J'ai commis l'erreur de lire la quatrième de couverture et, conséquemment, je mattendais à l'histoire d'une jeune femme naufragée qui allait devoir survivre au milieu d'une tribu aborigène dans l'Australie du milieu du 19e siècle. C'est un peu ça, oui, mais le début est très lent et le naufrage n'a lieu qu'à la moitié du roman et la rencontre avec les « sauvages », une cinquantaine de pages plus loin. Une autre cinquantaine de pages et elle s'échappe. Rendu à ce point, il reste encore près d'un quart au roman. Disons que ce que j'ai lu ne se conformait pas tout à fait avec le résumé lu préalablement… Je n'ai pas détesté l'oeuvre mais mes attentes étaient toutes autres.
Avec son roman
Une ceinture de feuilles, l'auteur
Patrick White a plutôt tenté une critique de la société australienne du milieu du 19e siècle, très anglaise, voire victorienne. Les commérages hypocrites des femmes, la brutalité des hommes, c'était presque pire que la survie dans les recoins sauvages de ce monde nouveau. Ellen Roxburgh sortira transformée mais surtout traumatisée par son expérience. de basse extraction, la jeune dame ne sent pas à l'aise dans la haute société, constamment brimée par sa belle-mère et les autres bourgeoises, pleines de suffisance, de médisance, d'un dédain à peine camouflé. C'est tout un portrait de société que nous offre l'auteur. En autre, le rôle et la place des femmes. Et son mari vieux et faible n'est pas vraiment aidant. Même en plein milieu d'un naufrage, alors que tous s'emploient à pagayer pour faire avancer un canot de secours, ses préoccupations laissent à désirer. « Pour lui, la seule chose vraiment nécessaire, c'était le livre plutôt encombrant qu'il serrait contre sa poitrine, et dont le poids, les angles étaient devenus son unique consolation. Serait-il possible, sur une île déserte, de trouver assez d'ombre pour y savourer les plaisirs de
Virgile ? » (p. 209)
M. Roxburgh est encore moins aidant devant son frère, Austin Roxburgh, qui séduit la pauvre Ellen et abuse d'elle. Au moins, il accepte d'abréger ce long séjour en Tasmanie et de rentrer en Australie. Mais, malheur ! le navire est perdu et, quand la troupe de naufragés accoste une ile qui semblait déserte, il est tué rapidement et presque accidentellement, laissant sa jeune épouse sans défense. Les aborigènes ne la maltraitent pas à proprement parler (quoique, les coutumes étant différentes, ce dût être une expérience troublante). On peut se demander ce qui est pire : les « sauvages » ou les Blancs ?
Ellen Roxburgh ne dut son salut qu'à la présence opportune d'un Anglais parmi les aborigènes. Jack Chance, un prisonnier évadé, persona non grata dans la colonie, aide la jeune femme à s'enfuir, mais à quel prix ? Celui de sa raison ? Jusqu'au bout,
Patrick White nous aura tenu en haleine. Une péripétie suit la précédente, de l'action, toujours de l'action. Tellement qu'il vient un point où on souhaite que le malheur cesse de suivre la pauvre femme ! Et, malgré cela, des descriptions psychologiques précises, des analyses de personnages minutieuses, des portraits de société très justes.
Une ceinture de feuilles est décidément un roman à lire.