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Gabrielle Danoux (Traducteur)
EAN : 9781495232886
94 pages
CreateSpace Independent Publishing Platform (17/01/2014)
3.86/5   37 notes
Résumé :
Lucian Negrișor est amoureux de la femme chocolat. Passez votre chemin si vous êtes à la recherche des saveurs habituelles proposées dans une certaine littérature roumaine, où l'éveil des sens se contente d'évoquer les « spécificités nationales ». Quand il ne s'agit pas des privations ou pénuries de toutes sortes, la joie ou la jouissance découle de viandes et d'alcool labellisés cuisine nationale (mititei, sarmale, muraturi, dorobant, braga). La sensualité de ... >Voir plus
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Années trente en Roumanie. Negrisor, le narrateur, est un amoureux transi : incapable d'exprimer clairement ses sentiments, il cumule tellement les maladresses que son comportement en devient loufoque et cocasse, lui faisant rater toutes les occasions de bonne fortune qui se présentent à lui. Se réfugiant entre songes éveillés et velléités suicidaires, il n'en poursuit pas moins à sa façon le tendre objet de ses désirs : l'appétissante Eleonora à la peau couleur chocolat, amusée et incrédule, pas si indifférente en définitive, même si les incohérences de Negrisor semblent donner l'avantage à son détesté rival Modreanu.


Quel surprenant petit livre, à mi chemin entre la nouvelle et ce qu'on imaginerait facilement devenir une pièce de théâtre, et surtout, quel déconcertant personnage que Negrisor, que la lucidité fait constamment osciller entre désespoir et auto-dérision, et qui, au plus profond de son drame personnel, ne parvient jamais à être pris au sérieux. Pourtant, que d'imagination et de poésie dans la tête de ce clown malgré lui, véritables exutoires qui ne font que rendre encore plus illisibles les comportements de cet homme trop sensible et touchant.


Comment ne pas être tenté d'y voir certains traits de l'auteur, qui, comme l'explique la traductrice dans sa préface, rédigea « l'essentiel de l'oeuvre romanesque de son pays à son époque » , mais qui, jugé « discret, effacé », à la vie « sans relief », reste aujourd'hui méconnu ?


Incisif et moqueur, noir et sans illusion, imagé et poétique, novateur et flirtant parfois avec l'absurde, ce texte singulier révèle une plume qui méritait de sortir de l'oubli, ce à quoi contribue brillamment la traduction française de Gabrielle Danoux.


Merci à elle de m'avoir fait découvrir cette oeuvre, au cours de ce qui est pour moi presque une première rencontre avec la littérature roumaine, si l'on excepte Eugène Ionesco.


Vous pouvez lire sur mon blog mon interview de Gabrielle Danoux, romancière et traductrice de La femme chocolat, mais aussi de nombreux autres ouvrages de la littérature roumaine :
https://leslecturesdecannetille.blogspot.com/2019/09/interview-de-gabrielle-danoux.html




Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Parmi les livres de la littérature roumaine traduits par Gabrielle Danoux j'avais l'embarras du choix. Je dois avouer que j'ai choisi celui-là pour commencer cette découverte du fait de son titre. La femme chocolat. Il me suffit de lire ce titre ou de l'écrire pour avoir la chanson d'Olivia Ruiz en tête : « Taille moi les hanches à la hache / j'ai trop mangé de chocolat. Croque moi la peau s'il-teplait / Croque moi les os s'il le faut [….] Au bout de mes tout petits seins / s'insinuent, pointues et dodues / deux noisettes , crac ! Tu les manges ».

Bien m'en a pris. Un titre gourmand pour un livre qui ne l'est pas moins. Gourmand, bien écrit, sensuel, percutant, ironique, plein d'humour, poétique et pourtant relatant un drame, drame amoureux du point de vue de celui qui raconte l'histoire : Negrişor. Un livre qui ressemble à une nouvelle. Un livre qui se lit d'une traite.

Negrisor est amoureux d'Eleonora, qu'il nomme la femme chocolat du fait de la couleur de sa peau et de l'appétit qu'il éprouve pour elle. Or, celle-ci, pourtant pas indifférente, a également un autre prétendant, Modreanu, qui l'attire moins physiquement mais qui est plus rassurant psychologiquement, du moins moins incohérent. Negrisor, il est vrai, a du mal à exprimer clairement ses sentiments, est terriblement maladroit. Il oscille avec loufoquerie entre songes éveillés et désirs suicidaires, paranoïa et élans d'amour pur.
Comme il est indiqué dans un prologue très intéressant, narrant la vie de l'auteur (ce que j'ai particulièrement apprécié vu que je découvre totalement la littérature roumaine – excepté Ionesco - et cet auteur), Interrogé en 1932 au sujet de la Femme chocolat, Mihăescu répond : « La Femme chocolat est une bachelette qui a le teint couleur chocolat. C'est tout et rien de plus. Cependant, quel subtil venin, quel drame, quel pouvoir meurtrier, latents, ne gisent sous cette apparence douce, sous cette peau mate, comme assombrie par la couleur du crépuscule éternel, qui d'emblée semble prête à fondre délicatement sous la compression du premier baiser, comme un carreau de chocolat ».

J'ai adoré dans ce petit livre les scènes de rêves éveillés d'un humour décapant. J'ai souri, j'ai ri. J'ai compati aussi. « La force de son imagination accentuait son attendrissement. Il se figura écrasé sur le bitume, déchiqueté par les crocs métalliques, Modreanu et Eleonora debout sur l'appui de la fenêtre : lui l'air triomphant, elle, tétanisée devant la grande révélation. Elle se rendait enfin compte de la grandeur de l'âme qui l'avait aimée et à quel point elle avait été aimée par cet esprit devenu, pour elle, quartiers d'animal abattu. »

J'ai aimé les nombreuses descriptions sensuelles de cette femme chocolat : « À peine les larges manches avaient-elles recouvert les épaules, qu'aussitôt les mains agiles se mirent à ranger les cheveux et exposèrent ainsi leur entière beauté, dévoilant même les obscures fossettes des aisselles, pendant que la fente du décolleté autorisait la découverte, avec une certaine agitation, tels les clignements rusés d'un oeil géant, de cette rainure entre les deux seins frémissants. »

J'ai étéparticulièrement sensible à la poésie qui jalonne le récit : « le pas de Negrişor prenait une allure de plus en plus nerveuse, alors qu'elle le regardait avec des yeux démesurément grands qui, crescendo, devenaient phosphorescents, comme s'ils se décomposaient en milliers de minuscules étincelles, infiniment nombreuses, pendant qu'elle le regardait. La lumière ainsi dégagée permettait à Negrişor de voir comment sur ses lèvres un nouveau sourire, inconnu, grandissait. »

J'ai aimé entrevoir cette ville roumaine de Cluj, même si l'essentiel des scènes se déroulent en intérieur (j'imagine très bien une adaptation sous la forme d'une pièce de théâtre d'ailleurs) : « La rue ensoleillée se déroulait devant lui, les parfums colportés par les filles coulaient à flots dans le caniveau, les jambons suspendus aux devantures des épiceries et les tonneaux de tarama, de harengs fumés et de fromage dressaient le tableau de l'abondance et du bonheur universels comme le bruit de la rue, le bourdonnement des abeilles, les chevaux décharnés des cochers et même cette merveilleuse statue équestre de Matthias Corvin qui se trouvait juste là, bien installée sur son socle ».

En ouvrant ce livre je n'attendais rien, et j'ai été agréablement surprise. Pas de doute, je vais continuer à parcourir des oeuvres de la littérature roumaine en remerciant chaleureusement Gabrielle Danoux pour cette belle découverte.
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En lisant le titre, j'ai immédiatement pensé à Mathias Malzieu et à sa version de "La Femme Chocolat".

Celle de Gib I. Mihăescu est bien antérieure, elle est très différente et tout aussi jolie. En effet, nul besoin pour Eleonora de se gaver de chocolat car sa peau est déjà chocolatée. Il n'en faut pas plus pour allumer le désir des hommes. Mihăescu ne se revendique d'aucun style et pourtant depuis ma "perspective" naïve et intuitive, son roman m'a semblé empreint de romantisme et de réalisme fantasmagorique.

Par certains aspects, son héros Negrişor m'a rappelé "l'enfant du siècle" De Musset, mais dans son désir d'absolu, c'est Raphaël de Valentin dans "La Peau de Chagrin" De Balzac qu'il m'a évoqué.
Negrişor est un obsessionnel déchiré entre l'amour et la mort. Il semble prêt à tout pour sa déesse de chocolat, qui ne joue pas innocemment de ses charmes. Ses pérégrinations oscillent entre hallucinations morbides étrangement "réelles" et tentatives de conquérir la vie en goûtant le chocolat tant convoité. Lequel de ces Negrişor va l'emporter sur l'autre ? Ou bien est-ce "La Femme chocolat" qui finalement décidera de son sort ?

Extrêmement poétique et sombre le roman de Gib I. Mihăescu, tel un envoûtement, entraîne le lecteur dans les circonvolutions et autres tourbillons de l'esprit de Negrişor, plus fascinant pour moi que "La Femme chocolat". Pris au piège du grand talent de l'auteur, on finit par être happé par ce roman court mais intense.

C'est la première fois que j'ai l'occasion de lire et d'apprécier un auteur roumain, ceci grâce à l'excellente traduction de Gabrielle Danoux qui a permis à tous les amateurs de bonnes lectures de pouvoir enfin déguster cette "Femme chocolat" en France.

Merci de tout coeur à Tandarica pour m'avoir offert cette belle découverte.
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1924. L'histoire démarre dans le salon de mademoiselle Eleonora. Negriþor s'est réfugié comme il se plait à le faire à la fenêtre. Il aime particulièrement s'y suspendre pour observer ce qui se passe en bas, ou peut être, tel un gamin désobéissant, pour attirer inconsciemment l'attention de celle qui semble ne plus le voir dès que Modreanu est dans les parages. Lui, préfère cependant se voir comme "un acrobate de cirque sur un cheval lancé à vive allure". Mais ce jour là, le mugissement de la scie mécanique en train de débiter du bois en bas de l'immeuble, va emballer son imagination au point de l'effrayer...

J'ai été décontenancée au départ par les brusques passages entre l'imaginaire et le réel. C'est d'autant plus accentué que nous découvrons les pérégrinations de Negriþor à travers son unique perception. Mais on s'y fait assez vite finalement. Désir, temps, obsession, jalousie, fatalité s'y mêlent à tour de rôle. Negriþor est viscéralement subjugué par la femme couleur chocolat. Elle est comme une gourmandise au fondant doux-amer à laquelle il ne peut résister. Et sa maladresse pour exprimer ses sentiments et les extérioriser est vraiment touchante. Sa vie intérieure, riche et tumultueuse, ne lui facilite pas les choses. Car notre Negriþor vit sa vie comme un songe éveillé. Il s'enferme dans des obsessions qui nourrissent et enflamment son imagination foisonnante, et attend que la fatalité ou le destin décide de la route qu'il empruntera.

Il est dit dans la préface que l'auteur "admirait les romanciers Russes". Je ne suis pas surprise. Par certains aspects, on en ressent l'influence. Décédé prématurément en 1935 à l'âge de 41 ans, il n'a sans doute pas pu révéler toute l'étendue de son talent. Pourtant, ce court roman de 80 pages en offre déjà un aperçu significatif. A mi chemin entre le roman psychologique et le roman fantastique, les mésaventures de Negriþor auraient même pu faire une formidable pièce de théâtre. Et peut être y en t-il eu une. Assurément, un livre à découvrir. Étrange et fascinant.

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Si certains écrivains vêtent la réalité de mots légers , touchants et lumineux , telles des lucioles , Mihaescu les surpasse par une écriture qui transpire une imagination inouïe .

Et pourtant , si l'on s'arrête quelques instants sur l'histoire en elle-même , elle semble simple comme bonjour . Elle parle d'amour , d'un amour gourmand dont Lucian ne sait plus se passer à en devenir extravagant .

Voilà pourquoi , dès le départ , j'ai tiré doucement la ficelle de la serinette qui jouait une musique bien étrange . Elle semblait venir d'une fenêtre : " Negrisor découvrit au fond rectangulaire de l'abîme de bitum une scie mécanique au cri déchirant. "
L'obsession vire à la folie sérieuse , celle qui transforme Lucian Negrisor en un pantin ,bouffe et imprévisible , qui se complaît dans un monde irréel .

Un bourdonnement vient perturber le refrain d'amour , il s'appelle Modreanu et lui aussi est fou de la belle . Ce troisième larron veut s'interposer entre Lucian et Eleonora .
Pourtant , il ressemble à un avorton et notre ami est bien plus joli et drôle que lui ; il réussit si souvent à faire rire son petit morceau de sucre avec qui il s'emmêlerait pour la vie .
" Ah , ces mêmes cheveux détachés , partagés avec lui comme un nid commun pour leurs têtes , leurs deux visages recouverts par ces cheveux , les jeux de cache-cache dans l'obscurité , les bras dénudés enlacés autour du cou de Negrisor , les seins qui se débattent comme des oiseaux capturés dans cette étreinte , dans cet écrasement , les yeux , vagues gouttes de soleil dans les profondeurs de la forêt . "

Les paroles de ce galant sont sibyllines pour la dulcinée qui le trouve drôle dans ses divagations , et , en même temps la choquent .
Il est morbide quand il dit qu'il se tuerait pour elle pour qu'elle l'aime vraiment .

Plus d'une fois , j'ai essayé de cesser d'écouter cette litanie où il monologue , fasciné par la scie qui pleure .
" Dis la vérité , Negrisor , aurais-tu sauté . "
Mais l'auteur est un magicien qui transporte sa philosophie à travers une poésie colorée d'objets animés telle la scie , l'horloge , qu'il personnifie pour nous expliquer ce mal-être érotique qu'il ressent , mêlé à la hantise de la femme mythique .

Joie , honneur , perplexité , émerveillement , je n'ai pas assez de termes pour remercier Gabrielle Danoux pour cet étrange et savoureux bonbon dont elle m'a gratifiée .


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Citations et extraits (58) Voir plus Ajouter une citation
En définitive, le sort n'était pas si rancunier et si stupidement farceur, comme tant d'autres l'en accusaient. Negrişor avait remarqué, au fil de ses années, bien assez nombreuses pour que la somme finale soit jugée rondelette, que, si ce vieillard déluré, ce birbe à qui l'on a confié la charge de la maîtrise du temps et des trajectoires des hommes, lui infligeait un malheur ou deux, il prenait néanmoins ensuite le soin de retourner soudain la veste de la chance. Le barbon doit être plutôt égrillard et grippe-sou : face à celui qui ne se révolte jamais contre ses canulars, il est capable de sortir de ses gonds en redoublant de ténacité ; tandis que celui qui se ramollit, il finit par lui taper sur la tête et l'achever. En revanche, contre celui qui lui oppose résistance et l'accuse ouvertement, il se fâche, pour avoir été trop hostilement morigéné. Lorsqu'on fait des gaudrioles sympathiques, cela l'enchante comme tout grison qui ne met pas votre patience à rude épreuve. Que voulez-vous ? Nous vivons dans un monde qui s'est trop éloigné de ses origines, comme si nous étions les enfants d'hommes trop anciens et usés. Tout est fêlé dans cet univers expulsé de l'ordre préétabli ; possible que ce soit la raison pour laquelle Dieu souhaite sa perte, et sa transfiguration.
Mais là commence une toute autre histoire, et seul le diable sait qui pourra encore la suivre. Celui qui, en revanche, sent la raison d'être des choses se doit, qu'il le veuille ou non, de s'y conformer. Puisque l'univers est timbré, que peut-il de plus, Negrişor, hormis commander encore un espresso, et disposer, de façon symétrique, autour de la tasse, sur la soucoupe, quelques mégots de cigarettes, en attendant la nouvelle facétie du vieillard aux ciseaux.
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La rue ensoleillée se déroulait devant lui, les parfums colportés par les filles coulaient à flots dans le caniveau, les jambons suspendus aux devantures des épiceries et les tonneaux de tarama, de harengs fumés et de fromage dressaient le tableau de l’abondance et du bonheur universels comme le bruit de la rue, le bourdonnement des abeilles, les chevaux décharnés des cochers et même cette merveilleuse statue équestre de Matthias Corvin qui se trouvait juste là, bien installée sur son socle.
Il était adossé au cadre jaune d’une vitrine, en compagnie d’une bande d’amis, lorsqu’il la vit passer dans un groupe de filles. Le groupe des garçons salua avec de grands gestes, de sorte que toute la rue détourna le regard pour elle. Elle portait un tailleur bleu, aux lignes épurées, et un chapeau de velours noir aux larges bords. Elle s’avançait avec sa démarche royale, distribuant sans compter des fleurs de sourires. Elle réserva à Negrişor un sourire si particulier qu’ils se retournèrent tous pour le regarder.
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Les minutes s’écoulaient lentement. Cette rue formait un véritable désert : pas un pas ne résonnait sur le trottoir bitumé. Les minutes accrochées au mur, quant à elles, battaient la cadence, produisant une douce musique aux sonorités faïencées. Pendant un moment, il les observa qui surgissaient de l’éternité, sautaient, puis s’agrippaient à la grande aiguille qui les soulevait avec un bruit sourd. Lorsqu’elles achevaient leur existence, Negrisor entendait distinctement un léger cliquetis et il lui semblait qu’un souffle s’éteignait sur un bras de la chaîne du balancier qui descendait.

(…)

Les minutes ici présentes, avec leurs vies équivalentes, égalisées en longueur comme un fagot de brindilles, l’attristaient vraiment. On entendit plusieurs fois le son de la pendule, Negrisor vit qu’il était vingt-deux heures, et, ce qui l’intéressait beaucoup maintenant, c’était de voir par où de nouvelles minutes pourraient encore grimper, alors que la grande aiguille entamait sa descente. Par le bras de la chaîne qui montait, bien sûr. Ensuite, elles se laissent entraîner par les petites roues du mouvement, glissent sur la tige et attendent derrière le cadran blanc, comme les âmes recroquevillées devant le gouffre qui les sépare de l’infini. Ensuite, l’horloge annonce leur destinée, elles se glissent l’une après l’autre vers la flèche de l’aiguille, comme un enfant chevaucherait une poutre qui penche vers d’abyssales noirceurs. A chaque nouveau tic-tac, une nouvelle cabriole.

(…)

Mais Sari ne revenait toujours pas. Elle ne se rendait pas compte que son retard coûtait nombre de nouvelles têtes de minutes culbutées sous l’intransigeant couperet du temps.
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Dans les vitrines, aussi propres que l'eau fraîche, de la bibliothèque, dont mademoiselle Eleonora affirmait que c''était l'unique souvenir de son père, se reflétaient à présent d'incomparables merveilles : une jambe emprisonnée dans un collant transparent, que l'ourlet de la robe de chambre entremêlée dans la boucle d'une jarretière dénudait jusqu'au dessus du genou, puis un sein brun et insolent qui glissait en catimini son téton dans la fente, profitant ainsi du geste de mademoiselle Eleonora qui rabattit sa tête en arrière et secoua légèrement ses cheveux pour les aligner et faciliter ainsi la confection d'un chignon en torsade ; enfin le contour robuste des lombes, cambrés pendant qu'elle se penchait pour couvrir sa jambe.
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– La suite, la suite ! gémit avec insistance mademoiselle Eleonora.
Negrişor paraissait résolument embarrassé et mademoiselle Eleonora d’autant plus impatiente et curieuse.
– Eh bien, vous vous êtes arrêté à l’épisode crucial, l’encouragea-t-elle avec une indicible douceur. Je comprends votre hésitation. Je comprends, je comprends tout. Vous pouvez tout me raconter, vous savez, allez-y, courage. Non, je ne le dirai à personne, pauvre malheureux, à personne, je garderai tout pour moi, je serai muette comme une tombe.
(p. 38)
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