Pour expliquer ce que j'étais

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Cela a été l'un est sophismes dont nous avions fait nos principes que d'un homme ou tout est bon ou tout est mauvais, tout à prendre d'un bloc, ou tout d'un bloc à rejeter. Je ne crois pas qu'aucun d'entre nous ait jamais formulé cela, mais dans la pratique tout se passait comme si nous eussions obéi à cette loi draconienne.
A vrai dire, pour nous rendre la vie, et nos engouements, possibles, nous devions bien y pratiquer quelques restrictions mentales, ou tout au moins feignions-nous d'ignorer ce qui nous dérangeais trop chez l'un ou chez l'autre des personnages dont nous nous plaisions à faire des drapeaux. Les curieux tableaux où nous notions de vingt à moins vingt des poètes, des philosophes, des héros, des hommes politiques, des peintres, un peu pêle-mêle (c'est un petit jeu de société auquel nous avions donné de la dignité) montreraient à la pelle nos inconséquences, et le caractère de mode que prenaient avec facilité nos passions littéraires et humaines.

Je pensais par contre-pied. Et contre-pied des vulgarités impayables. Je dis je, c’est plus que jamais le cas de dire nous. L’indépendance d’esprit d’une génération est souvent ainsi faite : elle n’est que le revers d’une médaille officielle ; et vous ne me pousseriez pas beaucoup que je dirais de sa poésie qu’elle est la simple réplique des discours de Comices Agricoles. Intellectuellement parlant.

Pour expliquer ce que j'étais et ce que je suis devenu, il est probable qu'un romancier commencerait par s'en prendre à ma famille, y trouverait les sources de mes idées et les raisons de mes révoltes; et moi-même, lorsque je veux mettre en place un personnage, je n'agis pas autrement.