A la rencontre d'un « Gavroche proustien »…
Très heureuse de trouver ce lundi 27 avril 2021, dans ma boite aux lettres le dernier ouvrage de
Patrick Cloux, gentiment dédicacé. Je me suis aussitôt immergée dans l'univers d'
André Hardellet dont je ne connais rien ! Un énième auteur qui est depuis trop longtemps dans ma liste de manques à combler, d' écrivains à découvrir…
Un petit trésor nous faisant connaître une sorte d'écrivain lunaire, resté méconnu, en dépit de la sincère admiration de « plumes illustres «, comme Breton,
Julien Gracq…»…», en la personne d'
André Hardellet…!...
Le style de
Patrick Cloux est densément poétique, tour à tout « précieux », populaire, argotique ou un brin « désuet » « décalé », à l'image, j'imagine, d'
André Hardellet dont il affectionne à la fois la prose, la personnalité, la non-volonté des modes, des bruits mondains !
« Il y un ton
Hardellet comme il y a un ton Scutenaire ou un ton Pirotte. Comme il y a un seul Jude Stefan (-Ses Litanies du scribe lisant et lestant le nom de chaque auteur admiré d'un simple qualificatif sont un sublime hommage à l'art exact de lire) (...) Ces grands lecteurs ne sont pas des suiveurs- même quand ils nous désignent sans réserve des auteurs-, mais des écrivains uniques, pleins d'un univers entier, chorégraphes de leur seul tour de piste. Leur passion est dix fois plus communicative que celle d'écrivains muets sur leurs sources. « (p. 36)
Un style toujours poétique, riche d'images et de mots « désuets »…nous faisant partager son attachement confirmé pour l'oeuvre et l'Homme-
Hardellet, ainsi que d'autres sympathies de longue date :Brassens,
Guy Béart,
André Breton, André Vers, Doisneau,
Prévert,
Desnos,
Vialatte, etc.
« -Donnez-moi le temps- parle du temps des cerises, de la Commune et des vertes échappées. C'est le temps magnifique des chansons d'
Aragon et des
poèmes de jean
Genet, réinventés avec talent par Colette Magny. C'est aussi celui des dérives exaltées et renversantes des frères
Prévert. (...)
Son anthologie des poètes de Paris est le cadeau d'une vie. J'y retourne souvent. A chaque âge on peut s'en inspirer. La ville ronronne d'être ainsi chantée.
Hardellet, en chiffonnier de notre passé, actionne l'arc électrique de nos souvenirs. (p. 56)”
Une célébration flamboyante d'un écrivain-poète méconnu, incompris remis à l'honneur avec panache par
Patrick Cloux, lui-même auteur féru , accroc des chemins buissonniers, qui chemine fidèlement en compagnie d'artistes atypiques, hors médias et simagrées mondaines ! Entre ses « Oncles du Dimanche » où il parle avec flamme des créateurs dits « naïfs », ces artistes hors école, hors parisianisme, sa description sociale et littéraire de l'ancien quartier des Halles, entre poésie, argot, nostalgie, amour d'un Paris rêvé, un Paris des zincs et des potes, etc… Une nostalgie heureuse…parmi un milieu interlope, où l'on rencontre des personnages attachants et des plus originaux…de très beaux passages, toujours, en hommage aux Gens du Livre, écrivains, chansonniers, éditeurs, photographes… Je retiens , pour ma part, des passages aussi sympathiques que mérités sur le parcours passionné ,courageux de l'éditeur, Jean-Jacques Pauvert, qui fut aussi un véritable ami et soutien du « camarade »,
André Hardellet…
« Jean- Jacques Pauvert au meilleur de sa forme construisait pas à pas son somptueux catalogue dont je crois, même tant d'années après, que la plupart des livres sont à conserver. Il fut en tous les cas l'un des plus éloquents de l'époque. Un fort moment de liberté. Suite aux conseils d'
Alphonse Boudard, il reprendra les droits du -Seuil du jardin- à René Julliard, puis devint l'éditeur attitré d'
Hardellet. Ils s'aimaient bien. la véritable amitié ne gèle pas en hiver. Il fut pour André, en dehors de tout succès, un véritable soutien ». (p. 135)
Juste un très « modeste » conseil pour lire cet ouvrage de belle qualité : prendre le temps et SAVOURER… la langue… « les phrases-promenades »…le vocabulaire riche souvent singulier, pour en apprécier toute les saveurs !
Encore un immense MERCI à
Patrick Cloux de m'avoir transmis ce texte magnifique qui m'a donné l'envie et la curiosité de lire enfin cet ami de Brassens… , m'a fait commander plusieurs titres d'
André Hardellet, dans la collection « l'‘Imaginaire [ chez Gallimard ] dont « Donnez moi le temps ».
Deux souhaits du fond du coeur que j'exprime à l'encontre de cet ouvrage précieux : un grand nombre de lecteurs attentifs et passionnés de ce dernier, et que ces mêmes amoureux de la Littérature se précipitent pour découvrir l'univers du poète,
André Hardellet…que la postérité répare un tant soit peu…son injustice à son égard !