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EAN : 9782358877299
416 pages
La manufacture de livres (04/03/2021)
4.22/5   34 notes
Résumé :
Julien Perrault a tout perdu en percutant deux de ses concurrents sur le circuit du Mans. Lui qui avait été le prodige du Grand Prix Moto est devenu le paria, «l’assassin». Mais un sponsor sulfureux propose au jeune homme de revenir sur le devant de la scène. Courir de nouveau. Seulement, son retour sur les circuits, Julien ne l’envisage plus seul. À ses côtés, dans l’équipe qui le préparera à la course, il comptera sur la psychiatre qui le suit depuis son accident,... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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"C'est un roman sur la vitesse qui commence lentement. C'est un roman noir avec un mort au début, mais tellement au début que c'est même avant. Et puis on sait qui a tué et pourquoi, assez tôt. C'était un accident, mais des accidents comme ça, certains ont vite fait de les qualifier d'assassinats.
Dernier tour lancé est un roman passionnant avec pour cadre l'univers des Grands Prix moto, avec pour personnage un coureur doué, peut-être même génial, mais dingue, ce qui est peut-être inévitable voire nécessaire pour réussir à aller si vite, et surtout poissard : rien ne va jamais, tout est toujours soumis à des aléas infimes et sans pitié. (...)
Julien Perrault est donc ce pilote doué, très rapide, que tous détestent, non seulement ses adversaires, mais aussi les organisateurs, les sponsors, les journalistes, les voisins de son pavillon où il habite avec son père mécanicien. C'est la scoumoune incarnée, l'ange noir qui fait peur à tous, qui excite évidemment toutes les curiosités, suscite toutes les interrogations, supputations, condamnations. Il a tellement peu de sponsors que sa combinaison et sa moto sont presque toutes noires, choix graphique assumé du propriétaire de l'écurie, qui joue là aussi son va-tout avant la faillite et les tribunaux de commerce, lui, le manipulateur en chef dans un univers qui en compte pas mal.
Comment remonter en selle quand on a une telle réputation ? de la même manière que le dernier capitaliste vendra la corde pour qu'on le pende, le dernier propriétaire de la dernière écurie est prêt à tenter un dernier coup de pute pour se relancer, trouver un dernier sponsor crédule, arnaquer Honda pour avoir des motos récentes en prétendant avoir des millions, cacher jusqu'au dernier moment qu'il a recruté pour pas cher le loser en chef, le gars le plus rapide et le plus dangereux, qui n'a encore rien gagné ou presque, mais qui fait des temps de folie, des records que même le numéro 1 du circuit n'atteint pas.
Mais Julien Perrault a du mal à revenir. Il sort d'hôpital, ses vertèbres sont cimentés, verrouillées par des plaques et des vis en titane, il n'est pas en forme même s'il a la rage. Les premiers essais ne sont pas concluants.(...)
Ce roman raconte la remontée de Julien, enfin essaye de nous la raconter parce que rien n'est simple et Antonin Varenne n'a pas l'intention de nous faire croire que ça va bien se passer. Les histoires de pilotes finissent-elles mal en général ? Peut-être pas, ça dépend.
Derrière Julien, de beaux personnages secondaires sont présents, son père, mécanicien dévoué à son fils, François, rescapé d'hôpital psychiatrique et admirateur inconditionnel, Emmanuelle, psychiatre en rupture de ban, qui essaye de donner du sens à ce qui n'en a pas, de comprendre comment fonctionne cette famille, quels secrets elle cache, qui les découvre et ne sait pas quoi en faire.
Dernier tour lancé est un excellent roman, avec une écriture précise et efficace, des effets réussis et beaucoup de sensibilité, un rythme qui s'accélère à mesure qu'on avance. Un roman à lire même si on n'aime pas la mécanique, les motos et les cinglés qui les conduisent."

François Muratet pour Double Marge (Extrait)




Lien : https://doublemarge.com/dern..
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" Dernier tour lancé ", note moyenne sur Babelio , 4,25 . Pas mal du tout , non ? Oui mais 20 notes seulement , ça fait un peu " misère " pour un auteur du niveau d'Antonin Varenne ... Remarquez , ça ne devrait pas trop m'étonner car le thème des sports mécaniques évoqué dans le titre et la couverture , ça peut " faire peur " , si , si . La preuve c'est que je n'envisageais pas , mais pas du tout de le lire , ce bouquin jusqu'a ce que mon ami Nicolas , le libraire dont je vous ai déjà parlé ne nous le présente lors d'une soirée lecture qu'il anime régulièrement et ...brillamment , pour notre plus grand plaisir.

Le contexte : une future star des circuits motos veut revenir au top niveau après un terrible accident qui l'a profondement touché , aussi bien physiquement que psychologiquement puisqu' il s'est trouvé responsable de la mort d'un de ses adversaires et la paralysie d'un autre . Pour l'accompagner dans cette reconquête, il pourra compter sur l'aide de François, un peintre quelque peu " fantaisiste " rencontré à l'hôpital et celle d' Emmanuelle , leur médecin psychiatre en mal de renouveau dans sa vie . le trio deviendra quatuor avec Alain Perrault , le père de Julien , veuf et analphabète, " détail " d'une importance capitale tout au long du récit .
Oserai- je mentionner " Santa Krauss " , le " sympathique "mécène.?..Non , je n'ose pas , débrouillez- vous ...A lui seul , un reflet du " milieu ".

Voilà , vous allez me dire que le scénario est " cousu de fil blanc " , qu'il ne faut pas vous prendre pour " des perdreaux de l'année ", que oui , après des épreuves terribles , le héros ....Oh !Stop !Vous vous souvenez du nom de l'auteur ? Oui , Varenne ! Ceux qui le lisent le savent : pour " le cousu de fil blanc " , vous pouvez revoir votre copie et ranger votre petit sourire en coin . Varenne , c'est du lourd en matière de noirceur et ce roman ne va pas déroger à la règle.

Le quatuor va bel et bien évoluer dans le monde " pétaradant " du " Circus " , un monde prêt à " tourner casaque " ( c'est pour les chevaux , ça !!! ) dès que le fric inonde les débats et s'empare du pouvoir . Société où la haine succède aux vivats et vice -versa , plus vite que ne le ferait une Honda lancée à fond à l'amorce du dernier tour . " Tel qui rit vendredi , dimanche pleurera " .

Quel style , les amis .Je vous l'ai dit , c'est de " la première qualité ", de la dynamite , ça émeut , ça perturbe , ça effraie , ça choque .Mais qu'est ce que c'est bien.

Je vais aussi m'adresser plus spécialement à ceux et celles qui , comme moi , aiment se " vautrer " dans un roman noir pour en ressortir " perturbés , lessivés , exangues " . Procurez vous immédiatement ce roman , il vient de sortir en poche . Approchez- vous ( mais pas trop quand même ) de la piste avec ce quatuor qui n'a pas fini de vous interpeller , de susciter en vous une foule de sentiments . Anges ou démons ? Varenne malaxe ses personnages et cette histoire comme un boulanger d'exception " pétrit " sa pâte. Avec amour , passion , mais sans concession , jusqu'au bout .Et puis , voyez - vous , c'est tellement fort que je me demande si je ne vais pas m'intéresser au monde si particulier de la moto . A la vitesse où ça va , ça doit bien " faire de l'air " ? Et le moindre brin d'air , en ce moment ...On se comprend , non?
Moi , je transpire et je me demande si c'est à cause de la chaleur ou de l'ambiance terrible de ce roman . Et dire que j'ai bien failli passer à côté. Ah , la chance d'avoir un libraire de grande qualité.
Merci Nicolas et merci Antonin Varenne.
Allez , les amis et amies , le casque , les gants , le cuir et .......Mince , ils sont déjà partis ! J'y vais . A bientôt...peut - être.
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Julien Perrault est une légende dans le monde du GP. le numéro 5 connaît une ascension fulgurante, bat des records de vitesse sur les pistes du monde entier. Promis encore à de belles années... Jusqu'au jour du drame où, sur le circuit du Mans, il percute deux de ses concurrents. Franco Simonelli meurt sur le circuit, Edward Spies devient paraplégique. Si Julien s'en sort vivant, il subit de nombreuses opérations et est fortement marqué, brisé au point de faire une tentative de suicide à sa sortie. Trouvé à temps par son père, il est envoyé en hôpital psychiatrique. Suivi pendant des mois par le docteur Terracher, il ne cache pas son envie de sortir au plus vite, rentrer à Villeneuve-Lès-Maguelone, retrouver son père, Alain, et tenter un nouveau départ. Mais lui qui a la vitesse dans le sang, qui est monté sur sa première moto à l'âge de 5 ans, peut-il réellement tourner la page de ce qui l'anime ?

Nul besoin de tour de chauffe, encore moins d'aimer la moto ou les GP pour apprécier ce roman d'Antonin Varenne. Loin s'en faut. Car, outre le parcours sportif de Julien Perrault (de sa chute à sa nouvelle ascension en passant par sa reconstruction), l'auteur dépeint, avec finesse et intelligence, les relations particulières qui unissent le jeune homme et son père (un mécanicien très doué et analphabète qui a tout donné et fait pour lui), l'univers psychédélique de François, un patient de la clinique qui s'est pris d'affection pour Julien et vient habiter chez eux, le dévouement de la psychiatre, Emmanuelle Terracher, ainsi que ce monde bien particulier et ses coulisses que sont les GP. Et c'est la tête dans le guidon que l'on suit avidement et ardemment, les mains crispées sur le roman, l'histoire de cette légende et de ceux qui l'entourent. Des personnages fragiles, perdus ou passionnés, minutieusement dépeints. Aussi, Antonin Varenne mélange habilement les genres et nous entraîne dans une course effrénée, tragique et remarquable, portée par une écriture à la fois précise et sensible.
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Là c'est vraiment un roman noir grande vitesse. Adorée!
Le début est à couper le souffle, 5 premières pages placent un décor très alléchant. La présentation des personnages et leurs relations s'étalent le long de chapitres enivrants d'attachement. Un scénario jamais lu. Que de l'inédit ces pages pour moi. Ambiance GP inconnue qui m' emmène droit au coeur de la niche des sports mécaniques sponsorisés. Et leurs dessous dégueulasses. On passe par les circuits les plus prisés (Valencia, Jerez, Kuala Lumpur, Losail), l'adrénaline monte mais pas que là où on s'y attend, chaque personnage est si intelligemment placé que la tension est partout et de toute sorte. On arrive au Mans, le circuit Bugatti. Effleurer des champions hors normes.

Dévoré dans la journée, transpirante en fin de lecture, de la pure folie ces personnages! L'auteur n'a peur de rien, il les malmène, les affaiblie, les rend dingue tour à tour. Nous pointe des repartis très fines, une justesse dans les rapports humains que je ne pensais pas trouver ici, l'auteur a tout compris. Tout est absolument maitrisé, jusqu'au bout. Il n'a pas froid aux yeux. Et est prêt à tout pour nous garder en haleine.

La couverture vraiment cheap, et le résumé de la quatrième ne m'aurait pas du tout attiré; Merci JF de Babelio, critique qui m'a convulsivement poussé à l'ouvrir ;-) A présent je vais découvrir Antonin Varenne, confiance absolu en son talent d'écrivain.
Son sens des remerciements en fin de roman : "Faire des livres mange la vraie vie.
A la fin, il faudra justifier toute cette perte; lui trouver une raison solide d'avoir remplacé un seul petit moment passé avec un être vivant". Que dire de nous qui avons le nez dans le guidon?

Je ne suis pas prête de l'oublier!
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Quand j'ai lu le sujet du dernier roman d'Antonin Varenne j'avoue j'ai eu un moment d'hésitation
Je ne sais pas vous mais perso je n'aime pas le monde des sports mécaniques. D'abord il y a le bruit, le bruit infernal que font les moteurs vrombissants, moi qui aime le silence ou les bruits de la nature. Et au-delà de la pollution sonore il y a aussi la pollution tout court.
Et puis il y a tellement de fric dépenser dans ce sport. Oui je sais les afficionados auront d'autres arguments pour justifier tout cela. Mais perso, moi je n'y vois que du gâchis.
Il y a aussi cette débauche d'énergie. D'ailleurs en parlant d'énergie le livre d'Antonin Varenne n'en manque pas.
En effet notre auteur nous propose là un livre sur la passion dévorante d'un jeune homme qui est prêt à tout sacrifier pour vivre sa passion et vivre de sa passion. Et cette passion c'est la moto et les courses.

Julien Perrault, prodige du Grand prix de moto, a tout perdu en percutant deux de ses concurrents. Malgré l'accident, il fait tout pour revenir sur le devant de la scène. Il est entouré de sa psychiatre, de son père qui a construit ses premières motos et d'un peintre un peu fou devenu son ami.
Il y a là Julien est son père Alain, un duo, un couple soudé par la mort et l'absence de la mère de famille. Il y a là aussi pour former notre quatuor, Emmanuelle Terracher, la psy mais aussi François Buczek l'artiste maudit complétement accro à toutes les dopes. Ces deux là Julien les a rencontrés à la clinique des Chênes, un hôpital psychiatrique où il s'est reconstruit après son accident. Et ces quatre là forment une drôle de bande, totalement déglinguée. La bande des quatre est sans doute mal assorti mais elle est là pour faire vivre la passion, la folie de notre pilote moto et rien que pour cela. La passion d'un seul homme.
Aussi avec Antonin Varenne en va vivre de l'intérieur la vie des écuries de courses, on va participer à la préparation des machines, des équipes, des épiquement et autres équipementiers. Des sponsors, des mécaniciens, des patrons d'écurie, de média…des pilotes, et de l'argent qui circule lui aussi à grande vitesse dans ce monde du sport mécanique. de cette adrénaline et de cette dopamine qui coulent elles aussi à flot.
Antonin Varenne ne nous cache rien, on va être au première loge, tels des VIP, dans les padock. Ça sent la sueur, le cambouis, le fric aussi. Ça sent l'éloge de la vitesse, du toujours plus vite, toujours plus fort à l'instar de notre société sur-consommatrice où il faut constamment être le meilleur, le plus fort. Quand la compétition est la règle. Et que métier et passion ou l'inverse doivent cohabiter ou pire se confondre. Quand l'homme se confond avec la machine pour lever les bras en fin de course quitte à y laisser la vie.

Le roman d'Antonin Varenne sent le bruit et la fureur. Il est bruit et fureur. Et si le sujet de départ me poser problème, l'écriture d'Antonin Varenne elle m'a totalement emportée. Et j'avoue j'aime le noir même désenchanté quand il est écrit par cet auteur au vaste talent. Car derrière cette course infernale et obsessionnelle il y a là aussi une allégorie à la création artistique et littéraire. Quand la passion d'écrire est plus forte que tout. Alors…Monsieur Varenne, je peux vous demander une chose ? Dites, vous allez continuer à nous servir de tel texte, hein ?


Lien : https://collectifpolar.com/
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critiques presse (1)
FocusLeVif
31 mars 2021
Avec son nouveau roman, le noir, intime et frénétique "Dernier tour lancé", Antonin Varenne se cache derrière plusieurs personnages dont un pilote de moto devenu pestiféré et en quête de rédemption.
Lire la critique sur le site : FocusLeVif
Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
Jesse Owens, quatre médailles d'or aux J.O de Berlin en 1936, déclarait en son temps : « Non, Hitler ne m'a pas snobé, il m'a serré la main, mais les journalistes n'ont pas publié la photo parce qu'ils ne voulaient pas donner une image positive du chancelier. C'est Roosevelt qui m'a snobé quand je suis rentré aux États-Unis. Pas une rencontre, pas un télégramme. Roosevelt était en campagne et ne voulait pas se mettre les électeurs du Sud à dos. Quand je suis rentré chez moi, il a fallu que je retourne m'asseoir à l'arrière du bus avec les nègres. »
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Aux J.O. de Mexico en 1968, deux athlètes noirs, Tommie Smith et John Carlos, première et troisième marche du podium du 200 mètres, lèvent un poing ganté de cuir noir (Black Panther Party), ils ont ôté leurs chaussures (misère des Noirs), portent un foulard noir (lynchages). Le public hurle, crache, insulte, menace. Martin Luther King a été assassiné cinq mois plus tôt. La loi mettant officiellement fin à la ségrégation aux États-Unis est passée en 1964.

1964.

Virés du village olympique, interdits à vie de compétition, Smith et Carlos seront aussi virés de leurs boulots aux USA. Ils deviendront des va-nu-pieds. La femme de Smith le quitte. La femme de Carlos se suicide.

Le record du monde du 200 mètres, établi par Tommie Smith aux J.O. de Mexico en 1968, ne sera battu qu'en 1984.

Les droits de l'Homme sont pratiques. Ils ne sont pas politiques. On peut en faire des autocollants pour événements sportifs. Sauf si on exploite les droits de l'Homme à d'ignobles fins militantes. Peter Norman, le troisième homme, blanc, du podium de Mexico, pour avoir été solidaire de Smith et Carlos en arborant sur son jogging un écusson du Olympic Project for Human Rights, n'aura plus de carrière sportive non plus. Il était australien, enseignant, l'Australie avait accordé la citoyenneté aux Aborigènes un an plus tôt, en 1967.
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- Est-ce que tu as trouvé un peu de beauté ? Tu sais ce que c'est, la beauté, oui ?
- Tu vas me le dire.
- Et on pourra comparer alors.
(...)
- La beauté, c'est ce que tu gardes jusqu'à ton lit de mort.
- Il y a des gens qui meurent en haïssant la Terre entière.
- C'est vrai. Ils crèvent accrochés à leurs draps en grinçant des dents. Ou morts de trouille. C'est vrai. Alors disons que la beauté, c'est ce que tu dois garder pour bien mourir. Toi, tu dis que c'est quoi ?
- Ce qu'on peut partager sans le découper en parts.
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Julien se redressa, le dos raide, en sortant de la voiture.
Deux mois après l’ostéosynthèse – plaques, vis et crochets – le chirurgien avait recommandé l’injection de résine acrylique dans les lombaires fracturées. Le ciment synthétique avait réduit les douleurs, sans remédier à la perte de souplesse.
Vous êtes tiré d’affaire, avait déclaré le spécialiste. Les terminaisons nerveuses endommagées n’ont provoqué qu’une insensibilité. Avec de la rééducation, les muscles compenseront naturellement et le système nerveux se reconstituera en partie autour des lésions. Vous retrouverez quatre-vingt-dix pour cent de votre mobilité.
Quatre-vingt-dix pour cent, ce n’est pas assez pour piloter, avait répondu Julien.
Piloter ? De quoi parlez-vous ? Les prothèses en titane resteront.
Alliage Ti-6Al-4V. Titane, aluminium, vanadium. Développé pour l’industrie aéronautique.
Après la reddition japonaise de 1945, les États-Unis d’Amérique avaient interdit aux Nippons de rebâtir une force militaire. Les ingénieurs qui avaient conçu les avions de guerre lancés sur Pearl Harbour avaient trouvé du travail dans l’industrie automobile.
Les motos de Grand Prix planent autant qu’elles roulent. Des avions interdits de vol. Si les avions étaient une branche biologique dans la chaîne de l’évolution, les motos de GP seraient des pingouins ou des autruches.
S’il ne sert plus de voler pour échapper à ses prédateurs, si la nage est préférable au vol pour se nourrir, on se sépare de ses ailes. Dans les vents qui balaient l’archipel des Kerguelen, les mouches ont abandonné leurs ailes ; elles sautent en l’air et se laissent emporter : gain de poids, gain d’énergie.
Pas d’illusion : les Kerguelen ont obligé les mouches. C’était ça ou crever. Comme le Circus se débarrasse des pilotes trop grands, des gros, des faibles, des inadaptés. Si les mouches n’avaient pas pris le boulot offert par les Kerguelen, de manger, digérer, nourrir les oiseaux et pondre dans leurs cadavres, décomposer ce qu’il y avait à décomposer sur ces cailloux glacés, une autre bête aurait fait le job. L’évolution, c’est la flexibilité.
Les motos sont des bêtes aptères, conçues par des ingénieurs militaires sans armée, pour gagner dans un Circus de compétition mondiale.
L’industrie japonaise contrôle aujourd’hui vingt-cinq pour cent du marché américain de l’automobile. Le marché de la liberté.
La défaite de nos ennemis n’est que temporaire.
Sur le paddock, les patrons des usines japonaises sont appelés Boss. Ils ne sourient pas les jours de victoire. Ils planifient la prochaine défaite.
Des chirurgiens avaient greffé à Julien des pièces tirées d’un alliage qui rendait sa moto plus légère, souple et résistante aux chocs. Sa colonne vertébrale s’était brisée sur le carbone et le titane des motos de Simonelli et Spies.
Au moment du choc, avant que les carénages colorés soient propulsés à des dizaines de mètres comme par une grenade, Alain avait eu l’impression que les trois corps et les motos avaient fusionné. Une seule entité, de membres et de machines agglomérés par l’énergie des masses propulsées.
Edward Spies avait des prothèses de titane dans les jambes, le dos, les bras et la tête. Peut-être que son fauteuil roulant était aussi en alliage Ti-6Al-4V inoxydable.
Franco Simonelli, lui, avait fusionné avec le minerai.
Le titane est le plus biocompatible des matériaux.
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Même après que la tristesse est passée, les conséquences du deuil sont bien plus longues que ce que l'on croit. Le deuil est une construction. Il dure toute la vie.
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Vidéo de Antonin Varenne
Extrait de "La Toile du monde" d'Antonin Varenne lu par Julien Defaye. Editions Audiolib. Parution le 13 février 2019.
Pour en savoir plus : https://www.audiolib.fr/livre-audio/la-toile-du-monde-9782367628257
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