J'ai fait la connaissance de
Hippolyte Wouters par l'intermédiaire de mon compagnon, et j'ai découvert « l'affaire
Molière-Corneille » en même temps que la première pièce que j'ai vue de lui, il y a de cela quatre ans. La première fois où j'ai entendu cette théorie, selon laquelle
Corneille aurait écrit tout ou partie des pièces de
Molière, j'ai eu une réaction qui devait se résumer à peu près à « Naaaan, c'est trop énorme, n'importe quoi ! » Cette réaction primaire et basique est, je l'avoue, à peu près celle au niveau de laquelle restent beaucoup d'historiens ou d'hommes et de femmes de Lettres. Je la comprends, parce que je l'ai partagée, mais je pense qu'il faudrait la dépasser ! La question est intéressante et mérite vraiment d'être posée.
Si j'ai eu du mal à y croire tout d'abord, c'est que je baigne dans les études littéraires depuis que je sais lire et mon esprit était toute dévotion et admiration envers mes professeurs et mes Écoles. Ce n'est qu'en prenant de l'âge que j'ai également pris du recul sur ce qu'on m'a toujours enseigné, et que j'ai commencé à comprendre que mes professeurs n'avaient pas toujours raison. A force de discuter de cette « affaire », de lire sur le sujet et de me poser des questions, j'avoue que de nombreux doutes ont fait pencher ma balance en faveur de la thèse cornélienne.
Ce livre achève de me convaincre, car il est très bien tourné, très bien étayé, et que jamais les auteurs n'ont la prétention d'affirmer qu'ils ont raison et que tous les autres ont tort (ce que font les moliéristes) : ils se contentent de poser des faits et des questions.
Après tout, qu'est-ce qu'on aurait à perdre, si c'était vrai ? Pas grand-chose, les textes seraient toujours là, et
Molière resterait un grand metteur en scène et un grand acteur. En revanche, qu'est-ce qu'on aurait à y gagner? Beaucoup, et avant tout, un grand, un immense auteur ! Nous aurions notre
Shakespeare national, excellant à la fois dans les tragédies et les comédies !
J'avoue que j'ai beaucoup de mal à comprendre la levée de boucliers qui se dressent à chaque fois qu'on évoque le sujet : pourquoi nier tout farouchement, sans réfléchir, sans remettre en cause certaines parts d'ombre avérées ? Au contraire, qu'on mène des études, quitte à prouver formellement qu'on a tort !