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EAN : 9782374912585
186 pages
Quidam (03/03/2022)
4/5   2 notes
Résumé :
"Sculpteur réputé, Virgile est exilé dans un village des Alpes de Haute-Provence. Traductrice, Laura est mariée à un danseur, qu'elle suit dans ses tournées aux Etats-Unis puis au Japon. Ils ne se connaissent pas, pourtant un secret les lie ainsi que deux territoires : la montagne de Lure et la vallée du Verdon avant la mise en eau du lac de Sainte-Croix. Un jour enfin, ils se rencontrent. Mais pour quelle vérité ?
Dans des récits qui s'entrecroisent, la lang... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Sous le signe subtil de Jean Giono, une exceptionnelle rencontre poétique à distance entre deux artistes qui rêvent la même montagne, le même soleil et la même eau vive.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2022/07/05/note-de-lecture-zo-maica-sanconie/

Traductrice, mariée à un danseur de haut vol, Laura accompagne son époux au fil des tournées et des résidences artistiques. Dans l'Oregon de Portland, elle épie le moindre signe en ouest pour nourrir sa quête de beauté et de sens, alors que la superficialité bon enfant des rapports humains ordinaires accroît sa songerie et la forme étrange et discrète de nostalgie qu'elle éprouve sans le savoir vraiment pour les paysages et les terres de quelques arpents des Alpes de Haute-Provence.

Sculpteur renommé, concepteur d'installations artistiques de toutes tailles et de séries d'objets riches en beauté directe et en sens caché, Virgile, ayant justement installé son atelier au pied de la montagne de Lure, observe minutieusement les détails de la nature et des rares humains qui l'entourent, tout en préparant ses prochaines expositions, et notamment celle prévue prochainement au Japon. Certains de ses songes discrets sont insondables.

Deux êtres rêveurs et minutieux dans leurs songes, deux êtres que séparent des milliers de kilomètres et que rien ne semble relier, si ce n'est curieusement ces attracteurs étranges que sont pour tous deux la montagne de Lure et le village des Salles-sur-Verdon, englouti par les eaux du lac de retenue de Sainte-Croix en 1974, sous le plus grand mépris, habituel à l'époque, d'EDF et de la Société du Canal de Provence, les deux bénéficiaires de l'opération. Deux êtres que le hasard – mais peut-être aussi la nécessité – va faire se croiser au Japon, où la compagnie de danse du mari de Laura débute une ample résidence, et où Virgile expose ses dernières trouvailles. Deux êtres qui saisiront peut-être mieux ainsi le mystère qui les environne.

Autour des mystères croisés de l'humain et de la famille, de la nature, de l'art, et de l'amour, Maïca Sanconie (dont nous avions tant apprécié il y a quelques années les nouvelles de « Amor ») nous offre avec ce « Zō », publié chez Quidam en mars 2022, une extraordinaire pensée poétique naissant du dialogue à distance, comme muet et pourtant si plein, de deux esprits marqués presque à leur insu par la terre âpre, par le soleil trompeur et par l'eau vive.

« L'eau vive », c'est celle de Jean Giono, bien sûr, dont la présence subtile, relayée lorsque nécessaire par ses propres fétiches, Homère et Melville, irrigue chaque paysage évoqué, chaque source mystérieuse, chaque arpent foulé par Olivier Mak-Bouchard, visité lorsque nécessaire par un souffle digne de Saint-John Perse (« Connexion à toute ombre et toute lumière dans la grande continuité du regard » !).

Célébration intense et pourtant si humble de la nature, de la beauté et du songe éveillé parmi les grands déchirements du monde, entre évocation de la danse et continuité de la sculpture, d'une pureté travaillée, injectée d'un Orient combattant dans une Provence meurtrie, comme en écho au si beau « Ka Ta » de Céline Minard, tellurique, élémentaire et magnifiquement vivant, « Zō » s'impose comme un rêve de réconciliation, comme un songe de transmission et comme un cercle magique de poésie solaire.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Dans ce roman à la langue virtuose, esquissant avec maestria paysages visibles et intérieurs, Maica Sanconie livre un hommage habile et délicat à Jean Giono. [...]
L'autrice excelle dans ses esquisses que ce soit dans ses descriptions précises, lumineuses et délicates comme dans l'élaboration d'images aussi fortes que poétiques. Ceci sans pour autant transiger que cela soit en matière de style, résolument contemporain, que sur le fond même de ce projet qui aura demandé à l'écrivaine un long temps de maturation afin de créer son propre univers tout en marchant subtilement sur les traces de Giono dont de multiples citations viennent jalonner le fil conducteur comme pour rappeler à nous son fantôme. Les paysages visibles et intérieurs se succèdent habillement et il va sans dire qu'ils participent au charme de cette lecture.  


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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
La structure du jour m’apparaît à ce réveil lent. Très vite elle s’efface, absorbée par la structure plus profonde de ce qui reste à faire. Ce qui n’a pas été accompli. Repousser ce qui tarit l’abondance, étend le sommeil, dévore la présence. Perpétuelles poussées des océans.
Poser les mains sur le jour pour en écarter les heures sans les déchirer. Chercher le cœur tendre, encore non souillé. Répéter ce geste avec une patience de cultivateur qui sait depuis des millénaires ce que donne ce tri besogneux.
Je ramasse ces pans de jour, soigneusement, dans la foi de leur fertilité. C’est étrange, l’espérance. On la moissonne au matin et ses gerbes se dispersent d’elles-mêmes ou sous un vent sec ou sous le souffle de nos pensées ou sous les heurts des désillusions. Et le lendemain (ou le surlendemain) ou même parfois au creux de la nuit – ou alors après quelque bataille humiliante, on recommence ce même geste et elle réapparaît, intacte, avec sa proposition de foisonnement.
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Le vent défait le vol des oiseaux, les oblige à tournoyer avant de trouver un courant porteur. Il défait pareillement les cheveux des femmes, bloque la marche, tortille le linge étendu, le tresse aux fils. Estampe japonaise soudain animée, transposée dans ce village de pacoulins oh oh vite l’abri des murs mais avant la valse avec la tornade échevelée sa longue robe qui ronfle comme une voile en pleine course. Et la rafale qui me détache, me pousse au travers de la place, l’artiste pris à son plaisir ivre de sa création qui se laisse pousser aux épaules tel un gamin ah ah la bonne blague de cette tempête avec les volets partout qui claquent à se dégoncer. Seules les voitures passent en silence, tous bruits éteints au milieu de la fanfare.
Au matin, les rues sont jonchées de feuilles mortes, en tas roulés, récolte fauve de l’orage sec, et plus sec que cette sécheresse d’air il y a seulement la soif.
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Il faudrait un avion de pierres pour me soulever de cet aquarium, me ramener, pied léger, au bord des gorges où les ormes et les tilleuls dépassent la toison des chênes verts. Les flancs des falaises y sont équipés d’échelles de métal. Là-bas les hommes ont pensé à tout pour la fuite. Nous non. Nous avons seulement des images de forêts à peine conquises et d’océan du bord du monde. Comment revient-on de ce bord-là ? G. ne semble pas se poser la question. Il s’est adapté, fléchit, ploie, m’entoure de ses bras de nageur. Il ne craint pas le fracas des cascades. Il ne connaît rien à la circulation des torrents, aux limites des plateaux.
En descendant du dernier avion, j’espérais encore. Je me disais que l’essentiel était de continuer à poser les pieds sur la terre, que je finirais bien par trouver mon chemin. Je finirais bien par cesser de me perdre.
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À ma naissance, ou quasiment, ils ont commencé à fouiller les hauts flancs du Verdon. Pendant que je dormais littéralement à poings fermés dans mon berceau, ils sillonnaient la rivière, tournoyaient à ses flots bouillonnants, scrutaient les rochers, lançaient des échelles et s’enfonçaient dans la montagne tels des vers dont l’avancée semble le seul but. J’ai grandi à leurs côtés sans vraiment les voir. Ils préparaient le grand lâcher de ma vie d’adulte, mais cette histoire qu’on racontait avait pour moi la dimension d’un conte forcément irréel. Une grande ombre que le soleil chassait aussi vite que le mistral et me rendait ma vallée que je croyais éternelle- en réalité aussi solide que le fond de cale d’un navire. Ni plus ni moins. En réalité le fond d’une mer asséchée qui réclamait son eau volée par la montagne.
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Très bas, loin des quelques maisons qui terminent le village coule un torrent discret, une sorte d’affleurement humide bordé d’orties et de ronces. De la route, on n’en voit que la fraîcheur, un foisonnement vert où s’abreuvent des sous-bois, où se cache un ancien moulin, où s’enracine l’autre flanc de la pente, derrière, vers le Revest Saint-Martin et tout le rehaut des grands fonds vers Forcalquier. Grosse veine torve et brune, à l’abri de ce pays sec qui le dévorerait.
C’est ma frontière. Au nord, les bassins gouleyant des deux lavoirs, et à l’ouest le petit ruisseau envasé qui arrose quelques jardins. Je peux donc m’étendre de Lure jusqu’aux plateaux, serein, précisément irrigué de ce qui sourd, coule, ou dégorge.
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