Entretien avec Brigitte Kernel à propos de Agatha Christie, le chapitre disparu :
Agatha Christie, célèbre romancière anglaise, a disparu pendant 11 jours en 1926, une absence aujourd’hui encore très mystérieuse. Dans votre dernier roman, Agatha Christie, le chapitre disparu, vous proposez votre version des faits. Pourquoi vous être intéressée à ce personnage en particulier ? Avez-vous lu beaucoup de ses romans ? Quels seraient vos favoris ? Voyez-vous une explication à son immense succès ?
J’ai lu son autobiographie il y a quelque temps et j’ai été sidérée de voir que le chapitre concernant sa disparition à l’hiver 1926 n’y figurait pas. Pendant onze jours, son mari, la police, la presse qui a même offert une récompense à ceux qui pourraient donner des indices à propos de cette disparition, l’ont recherché. Au point de faite toutes les Unes des journaux de l’époque, de placarder des affiches dans Londres, d’organiser une battues de quinze mille hommes après que sa voiture ait été retrouvée contre un arbre sur le site de l’étang de Silent Pool. C’est dans cet endroit que l’on a cru au départ qu’elle s’était suicidée. J’ai donc fait des recherches. Agatha Christie aurait affirmé avoir dicté ce chapitre mais l’appareil enregistreur qu’elle aurait utilisé aurait mal fonctionné, la bande son aurait été inaudible. Quoi de plus inspirant pour une romancière ! Je n’ai pas résisté à l’idée d’essayer d’écrire « le chapitre disparu ». Je me suis donc rendue sur les traces d’Agatha Christie, à la même époque, en hiver, durant onze jours.
Vengeance d’une adultère, opération marketing, tristesse suite à la mort de sa mère… De multiples hypothèses ont été proposées face à cette énigme. Pourquoi avoir choisi la thèse de la vengeance amoureuse ?
Parce que, après toutes ces recherches, cela me paraît la seule probable. En ce sens relire Mary Wesmacott permet de comprendre.
Le roman est écrit à la première personne. Cette forme narrative s’est-elle imposée dès le départ ? Pourquoi ce choix ?
Il s’agissait d’écrire « le chapitre disparu » donc de reprendre le « je » d’ Agatha dans ce livre.
Comment se sont déroulées les recherches nécessaires à l’élaboration de votre roman ? Avez-vous visité des lieux ? Rencontré des témoins ? A quel point avez-vous choisi de coller aux éléments récoltés lors de vos recherches ?
De Londres à Sunningdale, Silent Pool, je suis aussi allée séjournée à Harrogate dans un hôtel où Agatha Christie était passée un long moment incognito. Et je me suis adossée à son roman sentimental Loin de vous ce printemps publié sous le nom de Marie Wesmacott où sa personnalité de femme amoureuse pleine de doutes, seule, un peu perdue émerge. Agatha Christie était fleur bleue mais qui ne l’assumait pas publiquement. Ou, en tout cas, ne voulait pas que ses lecteurs le comprennent. Sans doute parce que cela aurait porté une ombre trop sensible sur ses romans policiers.
Désespérée, Agatha Christie apparaît dans votre roman comme une femme perdue et très peu sûre d’elle. Face à son génie littéraire ainsi qu’à sa célébrité, il est facile d’imaginer un personnage presque invisible et très fort psychologiquement. Pourquoi avoir choisi de présenter la star du crime si “humaine” ?
Parce quelle était très humaine et portée vers les autres. On l’a vu lorsqu’elle a, pendant la guerre, décidé de devenir infirmière pour soigner les soldats blessés. Dans son autobiographie, elle est très humaine également. Je me suis centrée dans son ton et sa psychologie, ses failles, ses doutes, ses passions.
D’ailleurs, votre Agatha Christie connaît certaines difficultés à gérer la grandeur de son personnage et se compare sans cesse à ce que les gens pourraient penser d’elle…
Agatha était célèbre mais restait à distance de la presse. Je ne crois pas que la célébrité ai été un point important dans sa vie. Elle écrivait sans relâche, accompagnait son second mari, Max Mallowan dans ses recherches, s’occupait de sa fille. La célébrité pour elle était plutôt encombrante. L’écriture était plus importante. Elle travaillait sans relâche.
Vous avez dessiné une héroïne mal dans son temps, souvent dépassée par les moeurs et les modes. Tout pour elle semble aller trop vite. Pourquoi ? Souhaitez-vous faire passer un message à ce sujet ?
Non, aucun message. Je n’ai fait que dire ce que j’ai entrevu du personnage en cette année 1926. Ensuite, elle est devenue beaucoup plus ouverte. Par exemple l’homosexualité ne lui posait pas de problème, elle souhaitait que l’éducation des enfants soit plus moderne, elle s’est remariée sans état d’âme et sans peur du jugement après son divorce avec Archibald Christie. Ce qui figure dans mon roman se situe en 1926… Elle a évolué comme le monde a changé ensuite…
Vous n’en êtes pas à votre premier ouvrage biographique, plusieurs des titres que vous avez signés s’intéressent à la vie de célébrités. Qu’aimez-vous dans ce style littéraire ?
J’aime écrire des romans qui ne sont inspirés par aucune personne connue. Mais j’aime aussi écrire des romans qui s’y intèressent. En fait, je ne choisis pas d’écrire ceci ou cela, c’est étrange, un jour un sujet vient et c’est celui-là qui s’impose même si je lui résiste parfois devant l’ampleur des recherches à effectuer (rires).
Brigite Kernel et ses lectures :
Quel livre vous a donné envie d`écrire ?
Les livres de la Bibliothèque Rose puis Verte quand j’étais enfant. Puis André Gide , Les Nourritures terrestres que j’ai lu très jeune et le Journal d`Anne Frank.
Quel est l`auteur qui vous aurait pu vous donner envie d`arrêter d`écrire (par ses qualités exceptionnelles...) ?
Milan Kundera.
Quelle est votre première grande découverte littéraire ?
André Gide,
Les Nourritures terrestres.
Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?
Il y en a plusieurs, tous signés Stefan Zweig. Il ne se passe pas un été sans que j’en relise un.
Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?
Il y en a beaucoup ! (rires) Trêve de plaisanterie, je n’ai jamais réussi à finir un livre de
Emmanuel Kant.
Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?
Ce fut un livre connu mais qu’on a un peu oublié La Mort est mon métier de Robert Merle. Cela étant nous sommes nombreux tout de même à l’avoir lu.
Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?
« Deviens ce que tu es ». ca paraît simple mais c’est la chose la plus compliquée au monde !
Et en ce moment que lisez-vous ?
L’
Illettré de
Cécile Ladjali aux Editions Actes Sud. Je suis totalement prise par ce texte.
Entretien réalisé par Marie-Delphine
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Agatha Christie, le chapitre disparu de
Brigitte Kernel aux éditions
Flammarion :

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Confusion : La saga des Cazalet III de Elizabeth Jane Howard et Cécile Arnaud aux éditions de la Table Ronde
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Nouveau Départ : La saga des Cazalet IV de Elizabeth Jane Howard et Cécile Arnaud aux éditions de la Table Ronde
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La fin d'une ère : La saga des Cazalet V de Elizabeth Jane Howard et Cécile Arnaud aux éditions de la Table Ronde
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Poussière d'homme de David Lelait-Helo aux éditions Pocket
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Je suis la maman du bourreau de David Lelait-Helo aux éditions Héloïse d'Ormesson
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Les enfants endormis de Anthony Passeron aux éditions Globe
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Quand je serai grand, je serai Nana Mouskouri de David Lelait-Helo aux éditions Pocket
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Vivre vite de Brigitte Giraud aux éditions Flammarion
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- Tous les littéraires ne sont pas des gentils...
-On est d'accord, Gloria
- Je le voyais venir. Il allait me parler du grand Ernest. Je ne l'intéressais qu'à ce seul titre, c'était une évidence. Pas facile de descendre d'un homme connu respecté, admiré au-delà des frontières. (p. 186)
Les écrivains ne se racontent pas dans la vie comme ils se racontent à la radio. Il suffit pourtant de peu pour qu'ils enlèvent leur "masque" ou leur "panoplie" d'auteur pour se laisser aller, malgré le micro et l'ambiance de studio, à "se dire" en toute intimité.
Il m’a narré des années plus tard comme Marlène l’avait épuisé un soir à s’énerver au bout du fil de la réaction de John Wayne, qui osait la repousser une nouvelle fois : Tu imagines, Ernest, John m’a dit : « Ce n’est pas l’envie qui m’en manque, ma grande, mais je n’aime pas l’idée d’appartenir à une écurie. » En plus, il m’a appelée ma grande, mon petit nom pour Jean ! Et il n’y a que lui, mon Jean Gabin, qui a le droit !
Un jour, quand les rides feront de moi un parchemin, je détruirai ce texte.
Ma mère ne m'a jamais aimée.
Papa, c'était autre chose, il m'adorait, mais c'était son secret. Un mâle Hemingway ne pouvait pas, ne devait pas ressentir d'affection pour un type "anormal " comme moi, un qualificatif dont beaucoup de mes connaissances et même de ma parentèle ont usé à mon sujet, mais que Ernie, je lui en sais gré, n'a jamais brandi à mon sujet.
Sous la carapace rugueuse de mon père, son caractère d'ours, une subtile délicatesse. (p. 127)
Mon père ne parvint jamais à élaborer une philosophie qui lui aurait permis de vieillir avec grâce. J'ai vu chez un animal blessé, ce regard qui semble dire : Tue-moi, je souffre - Mais l'homme est le seul animal capable d'appuyer sur la détente. [cf: "Papa"- Gregory H. Hemingway ]
Je ne craignais ni de quitter cette vie ni de souffrir en me noyant avec ma voiture pour linceul.
J'avais douze ans, papa écrivait et quand il écrivait il nous ignorait. Ses livres nous le volaient, ils nous l'ont toujours dérobé. Comme un forçat, il tapait sans plus d'horaires, plus d'angoisses, car il était anxieux au fond. (p. 141)
Papa. Ernest, l'écrivain; le séducteur, je revois ses yeux déstabilisants les femmes; l'amoureux transi; le boxeur aux arcades parfois ouvertes, ensanglantées; le champion de pêche au gros, médaillé- il aimerait que je précise. Papa, le déprimé aussi et le sensible barricadé. (p. 15)

LA MAISON DE RETRAITE PAR MICHEL JONASZ
Auteurs: Michel Jonasz
Compositeurs: Michel Jonasz
J’ai retrouvé ta lettre où tu disais peut-être
Un jour on s'ra trop vieux
Pour s'écrire des poèmes
Pour se dire que l'on s'aime
Se r' garder dans les yeux
Tu parlais de naufrage,
D'un corps qui n'a plus d'âge
Et qui s'en va doucement
De la peur de vieillir et d'avoir à subir
L'impertinence du temps
De n' plus pouvoir s'aimer si la mémoire s'en va
Et qu'on n' se reconnaît plus
Et perdre me disais-tu le plaisir de me plaire
l' envie de me séduire
Peur de la dépendance
Et de finir sa vie dans une maison de retraite
De la fin qui commence
De l'esprit qui divague
Peur de ne plus pouvoir un jour
Rire à mes blagues
Mais tout ça c'est des bêtises est-ce que tu réalises
On s' ra jamais trop vieux
Pour s'écrire des poèmes, pour se dire que I’on s'aime
Se r' garder dans les yeux
Et je veillerai sur toi et tu veilleras sur moi
Ce s' ra jamais fini
On s' dira mon amour jusqu'à la fin des jours
Et le jour et la nuit
Et le jour et la nuit
Et leur maison de retraite ça j’ te jure sur ma tête
Nous on ira jamais
On dormira dehors, on r' gardera les étoiles
On vivra libres et dignes !
On s' tiendra par la main comme à nos 18 ans
Qu’on marchait tous les deux sur des sentiers perdus
Au début du printemps
Et on pourra toujours raconter des bêtises
Et dire n'importe quoi
On vivra libres et dignes !
Et si l'on doit partir un jour après le dernier mot
Du tout dernier poème
On partira ensemble
Tu comprends...
On s' ra jamais trop vieux
Pour se dire que l'on s'aime
Se r' garder dans les yeux
On s' ra jamais trop vieux
Pour se dire que l'on s'aime
Se r' garder dans les yeux