Un narrateur, dont l'image s'estompe avec le soir tombant, se remémore ou invente, c'est selon, le récit d'une passion adolescente.
En Écosse, le jeune Bob reçoit la visite crépusculaire autant qu'érotique d'une mystérieuse jeune femme, ombre opaline, dont l'identité lui demeure ténébreuse... Serait-ce la blonde et autoritaire Margot, l'une de ces trois cousines ? La fragile Élisabeth ? La discrète Kitty ? Ne s'agirait-il pas plutôt d'un fantasme voluptueux ? Cette forme blanche jaillissante ne serait-elle qu'une pollution nocturne juvénile ?
Cette nouvelle, somme toute gothique (la nuit, un sombre parc, une strige sensuelle et lactescente, une atmosphère onirique...), se lit avec allant : amour donné contre amour reçu, "bonheur d'aimer" contre "celui d'être aimé", la fin douce-amère résonne singulièrement. Qu'il est difficile de devenir un homme.
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Bob, jeune homme de quinze ans, aime une jeune femme et est aimé d'une autre.
C'est à la suite d'une nuit romantique sous la feuillée dans le parc d'un château en Écosse que Bob connaît ses premiers émois et sa première expérience. Ses trois cousines déjà femmes l'intimident et la belle inconnue de cette nuit inoubliable serait-elle une des trois ? Laquelle ?
Tourments et doutes vont assaillir Bob jusqu'à la découverte de l'amante.
Le talent de Zweig est au rendez-vous pour nous décrire dans une atmosphère mélancolique et merveilleuse les élans de la passion.
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Un conte mélancolique, d'une tonalité clair-obscur, sur les premiers émois que provoquent chez un jeune adolescent en proie aux duperies romanesques de son esprit, les illusions et les charmes de l'amour jusqu'alors inconnu .Cette fable illustre bien la nostalgie d'un sentiment s'avérant éphémère et perdu pour toujours.
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Il aimerait que toutes cessassent leurs visites et qu'il n'y eût que Margot qui vînt le voir, rien qu'une heure, rien que quelques minutes ; après il demeurerait seul pour rêver à elle sans être importuné ni dérangé, bercé par une douce joie, comme porté par de doux nuages, blotti dans la contemplation des visions consolatrices de son amour.
Certes, je ne te parlerai pas de moi, car dans ces villes immenses notre vie est pauvre en aventures ou du moins elle nous paraît telle, parce que nous ne savons pas encore ce qui nous appartient en propre. Mais je vais te conter une histoire qui convient à l’heure présente, laquelle, à vrai dire, n’aime que le silence. Et je voudrais qu’elle eût un peu de cette lumière crépusculaire, chaude, douce, fluide qui s’étend comme un voile sous nos fenêtres.
examine avec plus d’attention son visage, comme s’il le voyait pour la première fois. Et, frémissant de plaisir et tout près de pleurer, il trouve avec joie que cet orgueil l’a rendue plus belle, et ce mystère plus séduisante. Le regard de l’adolescent suit avec volonté la ligne arrondie de ses sourcils qui se relève brusquement pour former un angle aigu, plonge dans la froide cornaline de ses yeux gris-vert, caresse la peau transparente de ses joues ; il contourne ensuite l’arc tendu de ses lèvres qu’il voit à présent plus voluptueux, erre autour de ses cheveux clairs ; puis il s’incline rapidement, embrassant avec délices sa personne tout entière.
Dans le débordement de sa passion, il jaillit enfin du plus profond de son âme, ce cri de joie et de désespoir, de désir, de haine, de colère et d’amour, ce cri qui contient trois journées de tourment : Margot, Margot ! Et pour lui la musique de l’univers chante dans ces deux syllabes.
Rien de ce qui existait jusqu’ici ne compte plus, l’ivresse, le frisson, le spasme de la possession, la colère devant le secret si bien gardé : l’amour emplit tout son être d’une douce mélancolie, un amour presque sans désir, mais tout-puissant cependant. Pourquoi l’avoir tant tourmentée ? Ne l’a-t-elle pas comblé pendant ces trois soirs ? Sa vie n’est-elle pas passée brusquement d’un sombre crépuscule à une aurore éclatante et redoutable, depuis qu’elle lui a fait connaître la tendresse et le brutal frisson de l’amour ?
Stefan Zweig, auteur à succès, se voulait citoyen d'un monde qu'unifiait une communauté de culture et de civilisation. Il n'a pas survécu à l'effondrement de ce «monde d'hier» qu'incarnait la Vienne impériale de sa jeunesse.
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