Une grande joie de parcourir les ressentis positifs et enthousiastes des uns et des autres, je vais tenter d'ajouter un signe de ma propre émotion.
Le destin tragique de
Charlotte, son talent, sa douleur de vivre… m'ont habitée fortement grâce à l'auteur. Ce qui m'a troublé et passionnée parallèlement c'est la narration de
David Foenkinos concernant la maturation très longue de ce texte qui habitait « notre auteur » depuis de longues années…ses doutes, son obsession persistante concernant
Charlotte Salomon, sont de très beaux passages sur les étapes complexes de la création …
En plus de l'émotion ressentie grâce à M. Foenkinos, je lui suis reconnaissante de « m'avoir découvrir » cet artiste, ainsi que la rencontre fortuite , secondaire de
Aby Warburg , en parallèle.
Je suis encore sous le choc de l'émotion et de la beauté du texte, entre poésie et prose. Ces courtes phrases, ponctuées chaque fois d'un point… qui induit un rythme sont une formidable idée. Très belle idée d'inciter le lecteur à une lenteur dans la lecture, en optant pour une certaine respiration.En réalité l'auteur nous explicite ce besoin régulier de point à chaque phrase, pour reprendre sa propre respiration...
Il ne me semble pas nécessaire de rentrer dans l'histoire et le détail du parcours de cette jeune femme talentueuse, silencieuse, et totalement habitée par son art…Son art qui lui fait combattre le désespoir, la barbarie de son époque.
J'ajoute deux extraits de
David Foenkinos, qui me touchent infiniment, signifiant si fort, combien la symbiose, la fusion avec cette femme, son art, et tout ce qu'elle peut représenter ont submergé, nourri l'écrivain, l'ont habité si longtemps
« le sentiment d'avoir enfin trouvé ce que je cherchais.
Le dénouement inattendu de mes attirances.
Mes errances m'avaient conduit au bon endroit.
Je le sus dès l'instant où je découvris -
Vie ? ou Théâtre ?
Tout ce que j'aimais.
Tout ce qui me troublait depuis des années.
Warburg et la peinture.
Les écrivains allemands.
La musique et la fantaisie.
Le désespoir et la folie.
Tout était là.
Dans un éclat de couleurs vives.
La connivence immédiate avec quelqu'un.
La sensation étrange d'être déjà venu dans un lieu.
J'avais tout cela avec l'oeuvre de
Charlotte.
Je connaissais ce que je découvrais. (p.70) »
Très attentive , bien évidemment à la trop brève et dramatique existence de
Charlotte narrée par Foenkinos, mais également aux notations de l'écrivain quant à la genèse de ce livre délicat….
‘« Pendant des années, j'ai pris des notes.
J'ai parcouru son oeuvre sans cesse.
J'ai cité ou évoqué
Charlotte dans plusieurs de mes romans.
J'ai tenté d'écrire ce livre tant de fois.
Mais comment?
Devais-je être présent?
Devais-je romancer son histoire?
Quelle forme mon obsession devait-elle prendre?
Je commençais, j'essayais,puis j'abandonnais.
Je n'arrivais pas à écrire deux phrases de suite.
Je me sentais à l'arrêt à chaque point.
Impossible d'avancer.
C'était une obsession physique, une oppression.
J'éprouvais la nécessité d'aller à la ligne pour respirer
Alors j'ai compris qu'il fallait l'écrire ainsi »
Toute ma reconnaissance et mes remerciements à l'auteur pour ce moment unique d'émotion et de rencontre. Lecture importante que je ne désirais pas quitter , c'est-à-dire laisser ainsi « sans façons », «
Charlotte », aussitôt le livre refermé… J'ai poursuivi avec la rédaction de cette chronique », et une liste de références que j'ai dénichées, pour prolonger la découverte émue de cette « belle artiste »…et poursuivre d'autres lectures !
© Soazic Boucard- Tous droits réservés- 12 octobre 2014