Après avoir lu
Au bagne, le reportage terrifiant d'
Albert Londres sur le bagne de Guyane, et
La vie des forçats, le livre écrit par l'ancien bagnard
Eugène Dieudonné après son amnistie et son retour en France (sur le conseil d'
Albert Londres et préfacé par ce dernier), je me devais de lire le troisième ouvrage témoignant du lien entre ces deux hommes hors du commun :
Adieu Cayenne, également parfois publié sous le titre "
L'homme qui s'évada" (il s'agit bien du même livre !)
Il s'agit du compte-rendu probablement extrêmement fidèle du long entretien qu'
Albert Londres a eu avec Dieudonné dans une chambre d'hôtel de Rio de Janeiro, après la dernière évasion couronnée de succès du forçat. Ladite évasion, encore fraîche dans l'esprit du fuyard, y est relatée en détail, de même que les tergiversations politiques entre les pouvoirs publics français et brésiliens, entre demande d'extradition, pression de l'opinion publique, etc. Tout cela est passionnant et d'une grande modernité (cf l'affaire
Julian Assange par exemple).
L'horreur du bagne n'est pas directement au programme de cet ouvrage, mais son ombre menaçante et omniprésente plane sur le récit de cette évasion, de bout en bout. En creux, on la devine, à voir l'acharnement surhumain de Dieudonné et de ses compagnons de débine à s'évader à n'importe quel prix et à préférer sans hésiter la mort à une nouvelle capture.
La scène de "l'Autre", qui continue, bien qu'agonisant, à marcher des jours et des jours en serrant les dents pour ne pas être lâché par ceux qui n'ont pas encore été repris, en dit long, très long.
Véritable leçon de résilience et de détermination d'un innocent à se soustraire à une condamnation injuste, ce récit est un monument historique à lui tout seul.