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EAN : 9782702132463
220 pages
Calmann-Lévy (10/10/2001)
4.19/5   26 notes
Résumé :
Toute mère est sauvage. Sauvage en tant qu'elle fait serment, inconsciemment, de garder toujours en elle son enfant. De garder inaltéré le lien qui l'unit à son enfant dans cet espace matriciel à laquelle elle-même, petite, fut livrée. Ce serment se perpétue ainsi, secrètement, de mères en filles et en fils, jusqu'à l'étouffement et parfois même le meurtre, si de la différence ne vient pas en ouvrir le cercle, et briser l'enchantement. C'est ce serment, que doit rom... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
L'entrée en matière de ce livre laisse craindre un de ces éternels essais gynolâtre qui, depuis la pseudo libération féminine (parfois aussi appelée libération sexuelle, ce qui est contradictoire car le féminin n'est pas la sexualité mais la socialité), se plaisent à présenter le corps féminin à la manière d'une forêt primaire telle que nous ne pouvons plus qu'en imaginer : boue, sable, étendue aquifère moite, lianes, feuilles frémissantes, bourdons vrombissants, sève perlante, sang séché, torpeur, bouche qui colle. Nous aurions pu craindre, également, un de ces éternels éloges de la folie POUR la vie dont une femme pourrait faire preuve afin de sauver généreusement, pour ainsi dire inconditionnellement, en tout désintéressement, son enfant. Diantre ! il suffit heureusement de pousser quelques pages plus avant pour constater que rien de tel ne nous est proposé dans cet essai. La sauvagerie maternelle qu'évoque Durfourmantelle ne vise pas à faire de la femme un surhomme comme les autres – elle vise à montrer qu'à son terme, cette sauvagerie converge vers un innommable à la Beckett, aussi bien évoqué par Julia Kristeva dans « Soleil noir » - dans le piège d'une immanence spéculaire au creux de laquelle deux êtres, n'importe lesquels, ne peuvent que se regarder en chien de faïence avec, pour seules options : l'indifférence, la baise, l'agression.


Des analysants témoignent par le silence, les arrêts, la prise en circuit fermé, de leur impossibilité à dire. le silence, la sidération, la captivité dans une loyauté sans nom, sont les refrains de la sauvagerie maternelle. le sacrifice également qui, évoqué dans cet essai, prend tout son sens rétrospectivement de la mort de Dufourmantelle qui s'est noyée en mer, voulant sauver des enfants. Des analyses de romans ponctuent ces réflexions.


La psychanalyse devient pour ces captifs le cadre d'une naissance possible à la parole, de l'accès à sa jouissance de parler, à l'endroit où le silence ne traduisait autrefois que le faux sentiment de plénitude du sujet qui l'isolait du Logos. Tuer la mère, avant de tuer le père : tel est le sens non tronqué de l'Oedipe.


« La foule était assise autour de lui [Jésus Christ], et on lui dit : Voici, ta mère et tes frères son dehors et te demandent. Et il répondit : Qui est ma mère, et qui sont mes frères ? Puis, jetant les regards sur ceux qui étaient assis tout autour de lui : Voici, dit-il, ma mère et mes frères. Car, quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère, ma soeur, et ma mère. »
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La sauvagerie maternelle est un espace archaïque, qui lie les générations dans un rapport de filiation souvent douloureux. C'est à la fois un lien indéfectible et ce qui le rompt, un amour-haine avec lequel chacun doit se débattre, une déchirure de laquelle on ne guérit jamais.

Cet ouvrage de psychologie à la fois scientifiques et très littéraires se penche sur les fondements de la relation mère-enfant et ses impacts sur la vie des enfants une fois devenus adultes. L'autrice utilise des exemples tirés de cas cliniques réels et de la littérature classique pour illustrer ses propos.

L'écriture est foisonnante et assez dense. Les termes techniques se mélangent à des formulations lyriques, qui ne sont pas toujours facile à lire mais qui donnent de la force aux propos soutenus. C'est vraiment une façon intéressante et riche de traiter de psychologie. de plus, le sujet du livre en est un qui concerne tout le monde! Je m'y suis moi-même beaucoup reconnue et je suis sûre que chacun peut y trouver une part de son enfance perdue et peut-être le courage de vivre hors de sa mère.
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Dans ce récit clinique, Anne Dufourmantelle étudie la puissance dévastatrice que peuvent avoir des liens familiaux tronqués, notamment ceux qui lient, voire enchaînent un enfant à sa mère, avec tous le bagage des générations précédentes. Entre non-dits, serments, promesses, les patients dont des fragments d'analyse nous sont donnés expérimentent la souffrance qui précède la libération et la joie. Il en va de même pour les oeuvres littéraires dont l'autrice se sert pour étayer son propos, à savoir le choix de Sophie, de William Styron, et le mythique Anna Karénine, de Léon Tolstoï.

Le poids d'une enfance non vécue, l'histoire familiale qui se répète jusqu'à ce qu'elle soit dite, la mélancolie mortifère et les liens qui se pervertissent composent la trame d'un récit passionnant, bien que parfois difficile à suivre tant sont les implications mais aussi du fait d'un langage un peu alambiqué, même pour les initiés. On préférera donc d'autres ouvrages pour approcher la chose psychanalytique, mais ceux qui en sont familiers trouveront dans celui-ci des clés de lecture sur lesquelles s'appuyer dans leur pratique.
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Anne Dufourmantelle a un don pour rendre son savoir accessible à tous. C'est avec un réel plaisir qu'on "dévore" ses essais. J'apporterais juste une petite nuance au niveau de l'écriture peut-être un peu "bâclée" , on reconnait nettement moins le style littéraire et poétique de son admirable "Eloge du risque"
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Toute mère est sauvage. Sauvage en ce qu’elle appartient à une mémoire plus ancienne qu’elle, à un corps plus originel que son propre corps, boue, sable, eau, matière, liquide, sang, humeurs, à un corps de mort, de pourriture et de guerre, à un corps de vierge céleste aussi. Sa langue vient avant la langue ; elle est pur rythme, avec ses blancs, ses effacements, son impossibilité à dire, à savoir, à comprendre. C’est une langue sans mots, sans affect même, une langue sauvage faite de morceaux de corps détachés par la naissance de ce « tout » dont la perte nous affecte, dans l’enfance, comme un abandon premier irrémédiable. Ce « tout » de l’univers maternel, matriciel, n’a pourtant jamais existé.
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Ces quatre femmes et cet homme que je viens d’évoquer […] sont silencieux, je veux dire enveloppés, cerclés, dans un linceul qui préfigure une sorte de mort. Ce linceul est un silence antérieur à toute parole, ni refoulé ni restituable. Il est celui de leur mère, une mère comme ensevelie vivante dans la tombe, qu’ils nourrissent et protègent intérieurement de peur d’être rendus à jamais coupables de l’avoir abandonnée et ainsi, d’avoir tranché le dernier lien qui la retenait à la vie. C’est une part d’eux-mêmes qu’ils sacrifient, chacun à partir des scénarios de son désir, depuis une enfance qui les a engagés dans une histoire singulière, mais lestée du poids d’un silence tombal qui vient de beaucoup plus loin qu’ils ne peuvent l’imaginer, le concevoir.
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Nous cherchons toujours à sauver notre père, notre mère, voire les deux. Toujours. Même quand le prix à payer pour cette fidélité est exorbitant. Même quand le prix à payer est le démantèlement du corps propre, l’abjection, l’enfer d’un assujettissement qui ne permet aucune paix. C’est pourquoi naître ne suffit pas, il faut qu’un espace intérieur puisse se constituer pour l’enfant, à partir du sentiment qu’il a d’être aimé inconditionnellement, c’est-à-dire à partir d’un lieu en somme qu’on pourrait presque dire spirituel. Spirituel parce qu’il ne se résume à rien d’autre qu’à la pure présence.
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La pensée, même chez les pervers à l’intelligence aiguë, a en horreur le désir en tant qu’il anime la pensée. La pensée doit être « affectée » d’un récit qui rend possible la machination mise en place par le pervers pour jouir. Ce scénario est très contraignant, il peut être philosophique, littéraire, poétique ou grotesque, il n’en est pas moins un récit qui double le réel sur la même couture, qui le suture d’ailleurs entièrement, pour qu’il n’y ait aucun doute possible.
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Une psychanalyse inscrit dans l’amour de transfert des cases blanches où il n’y a plus de mots à remplir, des cases pour la respiration, pour la mémoire juste, pour le vide. Un « faire le vide » qui permet à une histoire, à un visage, à une vie, au croisement de tous les mots, de trouver leur réelle présence.
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Vidéo de Anne Dufourmantelle
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Philosopher ensemble !
#Trailer de présentation des Rencontres Philosophiques de Monaco
Avec la participation de: Alain Fleischer, Anastasia Colosimo, Anne Dufourmantelle, Avital Ronell, Barbara Cassin, Bernard Harcourt, Bernard Stiegler, Boris Cyrulnik, Bruno Karsenti, Camille Riquier, Catherine Chalier, Catherine Millet, Charlotte Casiraghi, Christian Godin, Claire Chazal, Claire Marin, Claude Hagège, Cynthia Fleury , Davide Cerrato, Denis Kambouchner, Dominique Bourg, Donatien Grau, Edwige Chirouter, Elisabeth Quin, Emanuele Coccia, Éric Fiat, Étienne Bimbenet, Fabienne Brugère, François Dosse, Frédéric Gros, Frédéric Worms, Gary Gillet, Geneviève Delaisi de Parseval, Geneviève Fraisse, Georges Didi-Huberman, Georges Vigarello, Géraldine Muhlmann, Gérard Bensussan, Hakima Aït El Cadi, Jean-Luc Marion, Jean-Pierre Ganascia, Joseph Cohen , Judith Revel, Julia Kristeva, Laura Hugo, Laurence Devillairs, Laurent Joffrin, Luc Dardenne, Marc Crépon, Marie Garrau, Marie-Aude Baronian, Mark Alizart, Markus Gabriel, Marlène Zarader, Martine Brousse, Corine Pelluchon, Maurizio Ferraris, Mazarine Pingeot, Michael Foessel, Miguel de Beistegui, Monique Canto-Sperber, Nicolas Grimaldi, Olivier Mongin, Paul Audi, Perrine Simon-Nahum, Peter Szendy, Philippe Grosos, Pierre Guenancia, Pierre Macherey, Raphael Zagury-Orly, Renaud
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