AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782234052758
197 pages
Stock (01/09/2000)
3.41/5   110 notes
Résumé :


"De mère française. De père algérien. Je sais les odeurs, les sons, les couleurs. C'est une richesse. C'est une pauvreté. Ne pas choisir c'est être dans l'errance. Mon visage algérien. Ma voix française. J'ai l'ombre de ma lumière."

Entre ce père algérois et cette mère bretonne, le fruit d'un amour contesté : une fille qui cherche sa place, ici, là. D'une nationalité à l'autre, d'une identité à l'autre, d'un sexe à l'autre.
>Voir plus
Que lire après Garçon manquéVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (14) Voir plus Ajouter une critique
3,41

sur 110 notes
5
5 avis
4
3 avis
3
3 avis
2
2 avis
1
1 avis
J'ai beaucoup aimé ce premier livre de Nina Bouraoui qu'il m'est donné de lire. Dans la première partie du livre, Nina (abréviation de Yasmina) vit avec sa famille en Algérie, près d'Alger. On devine qu'elle a entre 12 et 15 ans. On est une dizaine d'années après l'indépendance de l'Algérie. Son père, Rachid, est algérien, il a fait de hautes études en France et travaille désormais pour le compte d'organismes internationaux ce qui l'amène à voyager très souvent. Nina vit donc le plus souvent avec sa mère, Maryvonne ou "Méré", bretonne (Rachid et Méré se sont connus à l'Université de Rennes), sa soeur qui a quelques années de plus qu'elle et sa grand-mère paternelle. Elle fréquente le lycée français et ne connait que quelques rudiments d'arabe. En dépit de cela et de sa difficulté à s'intégrer car perçue comme étrangère par les autochtones, elle éprouve un amour viscéral pour ce pays, pour ses paysages, la mer, les plongeons depuis un rocher sur la plage et pour Amine, son ami, qui symbolise à lui seul tout cela. Dans la deuxième partie du livre, l'auteur nous raconte des vacances en Bretagne chez ses grands-parents avec sa soeur et plusieurs cousins. Certes elle aime ces vacances, mais elle lui font aussi ressentir qu'une partie d'elle est en Algérie et qu'elle ne peut partager cela avec ses cousins français.

A cette thématique d'une identité culturelle déchirée entre les deux rives de la Méditerranée, se superpose pour Nina Bouraoui une recherche de son identité sexuelle. Avec Amine, elle joue à inverser les rôles : elle, qui a une carrure masculine, serait le garçon tandis qu'Amine endosserait un rôle féminin. Rien n'est aussi clair que cela. Beaucoup de choses sont seulement esquissées et l'auteur nous laisse combler les vides entre ses phrases sèches, ultra-courtes, qui sonnent comme des coups sur une enclume ou parfois comme des gifles en pleine figure.

Après une cinquantaine de pages, j'ai craint de me lasser de ce style violent, presque barbare, mais j'ai trouvé au fil des pages qu'il se mettait particulièrement bien au service de cette double déchirure dont ce livre veut rendre compte, pour éloigner toute tentation de pathos et pour nous faire sans doute mieux percevoir la révolte intérieure de l'auteur. Un livre très original qui je pense résonnera longtemps en moi.
Commenter  J’apprécie          190
Des phrases courtes qui crépitent, qui claquent pour dire la difficulté de se savoir algérienne ou française, la volonté de décider d'être un garçon plutôt qu'une fille.
Oui, les phrases sont courtes, très courtes, souvent un seul mot. Et au fil des pages elles disent toutes la même chose. le poids de ces dualités.
C'est répétitif certes, mais ça traduit bien toute cette souffrance engrangée depuis l'enfance, de ne pas savoir où est sa place, de ne pas savoir qui elle est.
Heureusement, il y a Amine, son ami, il y a sa soeur.
Nina Bouraoui avait certainement une grande nécessité de faire sortir tout cela par les mots, et elle l'a bien fait.
Commenter  J’apprécie          230
Ponctué de nombreuses anaphores, ce récit autobiographique se rapproche d'une scansion autour de questions sur l'identité, sur le genre, sur la peur, des territoires, la souffrance et l'amour. On sent là un besoin urgent de dire, de laisser sortir les souffrances et les déchirements d'une fille qui se cherche : femme – homme « garçon manqué » – française – algérienne, mais qui a, avant tout, ce besoin d'être elle-même.
Nina Bouraoui écrit page 10 « Ma vie algérienne est nerveuse. Je cours, je plonge, je traverse vite. La rue est interdite […] la rue est derrière la vitre de la voiture. Elle est fermée, irréelle et peuplée d'enfants. La rue est un rêve. Ma vie algérienne bat hors de la ville. Elle est à la mer, au désert, sous les montagnes de l'Atlas. Là, je m'efface enfin. Je deviens un corps sans type, sans langue, sans nationalité. Cette vie est sauvage. Elle est sans voix et sans visage. » Et il en va ainsi de son écriture : sauvage, pas encore domptée comme elle le sera dans certains romans à venir comme Satisfaction par exemple.
Elle se confronte à ses questionnements que le regard des autres soulève à tout moment. Ainsi, en parlant du contrôleur dans le train l'amenant à Rennes : « comme il ne sait rien de cet amour que je viens chercher à Rennes. Pour ma mère. » (p.100) Effectivement, l'amour et la reconnaissance de ses parents fait également partie de la quête de l'auteur. Plus loin, elle nous explique qu'elle est le fruit de leur silence, de leur choix : « c'est la mémoire de nos parents qui est importante. de leur souffrance. de leur humiliation. Notre berceau. Ce qui nous attendait. le contexte. Ce qui a été fait. Ce qui a été dit. Leurs blessures transmises. Cet héritage-là. » (p.134) Alors Nina Bouraoui écrira que c'est cela qui l'amènera à l'écriture : « Et mon silence toujours. Parce que ma voix n'est rien. Elle s'échappe comme du vent. Bien sûr qu'il ne fallait pas répondre. Je trouverai mieux. Je l'écrirai. C'est mieux, ça, la haine de l'autre écrite et révélée dans un livre. J'écris. Et quelqu'un se reconnaîtra. Se trouvera minable. Restera sans voix. Se noiera dans le silence. Terrassé par la douleur. »
Il est des douleurs qui transcendent, c'est ce qui nous permet de lire Nina Bouaroui aujourd'hui. Ces douleurs qu'elle tisse et partage au fil de son oeuvre : un moyen de nous aider dans la vie aussi !
Commenter  J’apprécie          50
Le thème de l'identité est évoqué dans ce livre . Elle a grandit dans deux cultures algérienne et française. La guerre d'Algérie est évoquée aussi, ainsi que le racisme le regard porté sur les algériens dans la France des années 70. Elle est de père algérien et de mère française, elle est métisse. Elle le vit comme quelque chose de très violent.
"Je parle français. J'entends l'algérien. Mes vacances d'été sont françaises. Je suis sur la terre algérienne." Elle ne parle pas l'arabe, la langue de son père "C'est une langue qui s'échappe."
Elle est partagée entre deux cultures. Elle voudrait être un garçon, l' Algérie est le pays des hommes, son père l'appelle Brio. il suffit de porter cheveux courts et pantalon pour décider de son genre.
Elle est née en 1967, et la guerre d'Algérie est présente en elle via son oncle Amar tué à la guerre. La guerre entre les français et les arabes. La mort de son oncle Amar l'interroge, la travaille elle se pose des questions concernant son identité. La France est le pays de sa mère. Elle passe ses vacances chez ses grand-parents à Rennes et à Saint -Malo seul avec sa grande soeur, dans les années 70. Ces parents se sont rencontrées en 1960 à l'université de Renne.
La mer a son rôle dans son récit et elle est différente aussi. En Algérie c'est la mer sauvage déchaînée chaude, et à St Malo la mer est froide, elle se retire.
Dans cette deuxième partie, Nina est différente, elle évoque ses souvenirs d'enfance accompagnés des odeurs qui va avec. Nina Bouraoui a une écriture très affirmé, le "Je " est ancré dans son récit. Mais la grande force de son style, c'est qu'à la lecture cela ma rappelé ma propre enfance, mes propres souvenirs de plage. La douceur de l'enfance et des vacances passés chez ses grands-parents et évidement mon identité n'a rien à voir avec celle de Nina. Cela est fort ...Les phrases s'enchaînent sans fin ne laisse aucun répit au lecteur." J'écrirai en français en portant un nom arabe. Ce sera une désertion. ". Ce sera surtout le moyen de réunir enfin ces deux identités, ces deux familles, ces deux histoires... qui ne font qu'une. L'histoire de Nina. Belle découverte, j'aime ce style qui s'affirme qui va à toute vitesse.
Commenter  J’apprécie          20
Nina Bouraoui de nouveau , cette fois dans le cadre d'une autobiographie. Dans celle çi elle aborde la thématique du racisme ordinaire , béte et méchant . le racisme elle y a était confrontée toute petite , c'est hélas un vieux compagnon qu'elle ne connait que trop bien. La force de son récit c'est justement les moyens de lutte qu'elle a trouvée contre cette manifestation de la bétise la plus crasse . Ne tombant jamais dans le piége de l'auto fiction elle entraine le lecteur dans une course pour le droit d'étre soi dans un monde qui vous rejette. Son talent naturel fait toute la différence avec des soits disants auteurs qui n'on au final aucun talent et jouent sur la corde sensible et les penchants voyeuristes des lecteurs . Pas de cela chez Nina Bouraoui qui elle est un auteur , et un sacré bon qui plus est .
Commenter  J’apprécie          50

Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Et ça : Ah bon ? Tu as une amie qui s'appelle Yasmina toi ? Et mon silence toujours. Parce que ma voix n'est rien. Elle s'échappe comme du vent. Bien sûr qu'il ne fallait pas répondre. Je trouverai mieux. Je l'écrirai. C'est mieux, ça, la haine de l'autre écrite et révélée dans un livre. J'écris. Et quelqu'un se reconnaîtra. Se trouvera minable. Restera sans voix. Se noiera dans le silence. Terrassé par la douleur.
Commenter  J’apprécie          00
Ne pas être algérienne. Ne pas être française. C'est une force contre les autres. Je suis indéfinie. C'est une guerre contre le monde. Je deviens inclassable. Je ne suis pas assez typée. "Tu n'es pas une Arabe comme les autres." Je suis trop typée. "Tu n'es pas française." Je n'ai pas peur de moi. Ma force contre la haine. Mon silence est un combat. J'écrirai aussi pour ça. J'écrirai en français en portant un nom arabe. Ce sera une désertion. Mais quel camp devrais-je choisir ? Quelle partie de moi brûler ?
Commenter  J’apprécie          490
Je ne sais pas si je suis chez moi, ici, en France. Je ne le saurai jamais d'ailleurs. Ni à Rennes, ni à Saint-Malo, ni à Paris. Je ne sais pas si je suis chez moi en Algérie. Je ne le vérifierai jamais. Ce sentiment. Cette évidence. Je me suis toujours sentie clandestine au contrôle des passeports. Pas en règle. M'attendant toujours à être expulsée du rang des passagers, tenue par deux policiers, encadrée, puis conduite dans une petite pièce. Qui êtes-vous ? D'où venez-vous ? Où allez-vous ? J'ai toujours eu l'impression d'avoir un secret. D'avoir une double vie. D'abriter quelqu'un d'autre que moi. Que ma partie visible. De changer de visage. Selon le pays. Selon le policier. Selon les gens que je rencontre.
Commenter  J’apprécie          142
Longtemps je crois porter une faute. Je viens de la guerre. Je viens d'un mariage contesté. Je porte la souffrance de ma famille algérienne. Je porte le refus de ma famille française. Je porte ces transmissions-là. La violence ne me quitte plus. Elle m'habite. Elle vient de moi. Elle vient du peuple algérien qui envahit. Elle vient du peuple français qui renie.
Commenter  J’apprécie          270
C’est moi que tu imiteras en France. C’est de moi que tu tiendras ça. Cette ronde sexuelle. Cette façon d’aller vers l’autre. De provoquer. De demander. De chercher. Toi tu ne viens jamais vers moi. Tu attends mon signe. Tu me subis. Je te traverse. Et je danse comme un homme. Je t’apprends à marcher comme Steve McQueen. Je t’apprends à jouer. Je t’apprends à nager le crawl sans t’étouffer. À te servir de la mer. Un, deux. Une nage à deux temps. Intérieur, extérieur, ta vie à deux temps. Toi, moi, toi, moi. Je suis en toi, Amine. Tu es pénétré.

Tu as les cheveux longs, noirs et bouclés. Tu pleures pour un rien. Tu gémis. On t’appelle la fontaine. Tu fais des crises de nerfs. Je te monte à la tête. Ta peau est si blanche, si fine. Tu veilles sous la peau d’une fille. Je t’apprends les forces du corps. Je t’aime comme un homme. Je t’aime comme si tu étais une fille. Tu fondes le mensonge de toute ma vie. Le monde entier se trompera sur moi.
Commenter  J’apprécie          70

Videos de Nina Bouraoui (50) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Nina Bouraoui
Dans Grand seigneur, Nina Bouraoui se tourne vers l'écriture pour conjurer la douleur de la mort de son père, entré en soins palliatifs en 2022. Entremêlant les souvenirs de sa vie et le récit de ses derniers jours, elle illumine par la mémoire et l'amour un être à l'existence hautement romanesque. Le désir d'un roman sans fin rassemble quant à lui de nombreux écrits de l'autrice, portraits, nouvelles, chroniques, parus dans la presse ou publiés entre 1992 et 2022. Une oeuvre à part entière, qui pourrait se lire comme un roman racontant la vie, ses arrêts, ses errances. Ces deux parutions récentes prolongent l'oeuvre prolifique et lumineuse d'une romancière majeure de la littérature contemporaine. Elle reviendra sur son parcours d'écriture à l'occasion de ce grand entretien mené par Lauren Malka, dans le cadre de l'enregistrement du podcast Assez parlé.
Nina Bouraoui est l'autrice de nombreux romans et récits dont La Voyeuse interdite (Gallimard, prix du Livre Inter 1991), Mes mauvaises pensées (Stock, prix Renaudot 2005) ou Otages (JC Lattès, prix Anaïs Nin en 2020). Elle est commandeur des Arts et des Lettres et ses romans sont traduits dans une quinzaine de langues.
Rencontre animée par Lauren Malka dans le cadre de l'enregistrement du podcast Assez parlé.
Retrouvez notre dossier "Effractions le podcast" sur notre webmagazine Balises : https://balises.bpi.fr/dossier/effractions-le-podcast/ Retrouvez toute la programmation du festival sur le site d'Effractions : https://effractions.bpi.fr/
Suivre la bibliothèque : SITE http://www.bpi.fr/bpi BALISES http://balises.bpi.fr FACEBOOK https://www.facebook.com/bpi.pompidou TWITTER https://twitter.com/bpi_pompidou
+ Lire la suite
autres livres classés : algérieVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (293) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1712 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..