Sachant que la plupart des oeuvres romanesques d'
Alphonse Boudard, sont très largement autobiographiques, et que j'ai lu tous ses romans, de "La métamorphose des cloportes" à "
Mourir d'enfance", plusieurs fois pour certains, je pensais bien connaitre la vie de l'auteur.
Mais à la lecture de cette biographie, je m'aperçois que l'auteur de "
La cerise", avait bien brouillé les pistes.
Normal aussi pour cet ancien maquisard, puis repris de justice, de garder des choses secrètes et d'en maquiller d'autres.
Pour commencer, son véritable nom , Michel Boudon est longtemps resté connu seul de son entourage proche, de même qu'il est resté très discret sur sa vie privée, citant sa fidèle compagne Gisèle que par des allusions compréhensibles des seuls initiés.
L'ouvrage de Dominique
Chabrol, remet donc de l'ordre dans la chronologie de la biographie de Boudard, livrée en épisodes choisis sans logique apparente.
Par exemple, Boudard, attend 1995, pour parler de ses premières années dans "
Mourir d'enfance".
Chabrol, donne aussi des éclaircissements sur des points importants de la vie, et la carrière d'auteur d'Alphonse ; sa rencontre avec
Jean Giono, alors qu'il ne pense pas encore à écrire, puis l'amitié, les conseils et encouragements d'
Albert Paraz, qui seront déterminants, ses deux rencontres avec
L.F. Céline, alors qu'il n'est qu'aspirant écrivain.
Ces rencontres et amitiés, auront toujours de l'importance dans la vie de Boudard, qui n'était pas seulement son propre biographe, mais aussi témoin de la vie marginale de son temps (maquis, délinquance, hôpitaux et sanatoriums, puis milieux artistiques).
Boudard, témoigne, démystifie, toujours avec humour et modestie, il se fait aussi le porte-parole de "sans voix", comme le fait remarquer Dominique
Chabrol : "(…) il a tiré de l'oubli toute une galerie d'anonymes et de sans-grades, de laissés-pour-compte de la société, d'enfants de la déveine voués au châtiment, de tueurs, de victimes et de demi-dingues, pour en faire des personnages de roman…"
Alphonse connaitra, finalement le succès et la reconnaissance de nombreux grands noms des lettres françaises, ainsi, le sous-titre de cette biographie, "Une vie à crédit", clin d'oeil évident à Céline, est tiré d'une critique de "
l'hôpital", par
Michel Tournier, qui fût l'un des premiers à croire en Boudard.
A titre personnel, je me félicite, qu'un ouvrage aussi complet, paraisse bientôt vingt ans après la disparition de l'auteur de "
Les combattants du petit bonheur". Une forme d'hommage bien mérité, à un écrivain, qui je le crains, risque de tomber dans l'oubli, si personne n'entretient la flamme !
Livre reçu dans le cadre d'une opération Masse Critique, merci à l'éditeur et à Babelio, pour ce très bon ouvrage !