C'est par curiosité que j'ai choisi ce livre car le nom d'
Emily Dickinson revenait souvent dans la littérature mais je dois avouer que je connaissais peu de chose de cette poétesse (il faut rappeler que je ne suis pas versée dans la poésie).
Dominique Fortier utilise son propre itinéraire dans les différentes villes et maisons où elle a vécu, entre Boston et Montréal, pour évoquer celui de cette femme si discrète, vivant recluse, presque cloîtrée à la fin de sa vie dans sa chambre, à Homestead dans le village de Amherst (Massachusetts), par peur ou ayant une vie intérieure tellement riche qu'elle fuyait le monde, restreignant de plus en plus son espace de vie pour se concentrer sur ses observations et l'écriture.
Dominique Fortier évoque ce qu'elle imagine être la vie de la poétesse : une enfance complice avec Austin et sa soeur Lavinia avec qui elle partagera une grande partie de sa vie, les deuils qui l'ont éprouvée, sa fuite de la société et du monde. Une vie de papier et d'encre.
N'existant qu'un seul portrait de cette femme, ayant épluché tout ce qui a été publié, elle fait le choix d'imaginer sa vie, ce qui la rattachait à cette maison, aux liens qui l'unissaient à sa famille, aux tâches domestiques auxquelles elle était astreinte, mais avec pudeur et en gardant malgré tout la part de mystère qui l'entoure à jamais.
"(...) j'écume les sites où l'on voit des photos des deux maisons, Homestead et Evergreens, de la ville d'Amherst au temps des Dickinson. Jusqu'à maintenant, c'est une ville de papier. Est-il préférable qu'il en soit ainsi, ou devrais-je, pour mieux écrire, aller visiter en personne les maisons transformées en musée ? Simplement posé : vaut-il mieux avoir la connaissance, l'expérience nécessaires pour les décrire telles qu'
elle sont en réalité, ou la liberté de les inventer ? (p24)"
Cette biographie survole une vie, de l'enfance à sa mort et met en évidence la priorité de l'écrivaine, s'oubliant en tant que femme, réduisant sa vie à quelques robes blanches, pour se concentrer sur ce qui l'anime, la nourrit, son oxygène :
"Soit, songe Emily en se remettant à frotter avec une rage renouvelée. Quelques jours par mois je serai une femme. le reste du temps j'écrirai. (p75)"
Est évoqué également l'importance des mots, de ceux recherchés mais aussi de la littérature
"Chaque livre en contient cent. Ce sont des portes qui s'ouvrent et ne se referment jamais. Emily vit au milieu de cent mille courants d'air. (p40)"
Emily Dickinson gardera tout son mystère mais
Dominique Fortier restitue une vie telle qu'
elle se l'imagine et lui rend un bel hommage en la mettant en lumière, elle qui ne cherchait qu'à vivre dans l'ombre, consacrant sa vie à une forme d'expression où chaque mot doit être juste, choisi pour refléter l'exactitude de la pensée, ne cherchant pas à être connue, cachant ses textes et ayant demandé à Lavinia de les brûler à sa mort.
Je comprends mieux désormais l'attirance de certains écrivain(e)s pour cette femme qui m'a beaucoup fait pensé aux soeurs Brönté ou à
Virginia Woolf.
J'ai beaucoup aimé.
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