«
le Chat et le Diable » de
James Joyce, traduit par
Jacques Borel, illustré par
Roger Blachon (2023,
Gallimard Jeunesse, 32 p.). C'était une agréable transition, quasi mystique pour en arriver au pont du diable de Beaugency.
Avant cet épisode les gens de Beaugency, le gentilé les appellent les Balgentiens, longeaient la Loire, sans pouvoir la traverser. Dans «
Ulysse », Stephen
Dedalus a la solution puisqu'il fait marche le Christ sur l'eau. Bien que par ailleurs, il rejette Dieu et le confort de la religion.
James Joyce découvre une variante, qui fait intervenir le Diable. Comme le pont à construire coutait cher, le Diable propose d'en construire un à ses frais. Que coutera t'l ? « Pas un sou », dit le diable, « tout ce que je demande, c'est que la première personne qui passera le pont m'appartienne ». et effectivement, le pont est construit dans la nuit. Mais personne ne veut traverser.
« le diable piqua une vraie colère de diable. / Messieurs les Balgentiens, hurla-t-il de l'autre bout du pont, vous n'êtes pas de belles gens du tout ! Vous n'êtes que des chats ! / Et il dit au chat : / - Viens ici, mon petit chat ! Tu as peur mon petit chou-chat ? Tu as froid, mon pau petit chou-chat ? Viens ici, le diable t'emporte ! On va se chauffer tous les deux ». Et le chat traversa, ce fut la première personne. On ne dit pas s'il était noir. Par contre, c'est depuis cet épisode que les habitants s'appellent aussi « les chats de Beaugency ».
Les relations entre
James Joyce et la religion sont quelque peu tumultueuses. Né en 1882, Joyce entre en 1888 chez les jésuites au « Clongowes Wood College», dans le Kildare County . Puis à l'école des «
Christian Brothers » à Dublin, avant qu'on ne lui offre une place au collège jésuite de « Dublin Belvedere College » en 1893, avec la perspective d'intégrer l'ordre des jésuites. Mais Joyce rejette le catholicisme dès l'âge de 16 ans, tout en reconnaissant l'influence indélébile de Thomas d'Aquin. Pourtant, il compose un poème, « le Saint-Office » peu de temps avant de quitter Dublin à l'automne 1904. Intitulé d'après l'église catholique qui a statué sur les questions d'hérésie, le poème attaque les lettrés irlandais, y compris plusieurs écrivains qui ont encouragé Joyce dans sa carrière, tels que WB Yeats et George Moore. Ces écrivains autoproclamés « Celtic Twilight » (Aube Celtique), il les appelait les « Cultic Twalette »
Alors que personne n'imprimait « le Saint-Office », Joyce l'auto-publia sous forme de bordée, mais il ne pouvait pas se permettre de récupérer le texte avant de quitter l'Irlande. Les imprimeurs ont fini par détruire les feuillets. Après s'être installé à Trieste en 1905, Joyce a imprimé une centaine d'exemplaires à la papeterie la plus célèbre de la ville. Puis il a envoyé la moitié de l'édition à son frère Stanislaus à Dublin, lui demandant de distribuer la bordée à des amis et écrivains spécifiques, dont certains ciblés par Joyce dans le poème. « Je me donnerai / Ce nom, Katharsis-Purgatif. / Moi qui ai abandonné les voies échevelées / Tenir la grammaire des poètes, / Amener à la taverne et au bordel / L'esprit du spirituel
Aristote ». Et il poursuit « Ces choses pour lesquelles Grand-Mère Église / M'a laissé sévèrement dans le pétrin ». Ce n'est pas franchement une adhésion aux thèses ecclésiastiques.