A l'heure où l'ultra-capitalisme tremble sur ses bases en raison d'une double crise financière et écologique, où les décideurs semblent à court d'idées novatrices, où la sinistrose gagne sans cesse du terrain, cet ouvrage consacré au philosophe
André Gorz tombe à pic.
Rédigé sous la direction de
Christophe Fourel, président de l'Association des lecteurs d'Alternatives économiques, «
André Gorz - Un penseur pour le XXIe siècle » permet d'approcher la pensée de celui qui fût un des théoriciens les plus importants de la critique sociale des cinquante dernières années et un des pionniers de l'écologie politique.
Etudiant à l'université de Lausanne pendant l'Anschluss,
André Gorz obtient le diplôme d'ingénieur chimiste en 1945 à l'âge de 22 ans et entame dans la foulée un traité de philosophie.
Chef du service économique de l'hebdomadaire l'Express dans les années 60 puis cofondateur du Nouvel Observateur,
André Gorz est aussi à la même époque directeur politique de la revue de
Jean-Paul Sartre et
Simone de Beauvoir « Les Temps modernes ». La pensée sartrienne et les thèses marxistes auront une influence considérable sur le parcours de cet autodidacte.
Proche de la CFDT, il s'intéresse aux mouvements syndicaux européens et suit de près les expériences révolutionnaires d'inspiration socialiste, en Amérique latine notamment.
Il popularise en France dans les années 70 la pensée d'
Ivan Illich sur l'écologie politique et place au coeur de sa réflexion la question de l'autonomie de l'individu quant à son libre épanouissement.
André Gorz quitte l'ensemble de ses fonctions publiques au début des années 80 pour se consacrer à son épouse atteinte d'une maladie évolutive.
Il continue cependant à écrire des livres en rapport avec le monde du travail, redéfinissant notamment la place du prolétariat dans l'histoire, élaborant des idées novatrices comme le passage du travail contraint au travail choisi, comme le développement des services à la personne ou encore l'instauration d'un revenu d'existence suffisant pour favoriser à la fois le travail autonome et la production alternative intégrant l'idée de rejet de la surconsommation.
Ses dernières études ont trait à la finitude du capitalisme qu'il considère inévitable à plus ou moins brève échéance, s'interrogeant seulement sur la forme qu'elle prendra : civilisée ou barbare.
Des personnalités de tous horizons ont participé à la rédaction des dix premiers chapitres qui représentent environ les trois quarts du livre. Ils ont côtoyé
André Gorz à différents moments de sa vie publique et leurs témoignages apportent un éclairage passionnant sur le penseur humaniste qui mettait constamment au coeur de sa réflexion l'interrogation suivante : « Que désirons-nous faire dans et de notre vie ? »
La dernière partie du livre rassemble des écrits divers d'
André Gorz dont une lettre posthume de toute beauté au camarade
Che Guevara.
Pas le moins du monde rébarbatif mais au contraire vivant et débordant d'humanité, «
André Gorz - Un penseur pour le XXIe siècle » s'adresse à un large public pas forcément féru de philosophie ou d'économie. Cet ouvrage retrace les combats d'un agitateur d'idées qui ont, ces dernières décennies, largement dépassé les frontières et dont le siècle qui commence s'inspirera très certainement.
André Gorz a fait le choix philosophique de quitter ce monde en septembre 2007, main dans la main avec sa compagne Dorine.
L'amour au centre des préoccupations sociétales, pensé comme question politique, est très prégnant dans l'oeuvre d'
André Gorz. L'amour de l'Autre sans lequel rien n'est possible, sans lequel toute tentative de transformation sociale reste déshumanisée.
Sur un plan personnel il avait besoin de Dorine pour écrire, l'amour pour sa compagne lui servait constamment de corde de rappel et d'inspiration.
Leur choix de partir ensemble, il l'avait exprimé avec noblesse quelques mois plutôt : « Nous aimerions chacun ne pas survivre à la mort de l'autre. Nous nous sommes dit que si, par impossible, nous avions une seconde vie, nous voudrions la passer ensemble. »