"Son histoire résonne en moi au moment où je suis tenté, moi aussi, par le renoncement. Mais Justo s'avance, donne l'exemple. Il se tient droit, la tête haute, fidèle à lui-même. Il n'a pas renoncé.
Il a accepté l'idée de l'oeuvre, d'habiter l'oeuvre. Une oeuvre qui n'a pas de fin, à laquelle il revient sans cesse, chaque matin (dont l'unique fin possible-
Proust nous l'a appris-sera la mort de l'artiste) Il a choisi d'écrire avec des briques..." (p. 64)
La découverte d'une vraie pépite, lors d'une flânerie aussi brève qu'imprévue à la librairie Mémoire7 à Clamart. Double pépite-trésor car par ce même petit ouvrage, j'ai fait à la fois la connaissance de cet écrivain,
Mark Greene et de Justo Gallego, ce nonogénaire, qui depuis 1961, construit seul une cathédrale, dans la banlieue de Madrid...
Fils de paysans, sans la moindre formation touchant à l'architecture ou au bâtiment, Justo, après un temps dans un monastère, et après avoir échappé à la tuberculose, se lance dans ce projet pharaonique...
Mark Greene , franco-américain, né en 1963, à Madrid, narre son attachement à son pays natal, l'Espagne,ainsi que ses difficultés à écrire sur cette terre, jusqu'à la sollicitation de ses éditeurs pour parler de cet ancien moine-bâtisseur...
L'écrivain ira à la rencontre de Justo, lui rendre visite, et s'immergera dans cette cathédrale extraordinaire...et dans ses propres souvenirs
"Il est Justo, un point c'est tout. S'il appartient à l'humanité, c'est plutôt malgré lui, à son corps défendant. (...)
en 1961, il a décidé de construire une cathédrale et, depuis, il n'a rien fait d'autre. Il n'a fait que cela. Il est au travail tous les jours, fignolant, ciselant, grattant, quelque part à l'intérieur de son immense chantier,
dans le ventre ou les poumons de son oeuvre. (...)
Pas de vacances, pas de voyages, pas de sport, cela va sans dire...Il est l'inverse d'un agité contemporain, de ces individus qui se déplacent sans cesse et, en fin de compte , ne font rien. " (p. 31)
Un très beau récit rempli de poésie, de spiritualité, de souvenirs personnels de l'auteur ainsi qu'un hommage vibrant à un bâtisseur original, et solitaire ...
"Tout de suite, il pensa à la cathédrale. (...) La cathédrale est plus vaste que le désert. (...) Il y a plus à marcher dans la cathédrale , se dit-il, que dans le
désert. Il y a plus à escalader, plus à descendre, plus à s'égarer, plus à se perdre...Plus à tomber, plus à se relever. L'idée de l'Oeuvre, soudain lui apparut, comme s'il s'agissait d'un immense continent à découvrir. (...)
L'oeuvre d'une vie..; Un pays sans fin, dont il visiterait, chaque mois, chaque semaine, une région nouvelle" (p. 93-94)
Une lecture euphorisante, magique... Les seul regret : ne pas pouvoir aussitôt partir là-bas... dans la périphérie madrilène... et voir cette construction époustouflante... En attendant, je me suis précipitée
pour admirer les petits films et les clichés, visibles, accessibles de l'oeuvre de Justo...sur le Net !
*******Voir liens suivants :
- http://immobilier.lefigaro.fr/article/a-91-ans-il-construit-seul-une-cathedrale-depuis-plus-de-50-ans_70227d4c-4cbf-11e6-bee6-a9412e1d6494/
- http://www.ina.fr/video/CPC97000317