De Claudel, je gardais le souvenir du dramaturge, auteur de "
l'Annonce faite à Marie" et du "Soulier de satin", cette pièce de théâtre célèbre pour sa durée exceptionnelle.
En recevant, "
Paul Claudel, naissance d'une vocation", de la part de Masse Critique, je fais plus ample connaissance avec le poète-diplomate né en 1868 dans une famille de la petite bourgeoisie provinciale. Son père est fonctionnaire, son grand-père maternel est médecin. Ses parents sont exigeants et distants : sa mère taciturne et son père peu enclin aux épanchements affectifs. C'est avec son grand-père et sa soeur aînée Camille qu'il entretient une relation forte et confiante. Même si chacun est peu démonstratif, on peut dire qu'il a une enfance privilégiée.
Paul n'a rien d'un rebelle. Troisième de la fratrie et petit dernier après ses soeurs Camille et Louise, c'est un garçon discipliné, sensible, observateur attentif du monde qui l'entoure et du comportement des adultes avec leurs mystères.
Dès qu'il sait lire, l'intrépide
Camille l'associe à ses lectures et l'initie au monde de l'art.
A neuf ans, il entre au lycée de Bar-le-Duc où chaque classe compte très peu d'élèves. Dans ce milieu rassurant, "il est heureux d'apprendre sans cesse des choses nouvelles". Bon élève, tout l'intéresse et le passionne. Au terme de cette année scolaire, il se distingue par un étonnant palmarès de premiers prix.
En 1876, une promotion de son père conduit la famille à Nogent-sur-Seine et son éducation est confiée à un précepteur.
En 1881, Louis Prosper son père décide d'installer femme et enfants à Paris car "Camille ne pourra réaliser sa vocation en demeurant éloignée de la capitale". Quant à Louise la pianiste "elle pourra devenir une virtuose de son instrument grâce à de bons maîtres". Pour Paul, son père est convaincu qu'il entrera à l'
Ecole Normale Supérieure, après son passage au lycée Louis-le-Grand où, l'année du bac "soixante garçons seront entassés en classe de philosophie". Ces années de lycée ont été une rude épreuve pour le jeune provincial qi a conservé un accent de terroir. Très réservé, Paul se sent différent des autres élèves dont les parents appartiennent à l'élite intellectuelle parisienne. Il se réfugie souvent dans les proches jardins du Luxembourg pour lire et écrire en songeant à son avenir. "La question l'obsède. C'est sûr, maintenant il l'a décidé ,il veut être poète" mais pas un poète bohème et maudit comme
Verlaine. Il veut s'assumer financièrement. "La poésie est là, heureusement, pour calmer l'angoisse qui l'envahit si souvent et pour apaiser parfois les tempêtes". Sa découverte des textes de
Rimbaud va confirmer sa vocation.
Parallèlement, le jour de Noël 1886, alors qu'il assiste en spectateur curieux à la messe à Notre-Dame, il se convertit et cette révélation va avoir une importance capitale sur son oeuvre. le scientisme qui régnait à Louis-le-Grand et l'indifférence religieuse de sa famille ne le poussaient pourtant pas dans cette voie.
Toujours soucieux de faire carrière, il entre à l'Ecole des Sciences politiques tout en préparant une licence de droit puis, après trois années d'apprentissage au Ministère des Affaires Etrangères, il devient diplomate et parcourera le monde, diffusera la culture française et ne cessera d'écrire.
Ce texte, à la fois essai-biographie-roman rédigé par une spécialiste de Claudel est une excellente introduction à la re-découverte d'un académicien un peu oublié. L'auteure en se limitant à la jeunesse du poète s'est intéressée au développement de sa personnalité et à la genèse de sa vocation.