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Séculaires de Olivier Barbarant
SEPTEMBRE Était-ce un reste de rêve confus? Ce matin je me suis levé comme écrasé de souvenirs Des tours d'acier des centres commerciaux pleins de la mélancolie moderne des banlieues Créteil Soleil La Belle Épine Les Quatre Temps et leurs verrières barrées de pluie La correspondante espagnole haute deux fois comme moi jetant un regard plein de soleil sur le déluge et mes parents jeunes alors nous emmenant au cinéma Je suis l'aîné de ce qu'ils furent et dans seize ans j'aurai passé l'âge auquel tous deux disparurent cela n'a pas de sens on m'avait voué à mourir jeune et je finirais plus vieux qu'eux dix ans depuis dix ans de cendres à descendre et c'est la vie sans eux qui m'aura fait vieillir Les souvenirs sont des morceaux cela tremble et s'entrechoque Ma mère en robe noire sous notre cerisier Mon père traversant la salle des thèses raide et intimidé une bouteille d'Évian à la main pour me verser un verre d'eau ou bien leurs nuques depuis la banquette arrière de la voiture pour lui châtain pour elle variant selon les saisons et la douceur de glisser ensemble dans la nuit du périphérique Comme une Troie défaite dont on a rasé les remparts Il ne reste de nous qu'une avenue glissant sans fin vers un ciel gris Et de la main je maintiens maladroitement sur ma face Un masque d'adulte qui glisse Depuis dix ans quelles nouvelles Vos petits-fils ont grandi De ce que vous portiez l'effondrement s'est poursuivi L'époque est morose et tragique Comme insensé ce matin le long sanglot sur la fenêtre : D'un automne l'autre Je recouds des pluies. + Lire la suite |