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EAN : 9782070123476
304 pages
Gallimard (06/11/2008)
3.8/5   137 notes
Résumé :
Patrick Pécherot
Tranchecaille
Trophée 813 du meilleur roman francophone 2009

Chemin des Dames, 1917, l'offensive du général Nivelle tourne à l'hécatombe. Dans l'enfer des combats, un conseil de guerre s'apprête à juger le soldat Jonas, accusé d'avoir assassiné son lieutenant. Devant l'officier chargé de le défendre défilent, comme des fantômes, les témoins harassés d'un drame qui les dépasse. Coupable? Innocent? Jonas est-il un simulate... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (35) Voir plus Ajouter une critique
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Le soldat Jonas n'aurait pas dû se rebeller face au lieutenant Landry, non, il n'aurait pas dû.
Son supérieur retrouvé assassiné, le voilà désormais emprisonné et accusé d'une bien vilaine forfaiture.
Son seul espoir réside alors en la perspicacité et la vélocité d'esprit du capitaine Duparc chargé de le défendre.

Un énième bouquin sur la grande guerre me direz-vous.
Nein !
Un contexte guerrier formidablement étayé, certes, mais avant tout le déroulé d'une enquête précise au suspense haletant.
A l'instar d'un bon vieux Columbo des familles, la sentence nous est balancée dès la toute première page mais peu n'importe, l'intérêt est ailleurs Scully.

Le dossier Jonas est lourd et complexe.
Balourd notoire ou simulateur de génie, la question se posera tout du long pour un lecteur abonné au cul entre deux chaises. Je préconise donc un long échauffement des petits, moyens et grands adducteurs avant d'entamer Tranchecaille, pensez-y.

Pécherot nous balade avec intelligence et sobriété tout en s'appuyant sur des faits historiques dantesques.
La condition des poilus en ces années de conflit nous donne une idée assez précise de l'enfer sur terre.

En construisant son récit comme un journal de bord compilant témoignages, courriers et interrogatoires, Pécherot nous plonge au coeur même de l'enquête tout en la rendant formidablement vivante.

Tranchecaille est assurément un grand bouquin noir à l'écriture hyper réaliste.
Vous savez ce qu'il vous reste à faire.

Et un, j'inspire et je fléchis, et deux, je garde le dos bien droit tout en maintenant les genoux à un angle approximatif de 90° perpendiculaire au méridien de Greenwich avant d'expirer, sans postillonner, durant la remontée.
Pas d'impasse sur l'échauffement, au risque de me répéter...
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En quelques lignes, le résumé de la 4e de couverture situe parfaitement l'ouvrage et permet d'entamer une lecture au coeur du sujet, en son point le plus vif puisqu'il s'ouvre sur l'exécution du soldat Jonas. Ainsi connaît-on d'emblée le verdict du tribunal de guerre.
Mais la question qui sera le fil conducteur du roman est de savoir si celui que l'on surnomme « tranchecaille » ou encore « paire-de-braies » est coupable d'avoir tué son supérieur, le lieutenant Landry, ou innocent. Est-il seulement naïf, roi de la poisse et des hasards malheureux ? Ou est-il bien plus futé qu'il n'y paraît, un comédien hors pair pour se faire dédouaner de ses actes ?

Entre le moment où il est mis aux arrêts et celui de sa comparution, l'intervalle est de quelques jours durant lesquels le capitaine Duparc, assigné à sa défense, se démènera pour dénouer les fils de cette histoire et se forger une opinion sur les faits et sur le personnage afin d'assurer la meilleure défense possible à ce soldat.

Les chapitres sont courts, ils alternent entre les différents témoignages lesquels brossent petit à petit le portrait du soldat Jonas, un soldat ordinaire qui se trouve les pieds englués dans la boue des tranchées à devoir avancer dans cette guerre au milieu de tant d'autres hommes comme lui. L'auteur parvient à nous faire ressentir cette forme d'absurdité que peut revêtir cette guerre, les conditions de vie dans les tranchées, sa dureté, les troubles de personnalité consécutifs aux horreurs vécues, les hôpitaux de campagne qui procèdent aux amputations à tour de bras, le caractère expéditif des tribunaux, et plus encore...

Mais si le sujet de l'ouvrage est particulièrement intéressant pour sa valeur historique entre les faits rapportés et le langage des poilus, je ne me suis pas passionnée pour sa lecture. La narration est pertinente avec des chapitres alternant les dépositions, assemblant les pièces du dossier au fur et à mesure tout en déroulant L Histoire. Cela change du schéma classique de récit de guerre. Mais certains chapitres sont venus s'intercaler comme des cheveux dans la soupe, par exemple la correspondance de Duparc avec sa bien-aimée qui, si elle lui permet d'évoquer ses états d'âme, n'apportent pas vraiment de plus-value au roman. Ou encore les chapitres relatifs aux hôpitaux de campagne que j'ai ressentis plutôt comme des digressions. Cela m'a laissé le sentiment que le sujet n'était pas creusé correctement, que ces éloignements venaient diluer l'intensité et l'intérêt du développement.

Le récit est très souvent en langage parlé, dans le vocabulaire des poilus, ce qui le rend très vivant. Mais son usage m'a paru excessif, beaucoup de jargon en peu de pages.

En raison de ces petits bémols, ma lecture a perdu de son intérêt à mesure des pages tournées, c'est dommage. Cela reste néanmoins un ouvrage qui nous emmène sur le sentier de la guerre et de la mémoire, qui se lit rapidement. Alors quelle sera votre intime conviction ? Coupable ou innocent ?
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Je vais être franche : je n'avais pas vraiment envie de lire ce roman de suite... Néanmoins, il allait peut-être faire partie du prochain club des lecteurs et il fallait que je prenne un peu d'avance dans ce genre de lectures... Finalement ? BOUM ! Une grosse claque ! J'ai adoré ! Ce mélange de "La peur" de Gabriel Chevallier et d'un roman policier m'a bouleversée. L'action se déroule en 1917, dans l'Aisne avec, évidemment, cette abominable bataille du Chemin des Dames. L'horreur de la guerre est très bien retranscrite que ce soit au niveau du front, des permissions, des scènes à l'infirmerie ou du quotidien des poilus. La Guerre vue sous tous les angles...

Cette enquête est menée d'une main de maître à travers divers chapitres qui sont en fait des lettres, des témoignages, des interrogatoires, des discussions ou des scènes rapportées. J'ai trouvé cela original. Ce ne sont pas de simples chapitres où la narration passe d'un personnage à un autre, mais bien des rapports, des échanges verbaux, des pièces qui constitueront le dossier de son enquête. Tout le monde donne son avis sur le soldat Jonas, alias "Tranchecaille". Un fainéant ? Un âne ? Un comédien qui joue le benêt ? Un homme mystérieux ? Un gosse au pantalon trop grand ? de la chair à canon parmi tant d'autres ? Un soldat au regard étrange ? Un assassin ? Chacun met son grain de sel. Hélas, le tribunal bientôt doit se réunir sur cette affaire afin de le déclarer ou non coupable Jonas. A-t-il tué son lieutenant ? Quelles vérités éclateront de cette sinistre affaire ? le capitaine Duparc tente de démêler ce sac de noeuds. Malheureusement, tandis que Jonas plaide son innocence, tout l'accuse... le jeune homme se montre également violent voire menteur... La menace du peloton d'exécution plane. Il ne reste plus beaucoup de temps...

On n'est pas au bout de nos surprises. Les pistes, jetées de-ci de-là, ne laissent rien deviner. Je suis tombée de haut plusieurs fois. J'ai douté. J'ai cru comprendre et détenir des réponses... Au fil des témoignages, on se rend compte qu'il y a une véritable intrigue et qu'elle est assez compliquée à résoudre. J'aime énormément les ouvrages où l'auteur balade son lecteur d'un coupable à un autre. Patrick Pécherot y est parvenu avec brio. Tout au long des pages, j'étais remplie de doutes et de questions. Mais la vérité ou la justice a-t-elle finalement son importance dans un tel univers où tout peut basculer du jour au lendemain sous les tirs ennemis ?

Je ne pensais pas que "Tranchecaille" me plairait autant, surtout avec une telle idée de récit. Mélanger le genre polar avec la Grande Guerre, il fallait oser ! Mais Patrick Pécherot s'en est sorti haut la main. Je m'en vais de suite conseiller cet ouvrage à quelques proches qui, je l'espère, apprécieront cette oeuvre même si le sujet n'est pas joyeux... Quant à vous, potentiels lecteurs, je ne peux que vous recommander ce livre "historico-policier" passionnant !

Lien : https://lespagesquitournent...
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Méfions-nous des homophones. Contrairement à Jonasz, le chanteur, Jonas, le désenchanté, est du genre à aller au bordel, amer. Drôle de zig, un brin Destouches, une touche Brindavoine, Jonas, le poilu, se voit suspecté de meurtres. Roman policier ? Chronique judiciaire ? Oui, bien sûr. Or, dès les premières pages, le sort de Jonas est connu. Alors, ce livre est surtout un prétexte à se plonger dans la Première Guerre Mondiale. de courts chapitres mettent en scène de nombreux personnages, archétypes de quelques acteurs de ce conflit tragique, scènes au front, scènes à l'arrière. Simples soldats, gradés, infirmières, médecins, marraines de guerres tentent de donner un sens à l'absurdité ou bien sombrent. Les conséquences psychologiques et physiques de la guerre sont abordées par un récit rythmé, qui est retranscrit avec l'emploi judicieux de l'argot d'alors, les dialogues claquent comme la mitraille, les images se succèdent, une poétique du sang et de la fureur s'esquisse parfois. Pécherot possède une large culture sur la der des der mais son érudition ne nuit nullement à la dimension littéraire de cet ouvrage qui se laisse lire très facilement bien que la succession des tableaux puisse paraître foutraque. Cela dit, cette guerre c'était sans doute un peu foutraque.
Pour ceux que cette page sombre de l'histoire passionne « Tranchecaille », même si il n'a pas la prétention de figurer dans le Top 10 des livres sur 14/18, mérite largement le détour. Pour les autres, mon opinion sera moins… tranchée !
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Ce polar historique, qui aura pour cadre les tranchées de la Première Guerre Mondiale, commence un peu à la Columbo…

Dès les premières lignes, nous assistons à l'exécution d'un soldat accusé d'avoir planté, non pas le bâton, mais la baïonnette dans le dos de son lieutenant.

Tout ça pour un uniforme trop grand… Tout ça pour une prise de bec qui a eu lieu entre lui et le nouveau lieutenant ? Purée, ça fait cher le tissu en trop et le froc qui descend lorsque l'on charge les tranchées des casques à pointes.

Ce polar historique ne commence pas comme un autre, n'a pas un terrain d'enquête habituel et sa manière de nous narrer l'enquête du capitaine Duparc n'est pas commune du tout.

En effet, la narration de l'enquête, les faits et gestes du capitaine Duparc, du soldat Jonas (l'accusé), ainsi que des autres protagonistes de l'histoire (témoins, gradés, soldats de l'unité et j'en passe) est racontée au travers de chapitres assez courts qui sont en fait des témoignages en direct ou rapportés, des interrogatoires menés par le capitaine (ou son greffier), des discussions qui ont lieu sur place ou ailleurs, a moyen de lettres, de scènes rapportées….

Déstabilisant au départ, ce récit, monté comme un journal de bord. Pourtant, une fois dans le bain, on se sent très vite à l'aise, même si nous sommes dans un endroit où je n'aurais pas aimé traîner à cette époque.

D'ailleurs, l'auteur ne se contente pas de nous conter l'enquête, dans les chapitres, il y a aussi des scènes de la vie quotidienne dans les tranchées, notamment les milliers de morts, pour quelques mètres de pris et dont les quotidiens titreront que c'était une percée importante.

Si je ne me suis attachée à aucun personnage, cela n'a pas entamé mon plaisir de lecture, puisque les 300 pages ont été avalées en une seule journée (sorry, ma Bianca).

Cela était sans doute dû au fait que l'on ne sait jamais vraiment qui est le soldat Jonas, l'accusé : un vrai benêt ou un type intelligent qui jouait au con ? Un vrai traumatisé par ce qu'il a vécu durant les 3 années, ou un comédien ? Un soldat qui est réellement crétin ou un qui se moque des gradés ? Un débile, un âne ? Ou un simulateur de génie ? Cet homme est une énigme à lui tout seul.

En tout cas, c'est addictif, cette enquête et elle n'a rien de banal.

Un polar historique sur fond de Première Guerre Mondiale, sous le régime de la censure, celui de la langue de bois, celui où la justice était arbitraire et inique puisque, pour un galonné assassiné, on veut exécuter un soldat, mais qu'on n'exécutera pas de galonné pour tous les soldats qu'ils ont envoyés à la boucherie.

Une LC avec Bianca réussie et que je ne regrette pas d'avoir faite, ce roman traînait depuis trop longtemps dans mes étagères et il ne méritait pas ça !

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
J'ai plus mal.
J'ai perdu tant de sang.
Je suis vidé. Mon sac est léger.
J'ai plus mal et je fiche mon camp.
Dans les jardins d'mon père, les lilas sont fleuris...
Je rentre à la maison.
C'est moi, là.
Petit bonhomme qui part.
Loin... Loin...
Salut, les gars. Au revoir, à tertous !
Je mets les bouts.
Adieu les frangins.
Plus mal.
Plus de fusil.
Plus de sang.
C'est bien fini, et pour toujours, de cette guerre infâme.
Vous bilez pas. Laissez filer.
Je glisse entre vos doigts.
Je suis l'eau qui coule.
Doucement, doucement.
Vers la mer.
Doucement.
Je m'en retourne.
A la lumière...
...
...
...
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Dans le grand silence qu'est celui de l'aube, quand le canon a fermé sa gueule, les plaintes montaient de partout, comme si la terre geignait. Les infirmiers savaient plus où donner de la civière. Nous, on était moins pressés. Les mortibus ont pas le feu au derche. Dans ces moments-là, on ramasse ce qu'on peut, d'abord les moins amochés. Les morceaux, moi je les laisse. Chacun sa manière. J'en connais qui ramènent que les bouts, c'est moins lourd à charrier. Je discute pas, mais, un cadavre complet, ça fait mal au cœur de le laisser pourrir. Je voudrais pas qu'on abandonne ma carcasse toute seule. J'aurais l'impression de mourir deux fois. C'est idiot, non ? Et puis, sans être cul-bénit, on sait pas ce qu'il y a de l'autre côté. La résurrection de la chair et la vie éternelle, amen, tout ça vous trotte dans le ciboulot. On gamberge, on se dit qu'on a peut-être plus de chances de ressusciter entier... Dame, vous voyez un bras ou un tronc frapper chez saint Pierre ? Il serait bien emmerdé pour en faire quelque chose. Le paradis, c'est pas un magasin de pièces détachées.
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Villemoye, Aisne, zone du front
30 juin 1917

- Qu'est-ce qu'il a dit ?
- Je ne suis pas certain d'avoir compris...
- Quelque chose comme "ça fait mal quand on meurt"...
- Je crois qu'il posait la question.
- Ca fait mal quand on meurt ?
- Oui, c'est cela, il demandait.
- Je n'ai pas entendu. Mon Dieu, avec le bruit de la pluie, je n'ai pas entendu...
- Cela n'aurait rien changé.
- Personne ne lui a répondu...
- A présent, il sait.

(Incipit)
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Du sol labouré montent des pleurs, des appels et des sanglots. C'est le concert des moribonds. La fanfare désaccordée. Le requiem des qui veulent pas clamser. Avec les reprises en choeur et les râles en canon.
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Le lieutenant, on l'a trouvé en ramassant les morts, Émile et moi. C'était pas beau à voir, là-dedans. Ils étaient trois dans le trou d'obus.
Emmêlés comme des pantins au fond d'une malle a dit Émile en les retournant.
Émile, il est marionnettiste, dans le civil. Vous savez, ainsi font, font, font... Ceux-là, ils avaient fini leurs trois petits tours. Les deux du dessous étaient déjà bien bouffés par les rats. Des gaillards gros et gras, dégueulasses, nourris à la chair de poilus. Ils s'en étaient donné à cœur joie, les saloperies...
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Vidéo de Patrick Pécherot
Rencontre avec Patrick Pécherot au Salon du livre d'expression populaire et de critique sociale 2018 à Arras, le 1er mai. Dernier roman : Hével. La Série Noire/Gallimard
Médiation : Tara Lennart Captation : Colères du Présent
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