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EAN : 9782756101361
190 pages
Léo Scheer (02/06/2008)
3.7/5   15 notes
Résumé :
A propos de L'Amour impossible, son premier roman méconnu, Jules Barbey d'Aurevilly écrivit : " Je veux y montrer l'amour dans les âmes vieillies, le manque d'ivresse, la froideur des sens et cependant une passion souveraine, empoisonnée ; l'agonie sans doute de la faculté d'aimer mais une agonie éternelle. " De fait, on apprendra dans ces pages que l'amour est une guerre dont l'art consiste à ne savoir ni la gagner ni la perdre...
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Une forme très particulière de l'amour impossible, du moment où nous sommes en période du romantisme où la plupart des enjeux se jouent autour des personnalités qui se rebellent contre la société, on obéit parfois à la loi seul contre tous ou l'amour s'en va contre le monde, mais l'amour impossible qui nous concerne ici est celui de deux êtres, conscients de leur égo un peu trop suprême, qui reconnaissent en eux cette entrave qui ne saura les soumettre à un amour aveuglant...ils choisissent de planer sur la planète de Platon...
Pour un premier roman de Barbey, on lui pardonne sa jeunesse dans le style!
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Avec "Ce qui ne meurt pas", roman lui aussi de sa jeunesse mais qu'il retravailla dans son âge mûr, "L'Amour Impossible" est, en tous cas à mon sens, le moins bon des textes romanesques de Barbey. L'écrivain avait sous-titré son oeuvre "Chronique Parisienne" et, en définitive, c'est bien là que gît le problème.

"L'Amour Impossible" met en scène un dandy de vingt-sept ans, l'éternel dandy dont on sait combien il est cher au coeur de l'auteur, répondant ici au joli nom de marquis de Maulévrier (je vous épargne le prénom ) et par ailleurs amant irrésistible, aux pieds duquel s'abandonnent les plus belles femmes du monde. Pour l'instant, Maulévrier est celui de la ravissante Mme d'Anglure, laquelle, à l'heure où commence notre récit, s'est retirée à la campagne pour une raison qui, je vous l'avoue, m'échappe complètement. de toutes façons, ce n'est que provisoire : les deux amants doivent se retrouver très vite et leur romance prospérer. Seulement, Maulévrier, qui s'ennuie vite semble-t-il - l'ennui, attitude et même posture on ne peut plus caractéristique du dandy - s'impose peu à peu auprès de la marquise de Gesvres, amie de Mme d'Anglure et femme, cela s'entend, d'une grande beauté, dont le mari occupe un poste dans la diplomatie. Pour l'heure, M. de Gesvres est retenu à Pétersbourg et, soyons francs, sa conjointe n'en a pas grand chose à faire. Il faut bien dire que cette femme, toujours très belle malgré l'âge qui avance - elle a cinq ans de plus que Maulévrier - est réputée n'avoir jamais connu ni la passion du coeur, ni les plaisirs des sens. Une vraie gageure, on s'en doute, pour un dandy comme Maulévrier.

Une liaison débute, très particulière et très verbeuse - et croyez-moi, question verbosité, je suis une authentique spécialiste ! Hélas ! en dépit des prétentions de Maulévrier, elle est vouée à l'échec le plus lamentable car il est bien vrai que Mme de Gesvres ne ressent rien. Tout au plus un frémissement, par-ci, par-là mais toujours au-dessus de la ceinture même si jamais dans la région du coeur. Au-dessous de la ceinture, c'est pour ainsi dire le néant absolu et le beau dandy a beau s'entêter, rien n'y fait. Maulévrier s'obstine pourtant et, sans aucun égard pour une malheureuse qui, elle, l'aime éperdument et le désire tout autant, laisse tomber Mme d'Anglure ainsi qu'il le ferait d'une paire de gants défraîchie. La pauvre finira par en mourir de chagrin sans que son ancienne amie ni son ancien amant ne parvienne l'un ou l'autre à comprendre comment l'Amour, en certaines circonstances et chez certaines natures prédisposées, ça peut mener au tombeau.

Avec une amoralité aussi infâme que délicieuse, Mme d'Anglure est-elle à peine refroidie que le lecteur incrédule voit Mme de Gesvres et M. de Maulévrier s'en aller pour ainsi dire main dans la main ... acheter des gants, je crois, ou alors des rubans. Il n'y a plus rien de physique entre eux, encore moins d'amour mais disons qu'une sorte de sympathie s'est instaurée entre ces deux créatures à sang froid : elles se sont reconnues de la même espèce et cela leur suffit pour goûter à ce qu'il faut bien appeler le bonheur, un bonheur particulier et égoïste certes mais le bonheur tout de même.

L'analyse des relations entre les héros est très fine, pour ainsi dire brodée au petit point : on songe parfois à Proust au sommet de son art. Mais l'ensemble reste horriblement "parisien" et artificiel. Malgré tous les efforts de leur créateur, aucun membre du trio ne parvient à "décoller", à révéler une personnalité réelle et surtout crédible, à se détacher en pleine lumière. Au mieux, Gesvres et Maulévrier forment un couple de narcissiques monstrueux mais totalement dénués d'intérêt parce qu'ils le sont sans aucune méchanceté tandis que la pauvre d'Anglure fait plus figure d'une incroyable nunuche que d'une victime romantique. Telles quelles, ce sont de merveilleuses marionnettes, qui débitent le discours imposé par un Barbey perdu et comme obsédé par sa "chronique parisienne" mais qui, ce faisant, ne donnent pas un seul instant l'impression de songer vraiment à la signification de ce qu'elles racontent.

Pour les amateurs de Barbey, cet étrange triangle amoureux préfigure en fait celui qui hantera très vite le reste de l'oeuvre : deux femmes tourbillonnant autour d'un homme qui les aime et les repousse tour à tour. Simplement, l'écrivain n'en est qu'au tracé des silhouettes. Sa vision, lui qui l'aura si souvent tourmentée, écorchée, somptueuse, est ici aussi plate que la morne plaine de Waterloo chantée par Hugo - auteur dont Barbey incendiera un jour, et non sans raison, les pesants, indigestes et trop angéliques "Misérables". Et pour une fois, aucun soupçon de fantastique, rien de cette atmosphère inimitable qui signe tant de textes de Barbey, du plus modeste au plus achevé.

Mais un très bel exercice de style, c'est certain. A ne réserver cependant qu'aux inconditionnels. ;o)
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"Il y a seulement de la malchance à n'être pas aimé. Il y a a du malheur à ne point aimer." écrivait Camus dans l'été. Voilà sans doute le thème principal de L'Amour Impossible, premier roman de Barbey d'Aurevilly.
Hélas, l'auteur traite ce thème avec une distance glaciale et moult descriptions psychologiques, clichés de son époque, qui rendent long ce court roman. On a du mal a rentrer dans ce triangle amoureux (ou pas amoureux), et tout autant dans ce tout Paris fermé de la Restauration, qui n'était en fait pas grand chose. Dans le cours du récit, Barbey fait allusion au plus célèbre verset de l'Ecclésiaste (Vanité des vanités, tout est vanité) : avait il conscience de la vertigineuse mise en abîme qu'il faisait ?
Alors bien sûr, lecture après lecture, je vois émerger un jeune auteur, et vais poursuivre, en espérant mieux.
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Citations et extraits (49) Voir plus Ajouter une citation
Cependant les choses ne pouvaient pas durer ainsi plus longtemps. L'amour, si grand qu'il soit, ne change pas les habitudes de toute la vie, du moins à Paris.
M. de Maulévrier était un homme du monde, et l'homme du monde se révoltait un peu quand l'amoureux se courbait si bien. ..
...
Quoiqu'il fut terriblement cousu à sa jupe..., il y avait des moments où il fallait quitter cette grande charmeresse qui le lanternait avec ces réserves qu'elle avait l'art et la puissance de lui faire subir. Dans ces moments-là, comme il se retrouvait plus de calme et qu'il pouvait mieux se juger, il convenait, avec une extrême bonne foi, que sa position vis-à-vis de la marquise ne lui faisait pas un honneur immense, et alors il se mettait à lui écrire des lettres pleines d'une passion vraie, et dans lesquelles il revenait toujours à ce vieux refrain de l'amour, à cette éternelle question, ce "m'aimez-vous?" importun parfois, que le scepticisme des coeurs ardents pose encore, même quand on y a répondu. Ces lettres étaient réellement très catégoriques ; elles poussaient la marquise jusque dans ses derniers retranchements. Il n'y avait plus là de main ou de taille laissée sournoisement pour gage du silence qu'on affectait, ou en expiation du rire incrédule dont on arme sa physionomie, traître rire si blessant pour les coeurs épris ! Tous ces moyens du "Traité des Princes" des femmes n'étaient plus de mise contre des lettres auxquelles il n'était vraiment pas possible de répondre autrement que par un aveu. C'est pour cela que Mme de Gèvres n'y répondait pas.
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[...] ... "Non, je n'ai pas d'amour pour vous, mon ami, et pourtant j'ai besoin et désir de vous voir. Je suis froide, c'est la vérité ; et pourtant vous me faites éprouver une émotion inconnue lorsque vous brûlez ma froideur sous vos transports. Je n'ai jamais été ainsi, même avec la personne que j'ai le plus aimée ... Il n'y a rien de véritablement intime entre nous, dites-vous ; et pourtant j'ai eu tout de suite confiance en votre caractère, si ce n'est dans votre affection que vous m'avez niée si longtemps. Rappelez-vous tout ce que vous m'avez dit ; jugez si je puis avoir la foi qu'il faudrait pour devenir ce que ... je ne suis pas encore. Si vous tenez à ce changement aussi véritablement que vous le dites, ne vous repentez pas de m'avoir ouvert votre coeur. La crainte de vous voir trop souffrir pourrait seule l'emporter sur ma rebelle nature. Si vous saviez comme je vous serais reconnaissante de bannir de mon âme la défiance qui fait ma réserve ! Trompée, toujours trompée, dupe sans cesse ! jugeant toujours les autres d'après ce que j'éprouvais. Et ne m'accusez pas de mensonge ; quand j'ai le plus aimé, j'ai toujours gardé au fond de mon coeur les expressions qui eussent pu faire croire à une exagération que je redoutais plus que tout au monde. Adieu ; voilà de la confiance. J'espère que vous ne vous plaindrez pas ce soir comme hier de ma réserve. Venez, venez, je vous attends.

Bérangère"

En somme, ce billet était digne de la main qui l'avait tracé. Soit instinct, soit calcul, Mme de Gesvres avait exactement mesuré la dose d'espoir qu'il fallait à M. de Maulévrier pour que, fatigué d'une résistance sans terme, il ne s'en allât pas visiter Florence ou Naples, seule manière de se suicider que les gens de bas étage n'aient pas prise encore aux gens comme il faut ! De tels billets, envoyés aux époques critiques d'un amour qu'on redoute de voir expirer, sont de l'élixir de longue vie ; c'est du lait d'ânesse pour la phtisie du coeur. Sans doute, ce billet avait toute la séduction du mensonge ; mais il était vrai cependant comme s'il n'eût pas dû séduire, vrai comme peut l'être la pensée d'une femme, dont les vérités les plus claires ne peuvent jamais avoir, comme l'on sait, une limpidité parfaite. ... [...]
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C’est une chose si bizarre que le cœur ! Vous m’avez aimée pendant l’absence d’une femme qui vous avait rendu parfaitement heureux pendant deux années, et qui, comme maîtresse, vaut, je le sais, cent fois mieux que moi. Aujourd’hui, voilà que cette femme revient parce qu’elle est jalouse et
malheureuse ; elle revient vous offrir le spectacle d’une jeunesse flétrie par vous, d’une beauté ravagée, d’une vie perdue, d’une santé détruite peut-être, et cela au moment où celle que vous lui avez préférée vous laisse voir l’impossibilité où elle est d’éprouver l’amour comme vous l’auriez désiré.
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D'ailleurs, convenons-en sans hypocrisie à l'honneur de la pureté des femmes très belles, souvent on les croit sous l'empire des émotions les plus troublantes qu'elles n'éprouvent que la très immatérielle jouissance de la vue des transports qu'elles excitent. (...) Si bien éprise que soit une femme, il n'en est point qui ne cherche à augmenter par tous les moyens possibles la passion qu'elle a inspirée. C'est le machiavélisme des coeurs les plus tendres. C'est aussi la seule explication qu'il y ait de ces résistances de lionne, sous prétexte de vertu, dans des organisations si bien combinées pour la défaite ; résistance dont la pensée ne viendrait jamais aux filles d'Eve, si elles n'avaient appris de mesdames leurs mères "que se donner, c'est diminuer l'amour".
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Mais la vanité est si près de l'amour dans les femmes du monde, tout cela est si divinement pétri et fondu, qu'intéresser l'un ou l'autre amène souvent aux mêmes résultats. Or c'était précisément le résultat dont M. de Maulévrier était avide. Il était arrivé à ce degré de l'amour, dans les êtres qui n'ont pas le triste et très peu fier honneur d'être poétiques, où la possession la moins délicate parait la meilleure, et où ce qu'il y a de plus adorable dans l'amour même serait sacrifié brutalement à cette diabolique possession.
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