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EAN : 9782253182979
336 pages
Le Livre de Poche (17/06/2015)
3.99/5   58 notes
Résumé :
Deux amoureux se perdent dans la jungle et rêvent de se marier au prochain village pygmée : Traîne-Savane raconte l’histoire (vraie) de ce mariage romanesque décidé sur un coup de tête, au bout d’une longue errance au cœur de la forêt congolaise. Cent cinquante ans plus tôt, le zélé missionnaire David Livingstone déambulait le long des fleuves d’Afrique centrale, à la recherche d’une terre promise, d’une autoroute du commerce ou de sources miraculeuses. Fantasque et... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (26) Voir plus Ajouter une critique
3,99

sur 58 notes
Ça vous dirait un petit treck dans la jungle ?
Non Petit Poucet, ça va pas être possible, le psy te le déconseille toujours formellement.
Pour tous les autres, deux options possibles.
Le plus classique, contemporain, en compagnie de Guillaume et de sa dulcinée Congolaise Belange, qui se proposent de savaner, néologisme offert, ardemment dans le but de rallier le peuple pygmée.
Le plus old school, pour les puristes qui en ont sous la semelle et dans le ciboulot, aux côtés de David Livingstone je présume ?, l'enfer à l'état pur. Balade virtuelle certes, puisque Livingstone je présume ? n'est plus, mais néanmoins apocalyptique au vu des innombrables difficultés rencontrées alors dans sa volonté farouche d'évangéliser le continent africain en y implantant une mission qui jamais ne verra le jour.

Au travers de ces deux récits se faisant écho, cho, cho, cho, Guillaume Jan Travel Tour vous fera crapahuter jusqu'à l'écoeurement, l'épuisement et autres joyeusetés en ent.
Immersion maximale, de celles qui vous filent crampes et ampoules en fin de journée, c'est dire la faculté de l'auteur à vous faire ressentir l'âpreté de tels défis physiques. Chiffe molle s'abstenir.
Si le périple de ce séduisant petit couple amoureux est gentiment touchant, celui de Livingstone relève de la fascination.
Une abnégation de tous les instants. Aveugle, insensée, hors norme. La quête de toute une vie et quelle vie. Un idéal sacrifié sur l'autel de la démesure. Passionnant et bouleversant tout à la fois.

Traîne-Savane séduira les puristes comme les aventuriers de salon tout en les éduquant. Que demander de plus...

3,5/5
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C'est l'histoire vraie d'un aventurier en tongs qui traverse un bout d'Afrique avec sa dulcinée congolaise. Les tourtereaux vont improviser leur mariage sur un coup de tête dans un village pygmée après avoir passé des jours à déambuler dans la forêt. Guillaume Jan nous prend par la main et nous raconte son périple avec tendresse et désinvolture. Il crie son amour pour Belange, sa princesse bantoue au corps de liane. Il s'insurge contre la situation catastrophique de cette république démocratique en perdition, contre cette misère s'abattant sur le peuple alors que les ressources naturelles, notamment en métaux et minerais précieux, devraient faire du Congo un des pays les plus riches du monde. Pour autant, son propos ne sombre pas dans un infini pessimisme. Sa description de l'hallucinant quotidien de la population, notamment dans la tentaculaire capitale Kinshasa, reste empreinte de légèreté et d'humour. de beaucoup d'affection et d'admiration aussi pour ces hommes et ces femmes faisant face à l'adversité avec une forme de nonchalance qui force le respect.


Si le mariage avec Belange constitue la trame narrative principale du livre, l'auteur dessine en parallèle le portrait du docteur Livingstone, sans doute le plus célèbre aventurier du 19ème siècle. Un écossais fantasque qui aura passé trente ans, soit la moitié de sa vie, auprès des indigènes. On découvre un Livingstone rêveur, maladroit, lunatique, pitoyable meneur d'hommes, antiesclavagiste convaincu, piètre missionnaire n'ayant jamais évangélisé le moindre autochtone et surtout explorateur calamiteux. Un Mundélé (blanc) fou d'Afrique, happé par ce continent au point de demander à ce qu'on y enterre son coeur.


En entremêlant son épopée avec celle de Livingstone, Guillaume Jan crée un récit aussi instructif que vivant dans une langue savoureuse. Après Sylvain Tesson et Julien Blanc-Gras je découvre un nouveau travel-writer français pétrit de talent, drôle, lucide, plein d'humilité, prenant le temps de s'émerveiller devant les personnes et les paysages et qui a simplement « envie de voyager comme on a envie de faire l'amour ». Un bien joli programme, n'est-il pas ?

Lien : http://litterature-a-blog.bl..
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Traîne-savane c'est le récit de voyage de Guillaume Jan et sa compagne, la belle Belange, à travers la jungle congolaise. Les deux amoureux s'aventurent dans un périple qui doit les mener de Kinshasa à Oshwé, la capitale des Pygmées, avec en point d'orgue leur mariage. A pied , sur la moto de Joël ou en taxi-brousse, le jeune couple s'engage sur le Chemin des murmures, traverse la luxuriante forêt congolaise que Belange connait si bien (notamment les différentes espèces de plantes et leurs usages). Guillaume Jan nous transporte à travers cette végétation dense et ses paysages magnifiques avec enchantement, il aime l'Afrique et cela se sent dans son écriture. L'écrivain-voyageur est un doux rêveur et leur voyage est un bonheur simple. Jan n'en oublie pas pour autant son sens critique, il fait face à la réalité économique du pays, cette misère qui s'abat sur le peuple alors que les ressources naturelles du Congo sont importantes (notamment en métaux et minerais précieux). La situation à Oshwé est pour le moins préoccupante, il constate les conditions de vie déplorables ainsi que les inégalités qui existent entre les Kundus (l'ethnie dominante) qui possèdent tout et les Pygmées qui sont leurs esclaves. Pour autant, Guillaume Jan ne tombe pas dans le pessimisme à outrance et fait même preuve d'humour et de légèreté ce qui adoucit le tableau.

Mais ce qui fait le charme de ce récit, c'est l'ombre de Livingstone qui plane avec bienveillance sur nos deux jeunes gens. L'auteur dessine en parallèle le portrait de l'explorateur écossais David Livingstone. Cette partie du livre est passionnante, Jan nous raconte la vie de Livingstone, sans concession. Ce n'est pas un bon missionnaire, il n'a pas attrapé beaucoup de cloques dans les mains à distribuer des Bibles. C'est un homme distant, maladroit, très vertueux, anti-esclavagiste convaincu, un rêveur qui n'a pas hésité à repartir en Afrique, laissant sa femme et ses enfants sans le sou (d'ailleurs, il ne les connaît que très peu). C'est un nomade solitaire qui aime être à la tête d'une équipe de bons sauvages dociles et débonnaires, à marcher sur une terre inconnue sans avoir à se compliquer la vie avec les rapports humains. La vie de Livingstone est faite de hauts et de bas : après le succès de sa première expédition qui fait de lui un héros au pays, il devient un explorateur raté et moqué par ses pairs, secouru de justesse par Henry Morton Stanley. Livingstone connait pourtant une fin tragique, lui qui ne veut pas "rentrer sans achever sa mission, ça serait pour une vie de disgrâce et de misère". C'est en Afrique qu'il voulait être enterré et que son coeur repose. Sur ce dernier point, il sera exaucé.

La liberté de ton de l'auteur fait que l'on est loin du récit de voyage ennuyeux et étriqué, au contraire, cela fait longtemps que je n'ai pas lu un récit aussi captivant de bout en bout. Sur les traces de nos voyageurs, on se fond dans la jungle, escorté par ses bruits, son odeur, sa langueur. On s'imagine également aux côtés de Livingstone, ce Mundélé (blanc en Lingala) aux nombreux défauts mais aussi touchant par son amour sincère qu'il porte à l'Afrique, traversant les lacs, les affluents, les cascades, les plateaux, les savanes, les marécages, les mangroves et les lagunes de l'Afrique australe en sa compagnie. Un vrai coup de coeur que ce livre, assurément un des meilleurs récits de voyages qu'il m'ait été donné de lire !!!
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Ce livre est assez atypique dans ma bibliothèque, ce n'est pas mon genre de lectures a priori. Mais, comme je n'ai jamais été déçu par les éditions Intervalles, je l'ai commencé avec envie sans vraiment savoir de quoi il retournait puisque je ne lis pas ou peu les quatrièmes de couverture. Et bien m'en a pris, car ce livre de voyageur, de baroudeur disais-je plus haut est passionnant. Il alterne les chapitres : un coup un sur Guillaume Jan et Belange qui marchent sur le Chemin des murmures à la rencontre des Pygmées, un coup sur la vie et les marches de Livingstone. Les deux en parallèle, toute comparaison gardée.
De Livingstone, je connaissais le nom, point l'oeuvre. "Livingstone n'est pas un tocard, mais il n'est pas non plus le héros qu'on croyait." (p.281). Certains de ses biographes ont voulu en faire un personnage mythique voué à sa mission d'évangéliser les Africains et à celle de découvrir des passages sur les fleuves congolais. Or il n'a converti qu'un seul homme qui s'est empressé de revenir très vite à ses croyances et s'il a beaucoup marché, il a peu découvert. Par contre, à l'inverse de beaucoup d'explorateurs, il a découvert les hommes et les femmes de ce continent, il les a d'abord respectés (dans les années 1850/1870, la traite négrière est encore très active, notamment menée par les Portugais et les Arabes et lui s'est à de nombreuses reprises élevé contre cette pratique très fructueuse) et les a aimés. Guillaume Jan le compare à Don Quichotte, d'ailleurs beaucoup de chapitres commencent avec une phrase de Cervantès en exergue, un chevalier qui se bat contre rien de concret, qui tente beaucoup sans vraiment réussir. Il fut beaucoup malade souffrant terriblement mais jamais il ne renonça voulant prouver au monde qu'il n'avait pas tort de croire aux hommes de ce pays et qu'on pouvait travailler avec eux (l'Angleterre colonisera d'ailleurs une partie de ce continent après la mort de Livingstone). Les chapitres consacrés à Livingstone sont de très belles pages, une mini-biographie d'un homme à (re)découvrir pour ce qu'il fut réellement et non pas pour l'image qu'il eut après son décès, la plume alerte à la fois critique et respectueuse, un rien moqueuse et admirative de Guillaume Jan rend ces passages très vivants et passionnants.
Les autres chapitres sont consacrés à la marche de Guillaume et Belange (et Joël leur guide qui les accompagnera plus qu'il ne les guidera vraiment ne connaissant pas plus le chemin qu'eux). Ces chapitres sont l'occasion pour l'auteur de faire le point sur la vie au Congo, ce pays au sous-sol riche qui fut exploité (hommes et biens) par Léopold II roi des Belges qui en fit sa propriété personnelle, puis par ses divers gouvernants qui s'enrichirent personnellement au détriment des Congolais qui eux s'appauvrirent. Depuis que les premiers Européens se sont aventurés sur ce continent au XVème siècle, ils n'ont eu de cesse d'en profiter. le Congo d'aujourd'hui ne réussit pas à sortir de la misère, sa capitale est pauvre, les Kinois (les habitants de Kinshasa) vivent dans des bidonvilles, ils ne survivent que grâce à des combines, des ventes assez incroyables ainsi Belange a pu investir dans un congélateur, et elle vend de la glace en petites portions, un autre loue des chaises, ... le constat de Guillaume Jan est terrible, fait peur et s'il dit bien que la faute originelle est la nôtre à nous Européens, il précise également que les potentats locaux en ont profité également et qu'il ne faudrait sans doute pas grand chose pour que le pays reparte. Ces chapitres sont aussi l'occasion pour l'auteur-marcheur d'un voyage initiatique, au lieu de passer de l'enfant à l'adulte, il passe du solitaire qui aime arpenter les pays, à l'homme amoureux qui envisage la vie à deux qui se voit sans difficulté partager son existence avec Belange, qui partage avec Livingstone la fascination pour le pays de celle-ci et pour ses habitants. Comme pour les chapitres consacrés au médecin-missionnaire, l'écriture de Guillaume Jan rend vivante son aventure et instructif mais pas didactique son constat sur la vie au Congo.

Encore un beau texte chez Intervalles.
Lien : http://lyvres.over-blog.com
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Roman ou récit ? La frontière est mince et finalement, peu importe. L'auteur nous embarque dans son monde, celui d'un journaliste-écrivain-voyageur, amoureux de la forêt vierge et de l'Afrique. En puisant dans l'histoire, il nous invite à une exploration aussi poétique qu'instructive où se dessine le passé tourmenté du Congo, objet de convoitise des explorateurs et des colonisateurs. Mais il est surtout question d'amour, pour une femme autant que pour une terre, et d'une soif de découverte qui rassemble les curieux par-delà les siècles.

Guillaume Jan alterne donc les chapitres, entre présent et passé, créant des liens entre deux histoires qui peuvent sembler éloignées, la sienne et celle de David Livingstone qui a foulé les mêmes terres plus d'un siècle et demi avant lui. le récit des expéditions de Livingstone, que l'auteur compare à Don Quichotte est aussi rocambolesque que passionnant, renvoyant à une époque où s'affrontaient les grands explorateurs avides de renommée. Il réussit à nous toucher avec ce portrait d'un homme totalement obnubilé par sa quête au point de délaisser sa famille et de la laisser dans une terrible situation de dénuement, mais qui est visiblement rattrapé par un amour sincère pour cette terre qu'il parcourt et tente de cartographier malgré les fièvres, les maladies, les expéditions concurrentes et les intérêts divergents.

Reste-t-il des explorateurs en 2015 ? "J'ai envie de voyager comme on a envie de faire l'amour" nous livre Guillaume, pour tenter d'expliquer la bougeotte qui lui a fait traverser les vastes étendues désertiques aux quatre coins de la planète. Jusqu'à la rencontre avec Belange, la jolie congolaise dont le souvenir le ramène dans la savane du Congo et le conduira jusqu'au mariage. Les pages consacrées à la femme qu'il aime sont étonnantes de fraîcheur, de sensualité et de poésie, presque une métaphore des sentiments qu'il porte à l'Afrique. Avec une belle puissance d'évocation, il parvient à camper les différences entre deux mondes que tout sépare mais qu'un rien peut rapprocher. Question d'écoute, de tolérance, de curiosité pour les différences.

La réussite de ce livre est due à l'absence d'angélisme. On est loin de situations idylliques, l'auteur n'hésite pas à dépeindre la réalité des expéditions dans la forêt vierge ou la savane, les bestioles, l'absence de carte ou de GPS, les routes défoncées, les transports aléatoires... Mieux vaut avoir un ange gardien ou une Belange, qui connaît sur le bout des doigts les plantes qui soignent. Nul doute que Livingstone, épuisé par les maladies aurait apprécié d'avoir cette jeune femme à ses côtés. Pas d'angélisme donc. Et un panorama bien senti des différents maux qui se sont abattus sur le Congo, d'abord pillé pour ses richesses (traite des noirs, production du caoutchouc...), annexé et sur exploité par les Belges avant d'être achevé par l'un des pires dictateurs qu'ait produit le continent africain.

J'ai passé un très bon moment en compagnie de ces deux explorateurs, j'ai appris plein de choses... Et j'aime bien refermer un livre avec le sentiment d'être un peu moins ignorante et peut-être un peu moins bête. Quand en plus la leçon est délivrée avec la manière, on ne peut que recommander la lecture de cet ouvrage qui vient juste d'être couronné par le Grand prix SGDL du roman.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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critiques presse (1)
Bibliobs
02 juillet 2014
Mais son « Traîne-savane » n’est pas seulement un livre sympathique. C’est aussi une terrible photo du Congo postcolonial, ce pays qui devrait être si riche et où «on a rien en tout».
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Au petit jour, à la lueur de la lanterne d’Elvis, nous rassemblons nos affaires dans la case de boue sèche. Ce n’est pas très difficile, nous sommes partis légers de Kinshasa. Belange n’a que son sac à main bleu ciel, avec une bande de tissu imitation léopard, un camouflage idéal pour la jungle. A l’intérieur, elle a fourré en vitesse un coupe-ongles, du talc, des médicaments pour soigner les crises de paludisme et des comprimés pour atténuer les courbatures, trois culottes à fleurs, un tee-shirt First Lady et des boucles d’oreilles bleues, pourquoi s’encombrer davantage ? Mon sac à dos est à peine plus grand. J’y ai casé deux caleçons de rechange, un honnête morceau de savon, de la crème solaire pour épargner mes bras pâles, une lampe de poche, mon téléphone portable, qui ne devrait pas beaucoup servir, une brosse à dents et nos deux pagnes – le pagne, c’est le couteau suisse africain, il sert de drap ou d’oreiller, d’écharpe pour les soirées un peu fraîches, de vêtement léger mais digne quand on descend se laver à la rivière, de serviette, de paravent ou de marquise, de porte-bébé pour les mamans, de baluchon de fortune, de ceinture de sécurité dans les minibus qui n’en sont pas toujours pourvus ou encore à se protéger la tête du soleil ou des accidents de moto si on l’enroule en turban ; et si l’on noue une de ses extrémités, il fait porte-monnaie. J’ai aussi un livre, une épaisse biographie de David Livingstone, 1813-1873, le père des explorateurs de l’Afrique, le premier Blanc à vouloir s’y fondre corps et âme, ça peut être instructif. En cours de route, nous avons également acheté des boîtes de lames de rasoir pour les offrir aux Pygmées, ce sera notre cadeau d’arrivée. C’est tout. Je ne connais pas très bien l’Afrique, mais suffisamment pour savoir qu’il vaut mieux s’y charger au minimum ; je suis toujours épaté par les voyageurs qui partent vadrouiller dans le monde lestés d’une montagne sur le dos – où la mettront-ils cette montagne, quand il faudra s’entasser pêle-mêle dans une pirogue ou marcher toute la journée sous le soleil écrasant ? Nous n’avons rien pour nous protéger de la pluie – ce n’est pas du tout raisonnable, d’autant que l’orage a tonné une partie de la nuit. Nous n’avons pas non plus de moustiquaire et nous portons des tongs aux pieds, tant pis si nous croisons un serpent en colère.
Finalement, nos plus redoutables adversaires seront les fourmis : voyager, ça sert aussi à revoir ses préjugés.
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Elle [Belange] pouvait m'héberger dans la cour des miracles où elle logeait, près du marché central : treize appentis où s'entassent une centaine de personnes, des veuves de guerre, des fonctionnaires licenciés, des vendeurs de marijuana, des filles-mères et des familles de dix. Avec un seul robinet pour abreuver toute cette palanquée. Les kulunas, c'est-à-dire les voyous du quartier, y terminent parfois leur nuit, ils dorment quelques heures sur le ciment sale avant de se revigorer avec un joint et quelques gorgées d'alcool de maïs. Le fatras de cabanes est rebaptisé Maman Yemo, du nom de l'hôpital le plus insalubre de Kinshasa, où l'on a plus de chance d'attraper une infection mortelle que de ressortir guéri. Ici, les maladies se faufilent dans la crasse, prévient Belange. Quand elle va faire sa toilette, entre trois murs de parpaings branlants, elle ajoute des gouttes de crésyl dans son seau d'eau, en espérant que ça suffira pour tuer les microbes.(p.43/44)
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Deux heures plus tard, le bourgmestre nous réveille en nous touchant l'épaule : il vient nous apporter notre extrait de mariage, l'acte officiel qui prouve que nous n'avons pas rêvé pendant notre délicieuse somnolence, et il repart aussitôt, dans ses grosses bottes en caoutchouc. Je pose les yeux sur le document, qui est cousu d'erreurs. Vite, je me lève pour rattraper l'élu, pour qu'il corrige au moins l'orthographe, mais Bélange me retient.
- Laisse, c'est la meilleure preuve que l'acte est authentique. Dans les villages, aucun bourgmestre n'écrit sans faire de fautes.
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Les Pygmées ne sont plus que cinq ou six cent mille dans le bassin congolais, réfugiés dans quelques poches de résistance réparties dans la forêt. Ce sont peut-être les derniers chasseurs-cueilleurs de la planète, ils comptent parmi les derniers témoins de ce qu'était l'humanité avant l'invention de l'agriculture. Ce sont des rescapés de l'histoire. Pour schématiser, ils subissent le même sort que les Indiens d'Amérique : des envahisseurs occupent leurs terres, les parquent dans des ghettos et les clochardisent avant de dire : Voyez comme ils sont sales. Dans quelques années, si la culture pygmée disparaît, les mêmes envahisseurs, ou leurs descendants, écriront d'émouvantes panégyriques pour célébrer la gloire envolée de ce peuple des forêts perdues.
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Au milieu du XIXè siècle, la géographie de cette partie du globe est un encore un mystère. Les cartographes y dessinent des plantes farfelues et des fauves imaginaires pour décorer, pour meubler. Le cœur de l'Afrique ressemble à un motif de tapisserie et la communauté scientifique n'arrive toujours pas à croire que les sommets des plus hautes montagnes, comme le Kilimandjaro, puissent y être couverts de neige alors qu'ils sont si proches de l'Equateur - en 1849, quand les explorateurs allemands Johannes Rebmann et Johann Krapf font part de cette découverte, les experts de salon mettent sérieusement en doute leurs allégations. On les traite d'affabulateurs ou de naïfs, on les ridiculise. Ils ne sont pas les premiers, ils ne seront pas les derniers.
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Entretien avec l'écrivain Guillaume Jan. Dans son nouveau roman, "Traîne Savane", Guillaume Jan tisse une histoire d'amour en pleine forêt congolaise et en profite pour reconstituer le parcours du célèbre docteur Livingstone. Son livre est sélectionné pour le prix Nicolas Bouvier qui sera remis lors du Festival Étonnants voyageurs en juin a Saint-Malo.
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