Les Lettres D'Amabed (1772)

Petit conte philosophique épistolaire. On est en 1512 pour les Européens, mais en 115.300 pour les Indiens, une civilisation bien plus ancienne que la notre, d'après Voltaire. Deux jeunes Indiens amoureux, Amabed et sa jeune femme Adaté vont, avec leur jeune servante Déra, visiter Goa, au sud de Bombay. Malheureusement, Goa a été conquise par le Portugais Albuquerque, qui y a installé des inquisiteurs. Les jeunes Indiens se moquent, par lettres à leur maître, Brame Shastasid, de la nouveauté de la civilisation européenne par rapport à la leur : ils ne peuvent égaler la sagesse d'une nation qui dure depuis si longtemps. En effet, ils auraient dû se méfier de leur cruauté. Après des amabilités d'apparence, puis après les avoir baptisé de force, les inquisiteurs les enferment. Puis Fa Tutto, dominicain, viole Adaté, et Fa Molto, franciscain, viole Déra....
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Ce conte est un violent pamphlet contre la religion catholique, d'autant plus que Voltaire sait, en 1772, que les jésuites sont bannis de France depuis dix ans ; il donne libre cours à sa violence verbale, exagérant peut être, mais je n'en suis pas sûr, les atrocités commises par les missionnaires sur les autochtones, sans oublier le non respect des lois bibliques, actes accomplis par les papes Jean VIII, Jean X, Jean XII et le fameux Cesare Borgia ( Alexandre VI ) ou Jules II, sensés donner l'exemple.
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Voltaire est bien là dans la lignée humaniste d'Erasme. Mais avec deux siècles et demie de distance, il peut se permettre, par l'intermédiaire d'étrangers ( pour Erasme, c'était "Dame Folie", là ce sont deux autochtones ramenés à Rome pour être jugés ), d'attaquer plus durement la religion qu'il juge très hypocrite.
Percutant !

Avec "Les lettres d'Amabed", Voltaire explore un genre peu connu : non pas le roman épistolaire, mais le conte épistolaire ! Et c'est une réussite !...
Avec cet humour, cette ironie, ce don pour la satire cinglante, qui sonne toujours aussi juste et aussi vraie aujourd'hui, et qui caractérise des textes tels que "Micromégas" ou "Les voyages de Scarmentado", le grand François-Marie Arouet, dit Voltaire, nous livre un fort beau conte, plein d'intelligence et d'idées.
Comme souvent, dans les textes des Lumières, on sent dans ce conte, une intelligence bouillonnante, et moult idées, ce qui ne peut que me plaire. On retrouve aussi dans ce conte, grâce, notamment, au personnage d'Amabed, l'exotisme qui caractérise nombre de contes, De Voltaire.
Mais cet exotisme, ici, n'est pas un simple élément de divertissement ; ce n'est pas un exotisme qu'on dépeint de manière stéréotypée, et, somme toute, assez condescendante, pour mieux nous plaire ; car Voltaire utilise ici le côté "pays lointain", pour mieux dénoncer les travers des Occidentaux.
On retrouve aussi les qualités de style qu'affichent souvent les contes voltairiens : Voltaire a un style plaisant, divertissant, assez musical, qui me séduit et me charme...
Bref, un très beau conte de l'auteur de "Candide" !

Amabed et sa femme voyagent en Europe. Ils sont trompés par un prêtre qui veut coucher avec la jeune femme qui est très belle. Amabed et Adate se retrouvent en prison, et Adate est violée par le prêtre. Tous deux sont tirés du cachot pour être jugés à Roume. Leur crime serait d'avoir renoncé à leur baptême. Mais ils sont été baptisés par des brahmines dans les eaux du Gange. Cela fait-il d'eux des catholiques, comme le prétendent les prêtres?
Amabed et Adate barrent leurs aventures à leur ami resté au pays.
Ce roman épistolaire se lit d'une traite. La question de la religion et de ses représentants est centrale dans ce mince 'ouvrage.

Un conte De Voltaire est toujours un plaisir fou de lecture, c'est là où le talent de l'auteur eclabousse le plus le lecteur , un plaisir simple qui est sans egal !