Avec douze écrivains de l'Anthologie
Avec Anne le Pape (violon) & Johanne Mathaly (violoncelle)
Avec Anna Ayanoglou, Jean d'Amérique, Camille Bloomfield & Maïss Alrim Karfou, Cyril Dion, Pierre Guénard, Lisette Lombé, Antoine Mouton, Arthur Navellou, Suzanne Rault-Balet, Jacques Rebotier, Stéphanie Vovor, Laurence Vielle.
Cette anthologie du Printemps des Poètes 2023 proposent 111 poètes contemporains et des textes pour la plupart inédits. La plus jeune a 20 ans à peine, le plus âgé était centenaire. Tous partagent notre quotidien autour de la thématique corrosive des frontières. Leurs écrits sont d'une diversité et d'une richesse stimulantes. Ils offrent un large panorama de la poésie de notre époque. Avec notamment des textes de Dominique Ané, Olivier Barbarant, Rim Battal, Tahar Ben Jelloun, Zéno Bianu, William Cliff, Cécile Coulon, Charlélie Couture, Jean D'amérique, Michel Deguy, Pauline Delabroy-Allard, Guy Goffette, Michelle Grangaud, Simon Johannin, Charles Juliet, Abdellatif Laâbi, Hervé le Tellier, Jean Portante, Jacques Roubaud, Eugène Savitzkaya, Laura Vazquez, Jean-Pierre Verheggen, Antoine Wauters
Mesure du temps
La fenêtre qui donne sur les quais
n'arrête pas le cours de l'eau
pas plus que la lumière n'arrête
la main qui ferme les rideaux
Tout juste si parfois du mur
un peu de plâtre se détache
un pétale touche le guéridon
Il arrive aussi qu'un homme
laisse tomber son corps
sans réveiller personne
Guy Goffette Ces mots traversent les frontières, 111 poètes d'aujourd'hui
Lumière par Iris Feix, son par Lenny Szpira
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Quand tombent des étoiles, le ciel ne peut recoudre leur beauté.
J'aspire au langage des chemins de rage.
Je veux chanter la trêve de mes fissures. Au nom du poing à lever, prendre la rue avec la main ouverte pour dessiner des points libres. Brûler les portes pour dire beauté de cendre dans l'éclat du verre nouveau. Fuir front nu pour revendiquer soleil.
Là sera mon chant de traversée.
Je t'écris avec du retard dans la gorge. Je te parle avec mes oiseaux morts, mes veines blanches et mes orteils arqués: fruits amers des kilomètres jetés entre nos cœurs. J'essaie d'avancer vers toi, espérant voir se fondre nos envies dans la même eau. T'aimer est le plus doux chemin vers la vie. J'avance. J'ai, chaud en moi, le souvenir de chacun de nos regards, chacun de nos battements communs, reste encore vif en moi ce moment où on s'est frôlées la semaine dernière (...)
J'en tremble. Je tremble, pardonne moi si mes mots te parviennent trébuchants. Sache qu'ils sont nés avec la mission de te fixer droit dans les yeux et de te dire mon rêve d'y habiter. Je connais ton regard, c'est la mer qui veille sur le printemps, j'y vois le large chaque fois que je le croise et je sens s'embraser nos élans, à faire tomber les hautes murailles qui nous écartent.
A reprendre les couloirs de mon enfance, je récolte des débris de rêve par éclaboussure.
Elle préfère porter sa nudité comme un drapeau troué sur le cœur
pour boire le jour sans filtre.
Je laisse ma tête se reposer sur le seuil du silence, invocation d'une dernière goutte de sommeil.
Issue de toutes contrées, le cul botté par des plaies sociales, une marée humaine est arrivée ici au nom de la lumière un jour de ciel noir, un jour de gueule pâle. Nomade comme une vague, libre, si liberté, c'est reprendre ce que les malades du pouvoir privatisent à tort. Une foule de rejetés est arrivée dans ce coin un jour de soleil déchiré. Un jour de lutte, à marquer les vitres de l'Histoire d'un sacré coup de pierre. Un jour de poing levé, à planter un drapeau de flammes sur les collines de la mémoire. Des marginalisés sont arrivés en horde et se sont installés, pour faire valoir leur droit d'habitants de la Terre en s'offrant une parcelle. Un jour à en vouloir à la lâcheté, un jour à cracher sur l'état qui s'était décrété propriétaire, laissant des terrains vagues à la merci des bêtes et des déchets tandis que des milliers de citoyens étaient sans demeure. Il y a une vingtaine d'années, une marée humaine est arrivée ici pour forcer la ville au large, pousser la mer et en faire ligne d'habitation. Inhabitable pourtant.
[ Temps mort ma langue ]
sur ma tête les jours
si gros silence
forfait contre le calendrier
quête-carcasse qui taille l'élan
se vouloir cœur
et se révéler faible tel l'os que ravage un feu
chaque visage
pays brisé ou fuguent les aurores
quel vent recueillera mes fragments
corps mien
mémoire que la mort se remue à remonter
dans la bouche
murailles qui pèsent aussi fort
que flamboie une colère
m'improviser oiseau
mais l'aile par les hyènes enveloppée
ai peine suffisante
à égaler sang putréfié
automnes dans la gorge
écrire ma chute à la fleur
elle délègue jusqu'à ma flamme
un imparable crachat
Tu ne restes pas sale, Tête Fêlée ! La douleur te mange déjà dedans, tu n'as pas besoin de faire sa publicité. Tes tripes, ton sang, ils baignent dans l'ombre. Garde au moins le soleil sur tes lèvres, laisse couler la lumière sur ta peau. Lave-toi ma fille.
Voilà. Me laver malgré tout.
Le ciel des insoumis n’a point de pacte avec la boue.
Le ciel indigné ne rampe pas avec les dos courbés