1905 ne fut pas seulement l’année de la vertigineuse ascension de Raspoutine, elle fut aussi celle de la première révolution russe. C’est lors de ces événements qu’un certain Lev Davidovitch Bronstein se fit remarquer pour la première fois. Ce jeune révolutionnaire aux yeux azur et aux cheveux en bataille n’était autre que le futur Léon Trotski. Il fut arrêté par la police du tsar, au cours d’une de ces soirées au parfum sucré d’acacia dont seuls les boulevards d’Odessa ont le secret. Comme tous les prisonniers, Trotski avait le droit de lire ce qu’il voulait et dressa une liste des lectures dont il souhaitait disposer. La plupart étaient des livres ésotériques et d’occultisme. La liste ne comportait pour ainsi dire pas d’ouvrages marxistes.
Plus tard, cet intérêt remarqué de Trostki pour l’occultisme fit penser à certains qu’il voulait utiliser ses connaissances ésotériques pour la création d’une société nouvelle. Ses biographes affirmèrent, eux, qu’il était tout simplement en train de rédiger un essai contre les francs-maçons, essai n’ayant malheureusement pas été retrouvé. Après la révolution d’Octobre, certains Russes réfugiés en Occident tireront de leur côté la conclusion audacieuse que toutes les révolutions bolchéviques avaient été en réalité inspirées par la magie noire…
Une telle hypothèse est-elle sérieusement envisageable ? En d’autres termes, existe-t-il quelque chose de commun entre le bolchevisme et les forces occultes ? A première vue, non. Et pourtant, force est de constater le caractère ambigu des rapports entre la religion et les dirigeants communistes, au premier rang desquels fut Staline. (pp. 163-164)
Un autre aspect de la vie spirituelle de la Russie apparut également au XIVe siècle avec les iouridivis, les fols en Christ. La « folie pour le Christ » fut un phénomène très populaire à travers les siècles et ses origines sont fort anciennes. C’est dans le désert d’Égypte que cette étonnante vocation de « fol en Christ » naquit aux environs du Ve siècle. L’Église grecque connaissait et respectait ces ascètes doués d’une forte intuition, convaincus que la souffrance était nécessaire à la vie spirituelle et qu’elle était l’antidote de l’orgueil.
Refusant d’apparaître comme des saints aux yeux du peuple, n’aspirant qu’à acquérir une réelle humilité doublée d’une grande compassion pour leurs semblables, les iouridivis se comportaient de manière grotesque et méprisable. Ils se promenaient nus et pratiquaient parfois l’onanisme aux yeux de tous pour provoquer le dégoût. Les enfants se moquaient d’eux, mais le peuple les vénérait en raison de leur amour pour le Christ. Leur existence vouée à la pauvreté et à la pénitence, leur force spirituelle et leur appréhension claire des choses de la vie forçaient le respect. Comme les staretz, ils vivaient ne communion avec la nature et en amitié avec les animaux, prophétisant la paix cosmique. (pp. 49-50)
Ukraine : "Une guerre nucléaire est tout à fait possible", avertit Vladimir Fédorovski