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Alfred J.E. Fouillée (Préfacier, etc.)Thierry Paquot (Préfacier, etc.)
EAN : 9782738472151
142 pages
Editions L'Harmattan (03/05/2000)
4/5   3 notes
Résumé :
" Point de temps hors des désirs et des souvenirs, c'est-à-dire de certaines images qui, se juxtaposant comme se juxtaposent les objets qui les ont produites, engendrent tout à la fois l'apparence du temps et de l’espace. Le temps, à l'origine, n'existe pas plus dans notre conscience même que dans un sablier. Nos sensations et nos pensées ressemblent aux grains de sable qui s'échappent par l'étroite ouverture. Comme ces grains de sable, elles s'excluent et se repous... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Après avoir lu l'Esquisse d'une morale sans obligation ni sanction, je m'étais procuré cette Genèse de l'idée de temps, le temps étant un domaine fascinant à plus d'un titre. Bien que, pour Guyau, ce dernier n'existe pas objectivement, il n'est qu'une création de l'esprit...Théorie originale qui mérite que l'on s'y intéresse.


L'ouvrage s'amorce sur une préface de Thierry Paquot qui synthétise rapidement la vie de Guyau et l'influence qu'a eu ce livre sur certains penseurs, Jankélévitch et Bergson en tête. S'ensuit une introduction par Alfred Fouillée qui n'est autre que le beau père de l'auteur, nouveau mari de sa mère après le décès de son père. L'introduction est intéressante en tant qu'elle replace l'oeuvre et la pensée dans le contexte de ce qui l'ont permises : la philosophie de Kant et notamment sa vision du temps, domine de très loin cette introduction. Kant qui justement, soutient l'existence d'un temps "objectif", et c'est là que la pensée de Guyau prend le relais.
Pour Guyau, le temps est une pure création de notre esprit, il n'est que le lien d'une suite de situations spatiales, mais cette connexion - comme les connexions de la causalité de Hume - n'existe pas hors de l'esprit humain. Point n'est besoin d'avoir conscience du temps pour constater le changement : l'animal qui souffre ressent ce changement d'état, du neutre au douloureux, et agit en conséquence ; pour autant, il n'a pas conscience du temps qui passe.
Ce que nous appelons le temps n'est donc qu'une connexion d'images a posteriori, et non a priori comme beaucoup le pensaient et le pensent encore. Mais pourtant, il est indéniable que les choses changent, comment pouvons-nous vieillir si le temps n'en est pas la cause ? Guyau vous répondrait que tout n'est qu'un rapport de force : si je décide de parcourir une distance à pieds, je considèrerai qu'il me faut tant d'heures pour en voir le bout ; par ce « tant d'heures » c'est un « tant de pas » qui s'expriment, et par ce « tant de pas », les ressources physiques nécessaires à l'actionnement du mécanisme corporel me permettant de marcher ; il n'est pas question de temps mais de force. Autre démonstration permettant d'appuyer cette thèse : nous n'avons pas la même considération du passé selon, l'année, l'époque, etc. Qui ne s'est jamais dit « j'ai eu l'impression que cette heure en a duré quatre », ou alors, au crépuscule de l'année, retraçant dans son esprit quelque évènement marquant ayant eu lieu cependant que l'on appréciait son soleil levant, un traditionnel « il me semble que c'était hier » ?
Le temps n'est donc pas une nécessité de l'évolution, c'est l'évolution qui est une des nécessités du temps - de sa considération, mais, le temps n'existant pas objectivement, les deux termes sont identiques. En effet : nous n'aurions pas évolué pour prendre conscience des actions que nous avons accomplies, nous n'aurions pas pu les classer selon cette idée chronologique ; nous serions resté au stade animal, nous n'aurions jamais bâti cette idée de temps. Nous serions êtres purement spatiaux donc, et certaines expressions restitueraient cette idée : il est courant de dire que le passé se trouve derrière nous, l'avenir devant.
Tout cela est bien évidemment très succin et doit omettre d'évoquer des parties importantes de l'ouvrage, mais s'il vous intéresse, je ne saurai que vous conseiller de le lire, de ne pas vous contenter de cette chronique sans prétention - ce serait trop pour mes pauvres épaules que l'on a beau me dire larges, elles ne le seront jamais assez. D'autant qu'il est très accessible pour peu que l'on s'en donne la peine, la philosophie ne suffisait pas à Guyau, il s'est aussi fait poète et bien que la prose de cet ouvrage reste naturellement très philosophique, il est courant qu'il emploie des images - parfois magnifiques - aidant non seulement la compréhension, mais également le surgissement d'une plume qui sait se montrer sublime. Guyau admirait Victor Hugo, et ça se sent.


Un livre passionnant donc, sur une idée que je n'ai pas vu souvent évoquée dans leur monde qui n'est plus platonicien. La théorie se révèle naturellement difficile à soutenir sur bien des points, mais Deleuze nous dirait que la critique pure et simple ne sert pas la philosophie, que cette dernière veut une création permanente ; je soutiens. Je lirai donc Bergson afin d'apprécier la manière dont il s'est appuyé sur cette Genèse de l'idée de temps afin d'en faire quelque chose d'autre, afin de créer. Pour en revenir à Guyau, il reste l'auteur d'une pensée qui m'intéresse toujours autant et dont je ne manquerai pas d'approfondir la découverte.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
L'enfant ou l'animal n'ont donc pas un passé nettement opposé au présent,opposé à l'avenir qu'on imagine, qu'on construit à sa guise. L'enfant confond sans cesse ce qu'il a fait réellement, ce qu'il aurait voulu faire, ce qu'il a vu faire devant lui, ce qu'il a dit avoir fait, ce qu'on lui a dit qu'il a fait. Le passé n'est pour lui que l'image dominante dans le fouillis de toutes les images enchevêtrées ; il n'a en lui qu'une masse indistincte, sans groupement, sans classification : ainsi apparaissent les objets pendant le crépuscule ou la première aube, avant que les rayons du soleil n'y aient apporté à la fois l'ordre et la lumière, distribué tout sur divers plans.
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L'idée du temps, à elle seule, est le commencement du regret. Le regret, le remord, c'est la solidarité du présent avec le passé : cette solidarité a toujours sa tristesse pour la pensée réfléchie, parce qu'elle est le sentiment de l'irréparable.
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Imaginez un rocher battu par la mer : le temps existe pour lui, car les siècles l'entament et le rongent ; maintenant, supposez que la vague qui le frappe s'arrête tout à coup sans revenir en arrière et sans être remplacée par une vague nouvelle ; supposez que chaque particule de la pierre reste à jamais la même en présence de la même goutte d'eau immobile ; le temps cessera d'exister pour le rocher et la mer ; ils seront transportés dans l'éternité. Mais l'éternité semble une notion contradictoire avec celles de la vie et de la conscience telles que nous les connaissons. Vie et conscience supposent variété, et la variété engendre la durée. L'éternité, pour nous, c'est ou le néant ou le chaos ; avec l'introduction de l'ordre  dans les sensations et les pensées commence le temps.
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Les heures, les jours, les années, autant de casiers vides où nous distribuons à mesure toutes les sensations qui nous arrivent. Quand ces casiers sont pleins et que nous pouvons en parcourir toute la série sans rencontrer d'hiatus, ils forment ce que nous appelons le temps. Auparavant, ce n'étaient que des divisions de l'espace ; maintenant l'entassement et la distribution régulière des sensations dans l'espace a créé cette apparence que nous appelons le temps.
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Le passé [...] : c'est de l'actif devenu passif, c'est un résidu au lieu d'être une anticipation et une conquête. A mesure que nous dépensons notre vie, il se produit au fond de nous-mêmes, comme dans ces bassins d'où l'on fait évaporer l'eau de la mer, une sorte de dépôt par couches régulières de tout ce que tenait en suspens notre pensée et notre sensibilité. Cette cristallisation intérieure est le passé. Si l'onde est trop agitée, le dépôt se fait irrégulièrement par masses confuses ; si elle est suffisamment calme, il prend des formes régulières.
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