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EAN : 9782849905944
183 pages
Editions des Equateurs (22/11/2018)
4.19/5   8 notes
Résumé :
"J'ai écrit ce petit pamphlet parce que je désire expliciter ce "nouveau monde", son mystérieux projet dont les réformes en cours, nombreuses, ne laissent entrevoir que la pointe de l'iceberg. Je conçois mon rôle comme celui d'un ethnologue qui a réussi à pénétrer un tribu très exotique, aux moeurs inconnues, et à s'y fondre. À cela près que ce n'est pas des Nambikwara ou des Bororos dont je vais parler. Mais du groupe qu a pris la direction de l'État français et qu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Sous le pseudonyme – promptement démasqué – de Démosthène, le fustigeur athénien de l'hubris, Dany-Robert Dufour nous livre ici non pas un pamphlet anti-macronien, même si parfois son style pourrait y faire songer, mais une analyse et un décodage du parcours biographique et intellectuel ainsi que des présupposés philosophiques de la pensée de l'actuel président de la République.
Rédigé fin 2018 et imprimé en janvier 2019, donc avant la pandémie et le gouvernement Castex, ce petit livre est aussi richement documenté (visiblement écrit depuis les coulisses de la macronie) qu'agréable à lire : de plus, il offre un aperçu d'une stratégie de pouvoir qui n'est pas toujours transparente pour les citoyens qui ne font que s'informer de l'actualité et qui se méprennent donc notamment au sujet du rôle de l'État préconisé par Macron et de son prétendu keynésianisme.
L'ouvrage se divise en quatre chapitres, mais plus opportunément en deux parties, dont la seconde utilise la fiction de la première personne, d' « un personnage fictif qui s'appellera "moi, Président" et qui parlera comme s'il pouvait tout dire. Ce ne sera donc pas lui, mais en même temps, ce sera comme lui. », selon une « problématique ricoeurienne qu'il affectionne » (p. 93) :
I. « Jupiter jeune » – qui retrace certains aspects méconnus de sa vie avant la magistrature suprême ;
II. « De la République française au groupe France » - qui précise le sens de son action politique ;
III. « Précis de philosophie politique jupitérienne » - qui établit de façon très claire et structurée les six penseurs qui constituent son cadre de référence, ainsi que celui du capitalisme tel qu'il le promeut : Hobbes, Descartes, Machiavel, Mandeville, Hegel et Ricoeur ;
IV. « Le capitalisme, ses crises salvatrices et la réinvention permanente du monde » - qui prend comme jalons les trois crises du capitalisme au XXe siècle pour montrer leur capacité de métamorphoser le système, sans jamais perdre de vue notre actualité présente ; il se décline ainsi : a) « 1929 : la reconfiguration du capitalisme » - où toute son importance est accordée à Edward Bernays (neveu de Freud, auteur d'un essai intitulé : Propaganda), l'inventeur de la consommation de masse ; b) « 1968 : désinstitutionnalisation et mondialisation ou comment transformer des hippies en yuppies ? » - où est expliquée la récupération de Mai 68 point par point et ensuite la financiarisation de l'économie suite à la révocation des accords de Bretton-Woods en 1971 ; c) « 2008, vers la fin du monde. Et après ? » - où apparaît une nouvelle forme de multipolarité nationaliste (caractérisée en particulier par l'opposition radicale entre les stratégies de Donald Trump et de Xi Jinping), où les migrations internationales auront un rôle fondamental et croissant, et enfin où les problématiques environnementales sont envisagées comme des opportunités de développement de nouveaux marchés d'envergure extra-planétaire et sur-humaine...
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Le code Jupiter est écrit sous le pseudonyme de Démosthène, Dany-Robert Dufour, professeur de philosophie à Paris VIII, tombe le masque. C'est lui qui est l'auteur du pamphlet anti-Macron. "Quand vous stigmatisez, blâmez, jetez l’opprobre sur ceux qui n'y arrivent pas, comme depuis le début de ce quinquennat [...] il y a un moment où ces stigmatisations se traduisent par un sentiment d'injustice totale, et par un sentiment de revanche." Et Dufour de se rapporter à Démosthène (celui du IVe siècle avant JC), qui expliquait que l'outrage, l'affront, déclenchent bien mieux la révolte que le coup. Dufour, toujours en s'appuyant sur Démosthène, explique qu'il est bon pour le pouvoir de stigmatiser une fraction de la population, pour créer en regard une classe de vertueux. Mais Macron, poursuit Dufour, a stigmatisé beaucoup trop largement. "Au lieu de stigmatiser un petit groupe de dangereux, Macron a stigmatisé l'ensemble du peuple français. Et le peuple français est en train de lui répondre." Pour comprendre la haine qu'agrège sur lui d'Emmanuel Macron, nous revenons sur son parcours, et notamment son passage à la banque Rothschild. C'est là-bas qu'il a appris à "raconter des histoires crédibles même quand on y croit pas du tout", raconte Dany-Robert Dufour, qui rappelle qu'Alain Minc considérait la fusion-acquisition, le métier d'alors de Macron, comme un "métier de pute" pour lequel l'actuel président "avait toutes les qualités, parce qu'il savait séduire". Un point dans le livre de Dufour a fait tiquer Daniel Schneidermann : l'affaire Fillon, dans laquelle Dufour voit la main de Macron. C'est lui qui aurait transmis des documents au Canard enchaîné. "Là-dessus je n'ai pas de preuve", reconnaît notre invité. Ce n'est qu'une hypothèse, mais une hypothèse "solide", pour l'auteur, parce qu'"elle explique beaucoup de choses". Autre point marquant du Code Jupiter, l'idée que Macron aurait depuis la campagne un plan caché visant à une mise en concurrence généralisée de la société. Macron ne cachait pas son projet, objecte Daniel Schneidermann, prenant l'exemple des "bus Macron", mis en place explicitement pour concurrencer la SNCF. "Mais ce n'est pas seulement les autocars qu'il veut ouvrir, répond Dufour. C'est l'ensemble des secteurs où fonctionnaient encore en France ce qu'on appelle des services publics." Débarque le nom d'un écrivain du XVIIIe siècle largement inconnu, et pourtant essentiel pour Dufour : Bernard de Mandeville, psy et philosophe. Cet écrivain, dont le nom est beaucoup moins connu que ceux d'Adam Smith ou de Friedrich Hayek, serait pourtant l'un des plus importants maîtres à penser de l'école de Chicago, qui a imposé sa théorie néolibérale dans les années 1980. Dans la Fable de l'abeille, Mandeville racontait l'histoire d'une ruche qui fonctionnait à merveille parce que tout le monde "était un peu voleur", et qui périclite dès lors que les abeilles se décident à être vertueuses. Morale : "les vices privés font la vertu publique". Dans cette fable, Dufour voit l'une des premières évocations de la "théorie du ruissellement", revisitée par Macron avec les "premiers de cordée". Et dans le comportement loué par Mandeville, celui par exemple de Carlos Ghosn, le patron de Renault récemment incarcéré au Japon pour minoration de ses revenus. Si Mandeville est resté largement inconnu du grand public, certains connaissent très bien cet auteur. "Il est considéré comme le maître à penser de l'école de Chicago, qui dirige le monde depuis 30 ans." Mais étant donné la théorie clairement immorale, ou détachée de toute préoccupation morale que développe Mandeville, il ne serait pas mis en avant à tout bout de champ par les penseurs de cette école. Cette discrétion n'est d'ailleurs pas propre aux néolibéraux, assure Dufour : de leurs temps, les philosophes et sociologues Voltaire et Max Weber ont déjà fait de larges emprunts au psy, sans jamais le citer. Mais quel rapport avec Macron? "Il a baigné dans les théories libérales et néolibérales, et évidement celles en vigueur depuis les années 80, celles de Hayek et de Friedman", eux-mêmes largement influencés par Mandeville, d'après l'auteur du Code Jupiter. Problème, Macron aurait appliqué un peu vite les théories de Mandeville, notamment, comme Dufour l'explique, en "dosant mal" les flatteries et les blâmes. Aujourd'hui le président ""apparaît comme un manipulateur qui a utilisé les histoires qu'il a appris à la banque ""Rothschild"" pour manipuler les gens. Mais il a été très maladroit dans le dosage des maximes mandeviliennes de la ""flatterie"" et du ""blâme""."" Et le voilà avec tout le peuple contre lui.


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Pamphlet philosophique publié en novembre 2018.
Plus qu'une critique du système macronien, c'est un essai philosophique et politique sur la prise et l'exercice du pouvoir.

Etudes très intéressantes basées sur quatre idéologues : Descartes, Machiavel, Mandeville, Hegel et Paul Ricoeur.

Fascinant et très abordable
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Je me suis laissé avoir par la recommandation qu'a faite Patricia Martin à la fin de l'émission le Masque et la Plume du dimanche 6 janvier 2019 (on ne m'y reprendra plus !). Faisant croire qu'il appartient au premier cercle macronien, l'auteur, qui en réalité est un prof de philo à la retraite, auteur de quelques ouvrages peu vendus, a cru trouver le filon en écrivant une sorte de pamphlet sur Emmanuel Macron. Mais n'est pas pamphlétaire qui veut ! Dans le premier chapitre, l'auteur enfonce des portes ouvertes tout en cédant à la facilité (comme de présenter la réussite de Fillon à la Primaire de la droite comme l'oeuvre personnelle d'Emmanuel Macron). Paradoxalement, cette partie bâclée est la moins inintéressante. Car la suite, qui occupe les trois quarts du livre, associe en un chamarré fatras un recyclage des précédents ouvrages de l'auteur et un assortiment de théories du complot toutes plus ineptes les unes que les autres. Constamment mené à charge, grotesque dans sa visée mais plus encore dans ses moyens, ce pauvre essai est un naufrage total.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
1. « Ce credo dit "ordo libéral" est mal connu en France, souvent confondu avec celui de l'autre courant du libéralisme actuel, l'ultra-libéralisme qui, lui, au contraire, veut "moins d'État". Cette confusion, faite par 99% des intellectuels médiatiques […] fait bien rire les Jupitériens […]. Pendant donc que lesdits "intellectuels" pérorent contre l'ultra-libéralisme thatchérien ou reaganien, eux s'emploient tranquillement à reconstruire autrement l'État. Un État où les nouveaux corps intermédiaires seront, au premier chef, constitués des grands décideurs économiques et politiques – passés par Bilderberg, les Young Leaders et autres think tanks. Ils veulent donc leur donner une place centrale dans le gouvernement de la nation. C'est en somme une sorte de "direction opérationnelle" du groupe France, à l'instar de ce qui existe dans les grandes entreprises performantes, qu'ils veulent créer. » (pp. 63-64)
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3. « Les contestataires [de Mai 68] voulaient la fin de l'autorité, c'est-à-dire l'affaiblissement des lois et des règles, nous leur donnons donc, sous forme de déréglementation, de la désinstitutionnalisation, de la mise en réseaux, du nomadisme et du devenir soi de chacun.
Les contestataires voulaient sortir des rôles assignés à chacun : homme, femme, père, mère, enfant, hétérosexuel, homosexuel, noir, blanc... Aujourd'hui, chacun peut choisir son destin et peut même choisir son sexe. Il suffit d'intérioriser la loi du marché qui exige de chacun, quel qu'il soit, qu'il se prenne en charge, qu'il s'auto-évalue pour bien estimer sa valeur afin qu'il la défende au mieux dans la société. Il peut alors se lancer comme start-up défendant son capital personnel (son capital séduction, son capital mental, son capital efficacité, son capital sexuel, etc.).
[...] » (pp. 156-157)
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On connaît la réponse de Hobbes : il faut amener les individus à abdiquer volontairement du droit que la nature donne à chacun d'être lui-même en les assujettissant tous à un souverain absolu.
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Si vous cherchez de la reconnaissance et de la fidélité, évitez la politique et achetez-vous un chien (Winston Churchill)
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La Cité, la polis, suppose un politikos qui s'exprime avec franchise. Une parole de franchise, opposée aux arabesques de la flatterie, aux dissimulations rhétoriques et aux tours et détours de l'histrion.
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