ou de lui rendre visite. Elle ne parvient qu'à grand peine à revoir son fils qui, bien évidemment, ne lui sera pas rendu, et elle ne parvient pas à aimer la fille de son amant.
Le comte Vronski tente par tous les moyens de la persuader d'écrire à Alexis Alexandrovitch pour demander le divorce. le mariage effacerait en partie leur faute. Cependant, des mois sont nécessaires à Anna pour accepter cette idée. En attendant, elle est malheureuse, terriblement malheureuse.
Amant et maitresse, après s'être construit une bulle de passion, reviennent à la réalité. Elle a tout quitté pour suivre Alexis, elle n'a plus rien ni personne, elle est dans une solitude extrême, une paria aux yeux du monde ; lui s'est fermé des portes en enlevant cette femme à son mari, il en souffre et, en même temps, il a bien conscience d'être responsable de leur malheur. On devine le dénouement dès les premières pages du roman. Anna Karénine, c'est un peu la Belle du seigneur russe du XIXème siècle ! Après s'être offert des mois d'une passion qu'elle n'aurait jamais connue avec son mari, une seule issue s'offre à la pauvre Anna : le suicide.

Challenge ABC 2014/2015
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Citations et extraits (99) Voir plus Ajouter une citation
Lui, de son côté, ignorait ce qi se passait dans le coeur de la reine. Ces mots, il ne pouvait deviner qu'elle les eût entendus ; d'ailleurs, son esprit commençait à concevoir quelques espérances.

Comme nous l'avoua dit, Charny avait été envoyé d'avance pour explorer la route, et il avait rempli sa mission en conscience. Il savait donc quel était l'esprit du moindre village. Or, à Châlons, vieille ville sans commerce et peuplée des bourgeois, de rentiers, de gentilhommes, l'opinion était royaliste.
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La nuit était déjà venue, mais les chasseurs n’avaient pas encore sommeil. La conversation qui hésita d’abord entre les anecdotes concernant des souvenirs ou des exploits des chiens, et la chasse, tomba enfin sur un sujet qui les intéressait tous trois. L’enthousiasme que manifestait Vassenka pour la beauté de cette soirée, l’odeur du foin, la simplicité des paysans qui lui avaient offert de l’eau-de-vie, les chiens, chacun couché aux pieds de son maître, incitèrent Oblonski à raconter les délices, qu’il avait goûtées l’année précédente, au cours d’une chasse chez M. Malthus.

C’était un entrepreneur de chemin de fer, extrêmement riche. Stépan Arkadiévitch décrivit les immenses marais gardés dont cet homme était propriétaire dans la province de Tver, le luxe des voitures qui amenaient les chasseurs, les tentes dressées près des marais pour déjeuner.

- Je ne te comprends pas, dit Lévine se soulevant sur son foin. Comment ces gens-là ne te sont-ils pas odieux ? J’admets qu’il soit agréable de déjeuner au Laffitte, mais est-ce que précisément ce luxe ne te révolte pas ? Tous ces gens, comme jadis les fermiers généraux, s’enrichissent par les moyens méprisables ; ils se moquent du mépris public, sachant que leur argent, bien que mal acquis, les réhabilitera.

- C’est bien vrai ! s’écria Veslovski. Oblonski accepte leurs invitations par bonhomie, et les autres disent : » Mais puisque Oblonski vient chasser ! … «

- Pas du tout -- Lévine sentit qu’Oblonski souriait en prononçant ces mots -- si je vais chez eux, c’est que je ne les trouve pas plus malhonnêtes que n’importe quels riches marchands et gentilshommes. Les uns et les autres ont acquis également leur fortune par le travail et par l’intelligence.

- Oui, mais par quel travail ! Est-ce un travail de se procurer une succession pour la revendre ?

- Sans doute, en ce sens que si personne ne prenait cette peine, nous n’aurions pas de chemin de fer.

- Peux-tu comparer ce travail à celui d’un paysan ou d’un savant ?
- Non, mais il n’en reste pas moins un résultat -- les chemins de fer. Il est vrai que tu les trouves inutiles.
- Ceci est une autre question. Je suis prêt à admettre leur utilité. Mais toute rémunération disproportionnée au travail est malhonnête.
- Et qui sera chargé d’évaluer le travail ?
- L’acquisition de la fortune par des moyens malhonnêtes, par la ruse, continua Lévine, mais il se sentait incapable de définir, les fortunes acquises dans la banque -- est un mal. L’acquisition d’énormes fortunes, sans travail correspondant, existait au temps des fermiers généraux, mais la forme seule a changé : Le roi est mort vive, vive le roi ! Et de nos jours les chemins de fer, les banques, c’est aussi le pain sans travail.

294 - [Le Livre de Poche n° 638, tome II, p. 191]
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Vous montez à cheval en guêtres ? lui demanda Lévine, s’emparant d’une baguette qu’il avait cueillie le matin en faisant de la gymnastique.
— Oui, c’est plus propre », répondit Vassenka, achevant de boutonner sa guêtre.
C’était au fond un si bon enfant, que Lévine se sentit honteux en remarquant la soudaine timidité de son hôte.
« Je voulais… – il s’arrêta confus, mais continua en se rappelant sa scène avec Kitty… – je voulais vous dire que j’ai fait atteler.
— Pourquoi ? où allons-nous ? demanda Vassenka étonné.
— Pour vous mener à la gare, dit Lévine d’un air sombre.
— Partez-vous ? est-il survenu quelque chose ?
— Il est survenu que j’attends du monde, continua Lévine, cassant sa baguette de plus en plus vivement ; ou plutôt non, je n’attends personne, mais je vous prie de partir : interprétez mon impolitesse comme bon vous semblera. »
Vassenka se redressa avec dignité.
« Veuillez m’expliquer…
— Je n’explique rien, et vous ferez mieux de ne pas me questionner », dit Lévine lentement, tâchant de rester calme et d’arrêter le tremblement convulsif de ses traits, mais continuant à briser sa baguette. Le geste et la tension des muscles dont Vassenka avait éprouvé la vigueur le matin même, en faisant de la gymnastique, convainquirent celui-ci mieux que des paroles. Il haussa les épaules, sourit dédaigneusement, salua et dit :
« Pourrai-je voir Oblonsky ?
— Je vais vous l’envoyer, répondit Lévine, que ce haussement d’épaules n’offensa pas ; que lui reste-t-il d’autre à faire ? » pensa-t-il.
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« Il a découvert aux simples et aux enfants ce qu’il a caché aux sages », pensa Levine causant quelques moments après avec sa femme. – Ce n’est pas qu’il se crût un sage en citant ainsi l’Évangile ; mais, sans s’exagérer la portée de son intelligence, il ne pouvait douter que la pensée de la mort l’impressionnât autrement que sa femme et Agathe Mikhaïlovna. Cette pensée terrible, d’autres esprits virils l’avaient sondée comme lui, de toutes les forces de leur âme ; il avait lu leurs écrits, mais eux aussi ne semblaient pas en savoir aussi long que sa femme et sa vieille bonne. Ces deux personnes, si dissemblables du reste, avaient sous ce rapport une ressemblance parfaite. Toutes deux savaient, sans éprouver le moindre doute, le sens de la vie et de la mort, et, quoique certainement incapables de répondre aux questions qui fermentaient dans l’esprit de Levine, elles devaient s’expliquer de la même façon ces grands faits de la destinée humaine, et partager leur croyance à ce sujet avec des millions d’êtres humains. Pour preuve de leur familiarité avec la mort, elles savaient approcher les mourants, et ne les craignaient pas, tandis que Levine et ceux qui pouvaient, comme lui, longuement discourir sur le thème de la mort n’avaient pas eu ce courage et ne se sentaient pas capables de secourir un moribond ; seul auprès de son frère, Constantin se fût contenté de le regarder, et d’attendre sa fin avec épouvante, sans rien faire pour la retarder.
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- Anna Arcadievna fait dire qu'elle est partie pour le théâtre, annonça un domestique.
Yavshine versa encore un petit verre dans l'eau gazeuse, l'avala et se leva en boutonnant son uniforme.
- Eh bien ? Partons-nous ? dit-il, souriant à moitié sous ses longues moustaches, montrant ainsi qu'il comprenait la cause de la contrariété de Vronski, sans y attacher d'importance.
- Je n'irai pas, répondit Vronski tristement.
- Moi, j'ai promis, je dois y aller ; au revoir ! Si tu te ravises, prends le fauteuil de Krasinski qui est libre, ajouta-t-il en sortant.
-Non, j'ai à travailler.
"On a des ennuis avec sa femme, mais avec une maîtresse, c'est encore pis", pensa Yavshine en quittant l'hôtel.
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