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EAN : 9782070385621
320 pages
Gallimard (10/11/1992)
3.59/5   16 notes
Résumé :
Au début du siècle, un petit château dans le Berry. Les habitants du pays croient que chaque nouveau propriétaire apporte avec lui une nouvelle guerre. Augustin Pieyre est chirurgien à la Pitié-Salpêtrière. Il aime son métier. Il a pris, croit-il, la mesure de sa vie, entre l'hôpital et ses misères, son père, libraire place Saint-Sulpice, l'amour qu'il porte à sa ville, et les plaisirs de l'amitié. Il lui reste encore à passer de l'autre côté du miroir.
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Mon grand-père, né en 1870, médecin, mobilisé durant toute la grande guerre, inhumé dans l'Indre, aurait pu être le jumeau de l'infortuné Augustin Pierre s'il avait eu la fortune d'acquérir le chateau de Bussy et l'opportunité de connaitre Marie Antoinette Grigorieff !

Son souvenir m'a accompagné au fil des pages de ce merveilleux roman qui évoque le percement du Canal de Suez et Lesseps, la vie parisienne entre l'hôpital de la Salpêtrière et la Place Saint Sulpice, la destinée des médecins, infirmiers, patients au début du XX siècle et la vocation des bouquinistes.

L'auteur nous emmène ensuite en Sologne et dans le Berry, au coeur d'une civilisation superstitieuse (que George Sand a immortalisée), vivant ses dernière heures avant la déflagration mondiale qui assassina la France rurale.

Nous basculons alors dans l'horreur de la bataille de Rossignol, de la retraite serbe vers Salonique et vivons les affres de la médecine de guerre au milieu des malades, des blessés et des agonisants …

Décor qui permet à François Sureau de mettre en scène les acteurs du drame et de partager leurs discussions et réflexions dans une époque baignée dans la mythologie du « progrès ». Au fil des pages François Sureau s'incarne en Augustin Pierre et jette un regard lucide, mais impitoyable, sur les hypocrisies du temps et des personnages et ce avec une plume quasi proustienne et un amour de la liberté et de la responsabilité qui en est la contrepartie.

Analyse intemporelle, éternelle, et donc d'une saisissante actualité qui permet à l'avocat de plaider pour les causes qui l'animent depuis des décennies et qu'il rappelait dans son discours d'entrée à l'académie française où il succéda à l'historien Max Gallo.

L'académicien est l'un des rares intellectuels, avec Bernard-Henri Lévy et Jean-Luc Jeener, a dénoncer la dictature sanitaire et à rappeler Chateaubriand, « sans la liberté il n'y a rien au monde, elle seule donne du prix à la vie ».

Une raison de plus pour lire ou relire L'infortune.

PS : ma lecture de l'or du temps
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Sureau François – "L'infortune" – Gallimard, 1990, Grand prix du roman décerné par l'Académie française. (ISBN 978-2070385621)

Après "L'obéissance" (cf recension), c'est donc le deuxième roman de cet auteur (né en 1957) que je lis.
Le récit tourne autour d'un personnage central, Augustin Pieyre, chirurgien de réputation à l'hôpital de la Pitié Salpétrière, et se déroule dans les années 1890-1917, avec de fréquentes allusions à la guerre de 1870, par le biais de deux personnages, le père du héros, Charles Pieyre, libraire, et son ami Nathanaël de Bussy, nobliaud du Berry, ayant participé de près à l'expédition de Ferdinand de Lesseps en Egypte pour y construire le canal de Suez.
C'est par le biais de ce dernier qu'Augustin Pieyre vient à l'idée d'acheter le petit château des Bussy, où il fait la rencontre de la jeune Marie Antoinette Grigorieff, épouse d'un vieux général russe retraité vivant à proximité. Il partage dès lors sa vie entre l'hôpital parisien et la campagne berrichonne.
Sa liaison amoureuse avec Marie-Antoinette l'amène à prendre la décision de s'engager volontairement après la déclaration de guerre de 1914 : il est envoyé sur le front oriental, dans les Balkans, dans cette peu glorieuse expédition qui se termine lamentablement à Salonique.

La trame narrative est assez lâche, et s'attarde volontiers sur des personnages "secondaires" (un tel roman comprend-il vraiment des personnages secondaires ?) pendant l'un ou l'autre chapitre. le père du héros est d'emblée caractérisé par sa détestation des grands hommes (p. 34), il fournit à son ami Nathanaël un roman "plein de grands évènements, où le héros n'apprends rien" car "c'est vrai qu'il n'y a pas d'apprentissage" (p. 148).
Le portrait et le prêche du Père Philibert (pp. 188-192) à l'occasion de l'enterrement de celui qui fut le chef de service redouté et renommé, Alcocer, constitue l'un des passages les plus subtils du roman.
L'auteur dresse un tableau du milieu médical parisien de la fin du 19ème et du début du 20ème siècle, mais son objet principal réside dans l'approfondissement progressif de la personnalité du personnage central et de ses comparses immédiats, son père et l'ami de ce dernier. Sa façon de fouiller la description intérieure des personnages est quasi proustienne, tissant imperceptiblement les remarques essentielles dans les descriptions d'actes quotidiens.

L'écriture est remarquable, sans toutefois atteindre les sommets proustiens (pourquoi ?), faite de lenteur, de circonvolutions, de pesanteur.

A noter : l'un des personnages secondaires est un Alsacien qui s'appelle, bien entendu, Klein, dont le voyage à Niederbronn – alors terre de l'Empire allemand – fait l'objet du chapitre 12 d'une grande justesse de ton, ce qui est plutôt inhabituel de la part d'un auteur français.

Un auteur étonnant, à fréquenter...
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Je lis cet étrange livre qui se dit roman et qui plutôt est une suite des portraits finement peints et commentés , représentant un certain milieu , la middle-class de la France à l'époque de la Grande guerre.
Les personnages se ressemblent beaucoup entre eux et, je suppose, avec l'auteur. Certains possèdent encore des châteaux , un peu délabrés, mais tous ils travaillent . Ils choisissent comme métiers médecin ou libraire, apprécient leur travail et le font très consciencieusement , avec dévouement même. Mais il est vain d'y chercher de la passion : on n'a pas de compassion pour ses patients , le fait que certains meurent ne perturbe pas outre mesure la vie d'un médecin. Par ailleurs, il a une attitude philosophique face à la vie en général, ce théâtre , où le hasard le plus pur gouverne le  tout : les parents, le pays, les amours, la carrière, la mort même. Dans toute l'ambition, il voit  le signe de carence : on ne fait pas « ça » chez les gens bien.
Les gens des portraits ont en commun le goût des lettres et des conversations portées   sur la littérature. Ils s'amusent de la satyriasis sénile de Hugo qui portait un étui phallique en baleines de corset. Seule l'aphasie de Baudelaire leur inspirait le respect.
Ils dédaignent les grands hommes, leurs airs de supériorité. Ils n'admettaient  pas que certains s'arrogent le droit d'ordonner aux autres.
Ils n'aiment pas voyager : on pourrait se trouver en mauvaise compagnie, en voyageant.
Ce sont des Parisiens qui connaissent leur ville par coeur, en y marchant à pied, tous les jours et toutes les saisons. Ils étaient heureux en France, au centre du Monde, à Paris, au coeur de la France, à là Pitié- Salpêtrerie, au centre de Paris.
Certes, leur pays ne faisait plus trembler , comme avant, la Rome et l'Iéna. Parfois « son   peuple éprouvait l'inquiétude : les Anglais avaient la mer, les Russes la terre, les Allemands , l'histoire. Et lui, que lui restait-il ? »
Pour moi, la réponse est convaincante :
de l'esprit, de la science, les meilleurs écrivains, quelques positivistes pour le guider. C'était la France qu'il en coûtait de ne pas aimer .






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François Sureau, élu à L Académie Française en 2020, signe ce beau livre que je viens de terminer. Comme toujours, sa plume est très élégante et érudite.

J'ai beaucoup aimé l' histoire d'Augustin Pieyre, chirurgien à la Pitié Salpêtrière et futur propriétaire d'un petit château dans le Berry.. Je dirais même que c'est un personnage inspirant par son introspection, sa recherche de ce quelque chose qui le ferait "réêtre".
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Portrait réaliste d'une époque charnière habitée d'êtres comme entre deux portes, deux destins. On croit y être puis on y est, tellement les pages prennent vie. Roman étonnant, d'une froide beauté et précis comme s'il avait été écrit avec le scalpel même d'Augustin Pieyre. À la page 156 ( édition blanche Gallimard ) une scène de folie... d'anthologie.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Augustin Pieyre n'aimait pas les voyages. Il était heureux en France, heureux comme Dieu ou comme un Allemand. Il aurait volontiers fait sienne l’idée que l'étranger est une province un peu plus mal tenue, habitée par des professeurs de langues. L’Angleterre ? Un pub où des juges à perruque fouettaient sans plaisir de plates écolières ; la Russie ? Une steppe mystique éclairée de loin en loin par les feux des samovars; et l’Allemagne, hélas l’Allemagne, une manière de laboratoire scientifique au milieu des forêts où les savants pouvaient oublier la raison. Plus loin, c'était la jungle et l’anthropophagie, exception faite quand même de l’Italie, à cause du verre d’eau que l'on sert avec le café et du célèbre regard des Vénitiennes.
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Lorsque Damien Courtial revint en permission, il fut surpris de découvrir son nom sur la grande plaque de marbre de l'église. On y ajoutait, au fur et à mesure, les noms des tués. Il y avait plusieurs noms déjà. Le curé lui expliqua que ces mésaventures étaient fréquentes. Somme toute, il n’était pas mort, et c’était l’essentiel. On effacerait son nom. « Attendez un peu », fît Damien qui avait un humour de sauvage. « Attendez un peu, effacez seulement la date. On verra plus tard. » II était devenu un héros. Le curé lui trouva une âme d’anarchiste.
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C'était la France de cette époque, au début du siècle, un peu avant la guerre. Les valeurs paraissaient sûres et les sentiments profonds. L'étalon-or, les colonies et la grammaire étendaient leurs ombres protectrices. Le cardiographe de Maret mesurait les mouvements du coeur. On se passionnait beaucoup, pour ou contre Dieu, pour ou contre Dreyfus. La ligne bleue des Vosges le disputait au Tonkin. L'inauguration d'une statue à Argenton ou à Contres voyait s'opposer les partisans du goupillon et ceux de la libre pensée, et les journaux locaux rapportaient fidèlement leurs mâles paroles, qui n'épargnaient pas l'autorité publique. Le temps passait avec la lenteur des vaisseaux. Une vie ne se construisait pas en un jour.
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Les droits imprescriptibles de l'homme, mon petit, sont la liberté, l'égalité et la poursuite du malheur. C'est ce que j'ai compris là-bas, sur cette terre vide ou mal remplie où affluaient les rescapés des pogroms, sur cette terre qui n'est pas l'Amérique parce qu'il n'y a pas d'Amérique. On pourrait mettre à la porte du continent : « On peut apporter son destin. » Dès l'appontement, je vis tourbillonner des millions de destins individuels; c'était la dernière chance. Des gens qui s'étaient raconté leurs vies sur le bateau se séparèrent sans un mot, déjà indifférents, fuyant vers le lendemain.
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Est-ce un effet de l'âge, de préférer une bêtise qui a toujours été faite à une idée juste qui n'a jamais été appliquée ?
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Videos de François Sureau (26) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de François Sureau
Cette semaine, Augustin Trapenard reçoit François Sureau pour "S'en aller", édité chez Gallimard. "Je connais peu d'images aussi frappantes que celle par laquelle Nabokov décrit le départ d'un train : ce sont les wagons qui reculent le long du quai. Quant à la destination, elle n'est jamais celle qu'on a entrevue, en esprit, au moment de s'en aller".
François Sureau, écrivain reconnu, explore dans son dernier ouvrage la quête commune de ceux qui cherchent à s'évader des contraintes du quotidien. Avec une plume élégante et introspective, il évoque la fascination pour l'ailleurs, partageant des anecdotes de voyages et des rencontres marquantes. de Victor Hugo à Philby père et fils, en passant par Patrick Leigh Fermor, l'auteur tisse ici un récit captivant autour de ces âmes en quête d'une liberté insaisissable.
À travers les récits de ses propres voyages – de la Hongrie post-Mur de Berlin à l'Inde et l'Himalaya, en passant par les horreurs de la guerre en Yougoslavie – il nous transporte dans un monde où l'aventure devient le fil conducteur de l'existence. Son écriture, empreinte de poésie et de réflexion, célèbre la beauté des découvertes et la richesse des expériences vécues.
En revisitant ces moments clés de sa vie, François Sureau nous invite à contempler la grandeur de l'inconnu et à embrasser la diversité du monde qui nous entoure. À travers cette méditation sur l'aventure, il nous rappelle que la recherche de la compagnie de ceux qui partagent notre soif d'évasion est un voyage en soi, une quête perpétuelle de sens et de beauté
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