En lisant cette "histoire" sur les femmes, écrite (et dessinée) par un homme, j'ai ressenti un grand bien-être.
J'ai pris tout mon temps pour apprécier ces tranches de vie d'une mère (veuve) et sa fille qui grandit, dans une Corée traditionnelle du début du siècle dernier.
Les relations mère-fille sont imprégnées de douceur et de complicité. Cela permet à la mère de parler, sans complexes, de la sexualité et des sentiments amoureux, à sa fille. Les hommes ne sont pas absents de cet univers féminin ; ils sont médisants, gouailleurs...ou, au contraire, très sensibles...
Les métaphores relatives à la nature (la pluie : symbole de la vie à (re-)naître ; les fleurs et plantes : la féminité), créent une atmosphère poétique, renforcée par des dessins aux traits très fins et expressifs.
Les illustrations (à l'encre de chine) des paysages et des arbres, insérées habilement dans le récit, sont d'une précision et d'une beauté à couper le souffle...j'étais fascinée et leur contemplation m'a procuré un agréable apaisement...
(Première fois que je lis un manhwa...je ne vais pas m'arrêter là !)
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Dans ce manwha, manga coréen, nous assistons en trois tomes au passage à l'âge adulte d'une jeune fille, Ihwa, de ses 12 ans à ses 17 ans. Ihwa vit avec sa mère, la "veuve Namwon", dans un village coréen; celle-ci tient une taverne et élève seule sa fille, sans trop de sévérité mais avec une affectueuse attention, tout en menant sa vie de femme, lorsque l'écrivain public qu'elle aime passe par son village, dans ses déplacements de vagabond. de son côté, Ihwa découvre, au fil des saisons, sa nature féminine et les affres de l'amour.
J'ai aimé avant tout le dessin incroyablement esthétique de cette bande dessinée, qui nous fait vivre au plus près les détails de la vie à la campagne, les décors, les tissus des vêtements et objets du quotidien. Nous apprenons quelle était la vie traditionnelle des femmes coréennes (histoire inspirée de la grand-mère et la mère de l'auteur, semble-t-il), nous sommes au plus près de leurs interrogations, de leurs sentiments, présentés dans une certaine harmonie avec la nature qui les entoure, et les inspire, leur soufflant tantôt l'espoir de revoir l'être aimé, tantôt leur communiquant la fièvre du vent fou.
Le trait est précis et net, en noir et blanc, et le dessin raffiné des personnages surprend au premier abord, dans sa ressemblance avec les visages des estampes anciennes, mais on s'y fait vite. Les planches se divisent en vignettes d'une manière classique, suivant l'action, mais il arrive régulièrement qu'une vignette fasse la part belle au paysage : une vignette entière de la taille d'une planche est alors consacrée à un paysage de champs, à des vergers, un pont de bois sur une rivière, un train à vapeur, une maison sous la pluie...
Je mettrai toutefois un bémol à mon appréciation élevée de cette bande dessinée : certes, l'auteur présente la vie de ces femmes comme une attente sans fin, parfois comme de véritables drames (mariages arrangés), il ne manque pas de leur faire dire que leur vie manque d'autonomie - malgré tout, il se complaît dans une certaine symbolique fleurie (la femme = la fleur, on le saura à mesure des innombrables répétitions tout au long de ces trois tomes), mettant en scène la femme comme indissociable de l'homme (le papillon, nécessaire à sa "révélation"). On l'aura compris, le bonheur de la femme passe par celui de son époux : rien n'est plus important pour elle que de guetter les humeurs de son époux, de lui faciliter la vie, et d'être heureuse par ses attentions. Je n'ai décelé aucune distance dans l'énonciation de cette grande vérité humaine.
Le second bémol tient dans les relations des femmes entre elles : Ihwa a des amies, et malgré les défauts de celles-ci, de petites paysannes, je la trouve singulièrement peste et prétentieuse avec elles. J'ai toujours eu du mal à comprendre ces rapports teintés de jalousie et de comparaisons.
Cette lecture reste un réel plaisir, une promenade dans la Corée d'autrefois, qui fait rêver et réfléchir - tout en étant un festin pour les yeux, tant le dessin est délicat et poétique, tout en restant très réaliste.
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Réalisme et délicatesse
Histoire couleur Terre raconte la vie de deux femmes, la mère et sa fille, dans un petit village coréen du temps jadis qui vit encore au rythme de la nature.
La mère est une très jolie veuve qui travaille dur dans une taverne où se retrouvent les paysans des environs, pas toujours très fins. Un soir elle offre l'hospitalité à un écrivain public itinérant. Son coeur vibrera désormais dans l'attente de ses passages. La petite Ihwa a cinq ans au début de l'histoire et nous la suivons jusqu'à la puberté. Elle apprend la féminité, découvre son corps, celui des garçons, le désir naissant , les premiers émois, les premiers chagrins.
J'ai adoré ce manhwa. D'abord le traitement du scénario, tout en délicatesse pour aborder la découverte de la sexualité chez les enfants. Les métaphores florales, les évocations des parfums et la pluie révèlent les changements du corps, les états d'âme et les émois. Ensuite les dessins m'ont impressionnée. Les paysages, parfois sur deux pages, évoquent des peintures ou des estampes à l'encre de Chine, les traits des personnages sont aussi d'une finesse rare.
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Ô merveille ! pépite !
Nous sommes en Corée dans un petit village
Très belle balade poétique où l'amour d'une jeune mère veuve voit sa petite fille Ihwa, s 'épanouir de jour en jour, et va la voir éclore comme une belle fleur de lotus ...et lui apprendre toutes les subtilités de la féminité.
Merveilleux dessins en noir et blanc et partout des fleurs superbes, des arbres...qui agrémentent cette jolie histoire filiale qui narre la spontanéité et la fraicheur d'une petite fille qui fait l'apprentissage des codes de son intimité et ses premiers émois amoureux sous le regard amusé et bienveillant de sa mère.
C'est tendre, drôle et subtil, une aquarelle.... la pureté des dessins est un vrai bonheur.
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C'est bien d'élaguer un arbre !
Je crois que c'est pareil pour les sentiments ! Il faut alléger le cœur de tout ce qui l'encombre. À quoi bon s'éparpiller inutilement ?
Un masque de rides recouvre le visage de ma mère,
pareil à une toile d’araignée.
Mais il suffit de soulever le masque
pour retrouver sur ses joues le rose de ses seize ans.
On devine des histoires entre rires et larmes qui ont jalonné sa vie,
pareilles aux sillons qui creusent les champs.
Ce sont les souvenirs de nos mères
du temps où elles avaient seize ans…
Voici le récit de leur histoire couleur terre…
À Seodari.
(Incipit)
Pluie de printemps: Les scarabées, Pluie de printemps: L'arbre "sent mauvais", La fleur de calebasse, Le lis doré, Le camélia, Les émois de la pluie de printemps, Vent de fleurs, Une petite gamine, Un jeune cœur tendre, Un amour impossible.
"Jeunes ou vieilles, les femmes sont des créatures bien étranges. A chaque pluie de printemps, leur curiosité devient un peu plus grande."
p.295.
Tu sais quoi, Ihwa ? J'ai cru au début que tu serais aussi importante qu'une toute petite graine de fleur. J'ai cru que le vent finirait par t'emporter comme une graine de pissenlit.
Mais je me suis trompé.Tu as pris racine dans mon cœur et ton ombre est devenue aussi immense que les feuillages d'un Ginkgo. Tu occupes maintenant une place aussi grande que ces lettres tracées au sol.
p.67-8.
- Moi, je préfère les arbres. Ce qu'ils font est tellement plus joli. Ils ont de la chance de faire des fruits rien qu'en se touchant du regard.
- C'est parce que tu es encore trop petite. Nous concevons dans la joie et nous enfantons dans la douleur. Voilà pourquoi nos petits nous sont si chers. D'ailleurs ne dit-on pas qu'il est possible de s'enfoncer son enfant dans l’œil sans avoir mal* ?
N.d.t. : un vieil adage coréen pour exprimer l'amour des parents pour leur progéniture.
Trailer du coffret des quatre volume de "La bicyclette rouge"