« Ma mère ne répondait pas , toute petite dans tout ce noir...
Elle attendait que ça passe, me berçait contre sa chaleur, que je n'aie pas peur, que je n'aie pas froid,...On se comblait l'un l'autre; elle me couchait dans le petit lit de bois de rose à portée de souffle, rebordait, tapotait, effleurait , voletait tout autour puis elle s'étendait, là, tout près , dans sa nuit blanche , les yeux grands comme le jour . »
Extrait où l'auteur voue un amour incommensurable à sa mère :
: Il le traduit de si belle manière au coeur de cet ouvrage ....
René Frégni évoque à coup sûr son enfance tumultueuse , illuminée toute entière par cette tendresse touchante !
Il la vénère, la révère, elle est sa boussole, sa passion, son soleil ,son garde - fou face à la férocité des enfants qui le surnomment Malbichu .
« Quand j'eus trois ans ma mère qui couvait mon regard a flanché de stupeur .Elle a décelé la tare, l'absence de symétrie , l'épouvante! Mon oeil gauche vaquait dans son coin , pesamment à la traîne , le droit suivait tous les déplacements .... »
Sa mère tant aimée, une mère courage, fragile, usée , épuisée , dévouée , sa mamie : une terreur , son papa: maître en traque de rats ,....des enfants féroces, des instituteurs vachards ,papa et maman Freinet , René toujours prêt à faire les quatre cents coups , dans la garrigue , sous le soleil de Provence ...
Marseille , ses dédales, ses couleurs , ses odeurs, la petite Suzon, la famille tuyau de poêle Maccaccari chez qui René fut laissé quelque temps en garderie , toutes sortes d'aventures dans un quartier populaire , des descriptions incroyables où le sordide côtoie le sublime , où l'injustice a souvent droit de cité ...Il ne faut pas en dire trop....
Le récit est magnifique , prenant , vif, enlevé et poétique, drôle et pudique, jamais misérabiliste, ancré avec chaleur et modestie dans une dure réalité , celle d'un parcours pour le moins difficile , fait de plaies et de bosses....
La plume est enchanteresse, René est le souffre douleur, côtoie la violence et le sordide: une rage d'enfant révolté , pétri de souffrances et de rebuffades, d' injustices , de bosses et de trous , de spectacles fous , d'exhibitions, de folies , de bêtises .... mais l'amour de sa maman vénérée le magnifiait ....
Quel plaisir de lecture ce livre tendre , dur et gouailleur !
Je le recommande !
Dédicace de l'auteur au début de ce bel ouvrage :
« A ma mère
Qui m'attend en dormant
Dans le soleil des collines . »